Catégorie : Français / Littérature
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Gérard de NERVAL (1808-1855) (Recueil : Odelettes) - El Desdichado
Introduction. Gérard de Nerval a composé ce sonnet en 1853, au lendemain d'une nouvelle période de troubles mentaux. Il vit désormais sous la menace constante d'une rechute. Il tente de se ressaisir en se reportant par le souvenir, comme il l'a déjà fait dans Sylvie, aux jours heureux de son enfance et de sa jeunesse; mais il n'a plus guère d'espoir et prend conscience d'une fatalité redoutable qui pèse sur lui. Le Destin, tel est le premier titre qu'il a donné à ces vers. Il s'arrête finale...
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Germain NOUVEAU (1851-1920) (Recueil : Valentines) - Jaloux
Germain Nouveau, Valentines, « Jaloux ». 1. En été dans ta chambre claire, 2. Vers le temps des premiers aveux, 3. (Ce jeu-là paraissait Te plaire) 4. On ouvrait parfois Baudelaire, 5. Avec ton épingle à cheveux, 6. Comme un croyant ouvre sa Bible, 7. En s'imaginant que le Ciel, 8. Dans un verset doux ou terrible, 9. Va parler à son coeur sensible, 10. Quelque peu superficiel ; 11. D'avance on désignait la page 12. A droite ou bien à gauche, et puis, 13. Par un chiffre le vers, ce mage 14. Qui...
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Arthur RIMBAUD (1854-1891) (Recueil : Illuminations) - Mouvement
Les Illuminations, « Mouvement », Arthur Rimbaud Introduction : Rimbaud a dix-neuf ans lorsqu’il entreprend l’écriture de ses derniers poèmes qui constitueront les Illuminations. En 1875, à vingt ans, il choisit le silence. Dans ce recueil Rimbaud renouvelle en profondeur tous les codes de l’écriture poétique. Il met à mal les formes traditionnelles pour se livrer à un véritable travail sur le langage, il exploite les rapports entre la forme du poème et le fond, entre le signifiant et le signifi...
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Hector de SAINT-DENYS GARNEAU (1912-1943) (Recueil : Les solitudes) - Ma maison
Hector de SAINT DENYS GARNEAU, Les Solitudes, « Ma maison ». 1. Je veux ma maison bien ouverte, 2. Bonne pour tous les miséreux. 3. Je l'ouvrirai à tout venant 4. Comme quelqu'un se souvenant 5. D'avoir longtemps pâti dehors, 6. Assailli de toutes les morts 7. Refusé de toutes les portes 8. Mordu de froid, rongé d'espoir 9. Anéanti d'ennui vivace 10. Exaspéré d'espoir tenace 11. Toujours en quête de pardon 12. Toujours en chasse de péché. Poète Hector de Saint-Denys Garneau (1912-1943) : poète...
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Jean de LA FONTAINE (1621-1695) (Recueil : Les Fables) - Le Corbeau et le Renard
Jean de La Fontaine, Les Fables, « Le Corbeau et le Renard ». 1. Maître Corbeau, sur un arbre perché, 2. Tenait en son bec un fromage. 3. Maître Renard, par l'odeur alléché, 4. Lui tint à peu près ce langage : 5. « Hé ! bonjour, Monsieur du Corbeau. 6. Que vous êtes joli ! que vous me semblez beau ! 7. Sans mentir, si votre ramage 8. Se rapporte à votre plumage, 9. Vous êtes le Phénix des hôtes de ces bois ». 10. A ces mots le Corbeau ne se sent pas de joie ; 11. Et pour montrer sa...
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Marc-Antoine Girard de SAINT-AMANT (1594-1661) - La solitude
Marc-Antoine Girard, sieur de Saint-Amant, « La solitude ». 1. Ô ! que j'aime la solitude ! 2. Que ces lieux sacrés à la nuit, 3. Eloignés du monde et du bruit, 4. Plaisent à mon inquiétude ! 5. Mon Dieu! Que mes yeux sont contents 6. De voir ces bois qui se trouvèrent 7. A la nativité du temps, 8. Et que tous les Siècles révèrent, 9. Etre encore aussi beaux et verts, 10. Qu'aux premiers jours de l'Univers ! 11. Que j'aime à voir la décadence 12. De ces vieux châteaux ruinés, 13. Contre qui les...
