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Pierre Corneille, Rodogune (1645), Acte II, scène 1, vers 395 à 426.

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Pierre Corneille, Rodogune (1645), Acte II, scène 1, vers 395 à 426. CLÉOPÂTRE 395 Serments fallacieux, salutaire contrainte, Que m'imposa la force et qu'accepta ma crainte, Heureux déguisements d'un immortel courroux, Vains fantômes d'État, évanouissez-vous ! Si d'un péril pressant la terreur vous fit naître, 400 Avec ce péril même il vous faut disparaître, Semblables à ces voeux1 dans l'orage formés, Qu'efface un prompt oubli quand les flots sont calmés. Et vous2, qu'avec tant d'art cette feinte a voilée, Recours des impuissants, haine dissimulée, Digne vertu des rois, noble secret de cour, Éclatez, il est temps, et voici notre jour. Montrons-nous toutes deux, non plus comme sujettes, Mais telle que je suis et telle que vous êtes. Le Parthe est éloigné, nous pouvons tout oser : 410 nous n'avons rien à craindre et rien à déguiser ; Je hais, je règne encor. Laissons d'illustres marques En quittant, s'il le faut, ce haut rang des monarques : Faisons-en avec gloire un départ éclatant, Et rendons-le funeste à celle qui l'attend. C'est encor, c'est encor cette même ennemie Qui cherchait ses honneurs dedans mon infamie, Dont la haine à son tour croit me faire la loi, Et régner par mon ordre et sur vous et sur moi. Tu m'estimes bien lâche, imprudente rivale, 420 Si tu crois que mon coeur jusque-là se ravale, Qu'il souffre qu'un hymen qu'on t'a promis en vain Te mette ta vengeance et mon sceptre à la main. Vois jusqu'où m'emporta l'amour du diadème ; Vois quel sang il me coûte, et tremble pour toi-même : Tremble, te dis-je ; et songe, en dépit du traité, 426 Que pour t'en faire un don je l'ai trop acheté.

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