Devoir de Français

Vous illustrerez par l'étude d'une tragédie de Racine cette définition que La Bruyère donne du poème tragique : « Le poème tragique vous serre le coeur dès son commencement, vous laisse à peine dans tout son progrès la liberté de respirer et de vous remettre ; ou s'il vous donne quelque relâche, c'est pour vous replonger dans de nouveaux abîmes, dans de nouvelles alarmes. Il vous conduit à la terreur par la pitié ou, réciproquement, à la pitié par la terreur, vous mène par les larmes,

Extrait du document

Vous illustrerez par l'etude d'une tragedie de Racine cette definition que La Bruyere donne du poeme tragique Le poeme tragique vous serre le coeur des son commencement vous laisse a peine dans tout son progres la liberte de respirer et de vous remettre ou s'il vous donne quelque relache c'est pour vous replonger dans de nouveaux abimes dans de nouvelles alarmes. Il vous conduit a la terreur par la pitie ou reciproquement a la pitie par la terreur vous mene par les larmes par les sanglots par l'incertitude par l'esperance par la crainte par les surprises et par l'horreur jusqu'a la catastrophe. ?

« INTRODUCTION La valeur d'une pièce de théâtre se mesure d'abord à l'emprise qu'elle exerce sur les spectateurs.

D'emblée elle doit susciter leur intérêt à l'égard des personnages et des problèmes auxquels ils se heurtent.

Et au cours du déroulement de la représentation, cet intérêt doit aller grandissant jusqu'au dénouement.

La tragédie de Phèdre répond pleinement à ces exigences.

Dès le premier acte, elle nous émeut par l'évocation du drame intérieur d'Hippolyte et de Phèdre.

Elle ne nous fait partager cette impression momentanée d'apaisement ressentie par les acteurs eux-mêmes que pour nous replonger dans de nouvelles alarmes et jusqu'à « l'horreur de la catastrophe finale » elle provoque tour à tour en nous la terreur et la pitié.

Ainsi illustre-t-elle point par point la définition que La Bruyère donne du poème tragique dans son chapitre sur les Ouvrages de l'Esprit. I.

UNE EXPOSITION ÉMOUVANTE Dès la première scène de Phèdre, l'intérêt du spectateur s'éveille et son émotion va croissant au cours du premier acte, à mesure qu'il découvre, avec le désarroi des personnages, les éléments de la situation tragique où ils se trouvent l'un et l'autre impliqués.

Au début le spectateur est attendri par l'inquiétude de ce fils affectueux et respectueux qui s'interroge anxieusement sur le sort de son père disparu depuis de longs mois, par sa passion naissante qu'il suggère avec tant de discrétion pudique : « Si je la haïssais, je ne la fuirais pas.

» De même le spectateur compatit au désarroi de ce jeune homme effrayé par la violence d'un sentiment qu'il n'a jamais connu et auquel il se croyait inaccessible, et pénétré en même temps de remords à l'idée que son amour s'attache à la descendance d'une famille à laquelle Thésée a voué une haine inexpiable.

Avec l'arrivée de Phèdre l'émotion du spectateur s'accroît encore.

Les quelques vers où Théramène avait fait allusion au lamentable état physique de l'héroïne, à sa prostration et à son désespoir avaient déjà éveillé sa curiosité et son intérêt, que les propos d'Oenone avaient encore avivés.

L'arrivée sur la scène de Phèdre dolente et égarée, l'aveu à la fois exalté et désespéré qu'elle fait de sa passion coupable pour Hippolyte et cette malédiction que l'on sent peser sur sa famille et sur elle font régner sur la scène une atmosphère accablante et presque irrespirable.

A ce moment se trouvent réunis tous les éléments qui nouent le drame : sur Hippolyte qui aime celle qu'il lui est interdit d'aimer et qui est en même temps, sans le savoir, l'objet d'une passion coupable, sur Phèdre, en proie à un amour maudit -auquel elle ne peut se soustraire que par la mort, planent de dangereuses et mystérieuses menaces. II.

APRÈS UN RÉPIT L'INTRIGUE PLONGE LE SPECTATEUR DANS DE NOUVELLES ALARMES Mais cet état de tension extrême auquel se trouvent soumis les nerfs des spectateurs ne saurait impunément se prolonger.

Aussi le développement de l'intrigue va-t-il amener une détente momentanée qui apporte quelque soulagement à la fois aux acteurs et au public. L'arrivée de Panope à la fin du premier acte, la nouvelle qu'il apporte vont permettre à Oenone de secouer cette torpeur où Phèdre demeure ensevelie.