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Jean de SPONDE (1557-1595) - Qui sont, qui sont ceux-là, dont le coeur idolâtre
Jean de SPO N DE ( 1557-1595) « Qui s ont, qui s ont c eux-là, dont le c œur idolâtre… » « Qui s ont, qui s ont c eux-là, dont le c œur idolâtre Se jette aux pieds du M onde, et flatte s e s honneurs Et qui s ont c e s valets , et qui s ont c e s Seigneurs , Et c e s â m e s d'Ebène, et c e s fac e s d'Albâtre ? C e s m a s q u e s d é g u i s é s , dont la troupe folâtre S ' a m u s e à c ares s er je ne s a i s q u e l s donneurs De fumées de Cour, et c e s entrepreneurs De vainc re enc or...
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Jacques TAHUREAU (1527-1555) - Chanson
Commentaire d’un poème de Jacques Tahureau, Chanson Introduction : Notre poème a été écrit au XVème siècle par un auteur très peu étudié au lycée, Jacques Tahureau, poète qui avait une certaine renommée à l’époque où il a vécu (1527-1555). Il a écrit en particulier pour dénoncer les tourments de l’amour. Toutefois, dans notre poème, son regard n’est pas aussi tranché qu’il n’y paraît, il condamne l’amour tout autant qu’il le réclame. Projet de lecture : Quelle image de l’amour propose l...
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Paul VERLAINE (1844-1896) (Recueil : Poèmes saturniens) - Effet de nuit
Paul VERLAINE (1844-1896) (Recueil : Poèmes saturniens) – « Effet de nuit » Introduction : Le poème « Effet de nuit » se trouve dans la section « Eaux Fortes » du recueil de Verlaine, Poèmes saturniens, publié en 1866. Dans ce recueil, Verlaine se pace sous le signe de Saturne, planète de la mélancolie. Les Saturniens figurent une sorte de communauté imaginaire à laquelle se trouvent associés tous ceux qui subissent l'influence de la « fauve planète. » La section « Eaux Fortes » au sein de laqu...
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Alphonse de LAMARTINE (1790-1869) (Recueil : Méditations poétiques) - Le lac
Commentaire composé du poème « Le Lac » de Lamartine Introduction : Le poème « Le lac » est extrait du recueil des Méditations Poétiques de Lamartine publié en 1820. Dans ce poème, Lamartine évoque ses souvenirs avec sa maîtresse, Julie Charles, récemment décédée, avec qui il avait visité ces lieux autrefois. Les souvenirs du poète revenant sur ce lac ne sont en rien altérés par le temps passés. Lamartine exalte dans ce poème lyrique les thèmes chers aux romantiques : la nature, l’amour déchu, l...
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Charles-Marie LECONTE DE LISLE (1818-1894) (Recueil : Poésies diverses) - Nox
Charles-Marie LECONTE DE LISLE, Poésies diverses, « Nox ». Nox 1. Sur la pente des monts les brises apaisées 2. Inclinent au sommeil les arbres onduleux ; 3. L'oiseau silencieux s'endort dans les rosées, 4. Et l'étoile a doré l'écume des flots bleus. 5. Au contour des ravins, sur les hauteurs sauvages, 6. Une molle vapeur efface les chemins ; 7. La lune tristement baigne les noirs feuillages ; 8. L'oreille n'entend plus les murmures humains. 9. Mais sur le sable au loin chante la Mer divine, 10...
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LETTRE CXXV. USBEK A RHEDI. MONTESQUIEU
INTRODUCTION Le Persan qui est censé écrire cette lettre n'a pas perdu son temps en visitant notre pays. C ette ordonnance burlesque est un bon morceau de polémique à la française, cachant un raisonnement précis sous la fantaisie et le badinage. I. IDÉES SÉRIEUSES Les deux développements contrastés qui la composent sont conduits par une même intention, qui n'est nulle part explicitée : la protestation contre la politique, inaugurée par Louis XIV , qui fait de l'éclat de la cour un moyen de gouve...
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Paul VERLAINE (1844-1896) (Recueil : Sagesse) - Le ciel est par-dessus le toit
Introduction Le commentaire que Verlaine donne de son propre poème a le premier mérite de nous renseigner sur les circonstances dans lesquelles ce poème a été écrit. L'auteur se trouve dans une cellule de la prison de Mons, où il a été incarcéré après avoir blessé d'un coup de revolver son ami Rimbaud. Le commentaire nous détaille les éléments du paysage que Verlaine pouvait voir de la fenêtre de sa cellule. De ces éléments, seuls figurent dans le poème ceux qui sont propres à nourrir le sentime...
