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René GHIL (1862-1925) (Recueil : Légendes d'âmes et de sangs) - Les herseurs - sous la lune

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René GHIL (1862-1925) (Recueil : Légendes d'âmes et de sangs) - Les herseurs - sous la lune Ainsi qu'une prière et qu'un ennui, soleilles - Tu, lune pleine ! haut au haut des peupliers ! Tout a l'air d'eaux : et l'Homme inému des merveilles Mène par la lumière, ayant l'amour des veilles, Les pas las des Taureaux, Trois et loin réguliers. Traîneurs doux de l'aiguë et de la large herse, Homme et Taureaux, la lune, aux pâles prés, les a Mornes et seuls grandis : et la paix large, à verse Molle, neige - : et, mouillé de l'impalpée averse, L'équipage impavide et religieux va. Doux de lune, vont las les Taureaux pleins de songe, Un seul, et deux : et, sur l'épaule l'aiguillon, Très haut l'Homme en avant en la paix grande plonge, Tandis que leur dos maigre et noir marqué s'allonge Hors mesure près d'eux, et rampe noir et long... Haut sur les peupliers, la lune vénérienne A des spleens graves, et, phosphorique, le noir A des eaux de miroirs : mais las ! que mésavienne, Quand à plein Temps le noir prendra l'horreur pour sienne La pluie, - et, non sous Terre, aux remous sans espoir De l'eau large qui pisse et s'éverse aux semaines, Nagera le grain nul : aussi, grands mesureurs De leurs Terres, avant qu'ait loin, prodigue en peines, Tout voilé l'ample herse, âpres et longs d'haleines, Vont-ils sans le désir des lourds sommeils vainqueurs ! Sans paix, allés, venus, doux de rêve lunaire vont-ils : et, las d'aller, s'enrêve le herseur : Ayant l'air de songer, en un songe sévère, Au nu large, tout sexe et vulve, de la Terre, Qui s'ouvre, génésique, au germe envahisseur !

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