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Victor Hugo, Notre-Dame de Paris

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Victor Hugo, Notre-Dame de Paris Nous n'essayerons pas de donner au lecteur une idée de ce nez tétraèdre, de cette bouche en fer de cheval ; de ce petit oeil gauche obstrué d'un sourcil roux en broussailles, tandis que l'oeil droit disparaissait entièrement caché sous une énorme verrue ; de ces dents désordonnées, ébréchées ça et là, comme les créneaux d'une forteresse ; de cette lèvre calleuse, sur laquelle une de ces dents empiétait comme la défense d'un éléphant ; de ce menton fourchu ; et surtout de la physionomie répandue sur tout cela ; de ce mélange de malice, d'étonnement et de tristesse. Qu'on rêve, si l'on peut, cet ensemble. L'acclamation fut unanime ; on se précipita vers la chapelle. On en fit sortir en triomphe le bienheureux pape des fous. Mais c'est alors que la surprise et l'admiration furent à leur comble ; la grimace était son visage. Ou plutôt toute sa personne était une grimace. Une grosse tête hérissée de cheveux roux ; entre les deux épaules une bosse énorme dont le contre-coup se faisait sentir par devant ; un système de cuisses et de jambes si étrangement fourvoyées qu'elles ne pouvaient se toucher que par les genoux, et, vues de face, ressemblaient à deux croissants de faucilles qui se rejoignent par la poignée ; de larges pieds, des mains monstrueuses ; et, avec toute cette difformité, je ne sais quelle allure redoutable de vigueur, d'agilité et de courage ; étrange exception à la règle éternelle qui veut que la force, comme la beauté, résulte de l'harmonie. Tel était le pape que les fous venaient de se donner. Notre-Dame de Paris,1831

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