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Paul VERLAINE (1844-1896) (Recueil : Poèmes saturniens) - Nevermore
INTRODUCTION : I. — Ce sonnet est à la fois un épanchement, un récit et une évocation. Verlaine y évoque un souvenir au deuxième degré qui hante sa pensée et souligne le caractère inéluctablement révolu du passé; d'où le titre Nevermore (en français : Jamais plus) emprunté au célèbre refrain du Corbeau d'Edgar Poë, traduit par Baudelaire. II. — Le poème est une confidence sur un ton d'abord mélancolique comparable à celui d'une complainte (1 à 4) — puis désinvolte et lancinant par l'évocation d'...
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Paul VERLAINE (1844-1896) (Recueil : Poèmes saturniens) - Promenade sentimentale
Introduction En 1866, dans le monde de la poésie toujours dominé par le talent de Baudelaire et marqué par la constitution du groupe Parnassien sous l'autorité esthétique de Leconte de Lisle, se fait entendre une voix nouvelle à l'occasion de la publication des Poèmes Saturniens de Paul Verlaine (dont certains sont déjà parus dans des revues littéraires). L'inspiration générale du recueil a été définie par l'auteur lui-même qui se présente comme un de ces êtres « nés sous le signe de Saturne »,...
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Pierre de RONSARD (1524-1585) (Recueil : Premier livre des Amours) - Soit que son or se crêpe lentement
Pierre de Ronsard, Premier livre des Amours, « Soit que son or se crêpe lentement ». 1. Soit que son or se crêpe lentement 2. Ou soit qu'il vague en deux glissantes ondes, 3. Qui çà, qui là par le sein vagabondes, 4. Et sur le col, nagent folâtrement ; 5. Ou soit qu'un noeud illustré richement 6. De maints rubis et maintes perles rondes, 7. Serre les flots de ses deux tresses blondes, 8. Mon coeur se plaît en son contentement. 9. Quel plaisir est-ce, ainçois quelle merveille, 10. Quand ses chev...
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Paul VERLAINE (1844-1896) (Recueil : Jadis et naguère) - Sonnet boiteux
Commentaire du poème de Paul Verlaine : « Sonnet Boiteux » Introduction : Le « Sonnet boiteux » est publié par Paul Verlaine dans le recueil Jadis et Naguère qui date de 1881. Mais le sonnet date vraisemblablement de l'époque de solitude de Verlaine à Londres, après que Rimbaud ait rejoint la France (fin 1872-début 1873) à l'automne. Le titre du poème, le « Sonnet Boiteux » donne un indice sur la forme te le contenu du poème. Il s’agit bien d’un sonnet, mais il est boiteux puisque Verlaine entra...
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Marc-Antoine Girard de SAINT-AMANT (1594-1661) - Plainte sur la mort de Sylvie
Marc-Antoine Girard de SAINT-AMANT, « Plainte sur la mort de Sylvie ». 1. Ruisseau qui cours après toi-même 2. Et qui te fuis toi-même aussi, 3. Arrête un peu ton onde ici 4. Pour écouter mon deuil extrême. 5. Puis, quand tu l'auras su, va-t'en dire à la mer 6. Qu'elle n'a rien de plus amer. 7. Raconte-lui comme Sylvie, 8. Qui seule gouverne mon sort, 9. A reçu le coup de la mort 10. Au plus bel âge de la vie, 11. Et que cet accident triomphe en même jour 12. De toutes les forces d'Amour. 13. L...
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Paul VERLAINE (1844-1896) (Recueil : Jadis et naguère) - Vers pour être calomnié
Paul VERLAINE, Jadis et naguère, « Vers pour être calomnié ». Ce soir je m'étais penché sur ton sommeil. Tout ton corps dormait chaste sur l'humble lit, Et j'ai vu, comme un qui s'applique et qui lit, Ah ! j'ai vu que tout est vain sous le soleil ! Qu'on vive, ô quelle délicate merveille, Tant notre appareil est une fleur qui plie ! O pensée aboutissant à la folie ! Va, pauvre, dors ! moi, l'effroi pour toi m'éveille. Ah ! misère de t'aimer, mon frêle amour Qui vas respirant comme on respire un...
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Marguerite Duras - Un barrage contre le Pacifique
La vie qu'on mène n'est pas toujours - pas souvent ? - à la hauteur de nos rêves, ambitions ou illusions... Pour certains, aux jours ternes et monotones de la vie quotidienne, il faut substituer des jours en couleurs, des jours de lumière où l'esprit se perd : quelques-uns s'évadent dans des paradis artificiels, d'autres préfèrent les paradis, plus nobles, de la poésie, d'autres encore - Emma Bovary - s'élancent par des romans faciles vers des cieux plus beaux... Le XXe siècle inventa la plus su...