La mort de Thésée modifie la situation initiale qui semblait inextricable.

Phèdre se doit de défendre les droits de son fils au trône que la disparition de Thésée a laissé vacant.

Elle peut, maintenant qu'elle est libre, s'abandonner à une passion qui a cessé d'être coupable.

A cette mère qui prend conscience de ses devoirs, à cette amante qui entrevoit maintenant quelques raisons d'espérer, cette situation nouvelle redonne le goût de vivre alors qu'elle se trouvait déjà aux portes du tombeau. Pourtant cette fausse impression de sécurité ne va pas durer.

Et le caractère tragique de la situation va s'accroître encore.

Car le retour de Thésée ne replace pas seulement Phèdre dans cette situation cruelle qui, au début de la pièce, l'avait acculée au désespoir.

Dans l'intervalle, sous l'effet de la fausse nouvelle, elle a osé avouer à Hippolyte la folle passion qu'elle éprouve pour lui.

Cette passion ensevelie au fond d'elle-même l'accablait certes de honte et de remords mais, au moins, à l'exception d'Oenone, nul ne connaissait son pénible secret.

Maintenant elle éprouve par surcroît la honte de l'aveu et celle d'avoir été repoussée avec horreur par l'objet de sa passion et aussi la crainte de voir Hippolyte dévoiler à son père l'amour qu'elle lui a déclaré.

C'est alors qu'elle accepte de laisser Oenone accuser Hippolyte du crime qu'elle a elle-même commis.

L'émotion du spectateur dès lors est à son comble.

Pour Phèdre, égarée par sa passion au point de se faire la complice d'une atroce calomnie, il éprouve à la fois de la compassion et de l'horreur.

Il ne peut s'empêcher de trembler pour le sort d'Hippolyte qui va se trouver injustement en butte à la redoutable colère de Thésée.

Sur le plan psychologique comme sur le plan dramatique la pièce atteint les sommets du pathétique. III.

DE LA PITIÉ A LA TERREUR ; DE LA TERREUR A LA PITIÉ Dès lors le spectateur ne va pas cesser d'être bouleversé par le drame qui se poursuit devant ses yeux.

Comme le dit La Bruyère « il est conduit à la terreur par la pitié ou réciproquement à la pitié par la terreur jusqu'à la catastrophe ».

Au quatrième acte, tout conspire à exciter à l'égard du jeune Hippolyte un sentiment de pitié : son étonnement douloureux devant les accusations de son père auquel il venait de manifester tant d'affectueuse et discrète sollicitude, la dignité simple avec laquelle il fait le bilan de son passé sans tache, l'aveu tumultueux d'un amour qu'il avait si longtemps caché à celle-là même qui l'inspirait, le ton soumis enfin sur lequel il s'enquiert de la peine que Thésée réserve à son innocence.

Mais lorsque Thésée profère des imprécations contre Hippolyte, qu'il adresse à Neptune une prière inhumaine, la pitié fait place à la terreur ; et la même impression se renforce encore lorsque Phèdre, s'abandonnant à un accès de jalousie frénétique à l'égard d'Aricie sa rivale, évoque avec un frisson d'horreur sacrée cette nuit infernale où elle était prête à se plonger. Inversement le spectateur participe à cette terreur qui s'empare de Thésée lorsque successivement les paroles d'Aricie, le trouble grandissant de Phèdre et le suicide d'Oenone font naître en son coeur un horrible doute.

Mais bientôt c'est un sentiment de pitié auquel on cède devant l'accablement de ce père douloureux, devant le triste sort qui déjà a frappé Hippolyte et devant Phèdre effondrée et presque agonisante.

Alors la catastrophe finale que tout laissait prévoir imminente se déclenche enfin, entraînant à la fois dans la mort Phèdre et Hippolyte. CONCLUSION C'est ainsi que, d'un bout à l'autre de la pièce, le spectateur est tenu en haleine, emporté par une émotion croissante vers un dénouement que depuis longtemps déjà il pressentait inévitable.

Phèdre illustre donc d'une manière parfaite la définition que La Bruyère a donnée du poème tragique.

Mais si l'on s'avise que l'ensemble des pièces de Racine progresse au même rythme haletant, on comprend mieux l'injustice du jugement d'Alfred de Musset qui définissait la tragédie racinienne en ces termes : « une fable languissante, un intérêt faible, de longs discours...

une détestable école de bavardage ».. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles