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L'originalité de Stendhal

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La personnalité de Stendhal apparaît en pleine lumière dans ses trois ouvrages autobiographiques : le Journal, la Vie de Henry Brulard, les Souvenirs d'égotisme. Le passionné. «je sais que je suis très passionné », déclare Stendhal. Il avoue même dans la Vie de Henry Brulard : « La nature m'a donné les nerfs délicats et la peau sensible d'une femme. » L'inflexion d'un mot, l'esquisse d'un geste, suffisent à le mettre au comble du bonheur ou du désespoir : à la mort de sa mère, on fut obligé de l'emmener, parce que « sa douleur faisait trop de bruit ». Son âme sensible rêve sans cesse des « plus nobles passions » : il voudrait avoir un ami, mais un ami, écrit-il, « qui fût tout pour moi, comme moi tout pour lui », et professe que « le sublime de l'amitié est moins à mourir pour son ami dans une occasion éclatante qu'à se sacrifier journellement et obscurément pour lui ». Deux passions surtout, l'amour et la gloire, se partagent son coeur. Toute sa vie, Stendhal a bâti « des châteaux en Espagne de bonheur par l'amour » : il ose croire qu'étant aux pieds de la femme aimée, il pourra lui montrer son amour « d'une manière digne d'elle et de lui, en traits d'une beauté immortelle ». Mais il lui arrive aussi de penser qu'aucune volupté n'est égale à celles de l'action et de la domination. Cette sensibilité s'épanche aussi dans les arts : Stendhal aime « passionnément la musique de Cimarosa et de Mozart »; il vibre devant de belles toiles ou de belles statues; il se sent poète pour avoir éprouvé un nombre infini d'émotions douces ou intenses; il est habité par le démon du théâtre, fréquente assidûment la Scala de Milan ou la Comédie-Française, se figure que tous les sujets seraient bons, traités de ses mains, ébauche les canevas d'une quantité de pièces et prend même des leçons de diction avec le comédien Dugazon, qui apprécie chez lui « la chaleur de l'âme ».

« LE TEMPÉRAMENT La personnalité de Stendhal apparaît en pleine lumière dans ses trois ouvrages autobiographiques : le Journal, la Vie de Henry Brulard, les Souvenirs d'égotisme. Le passionné.

«je sais que je suis très passionné », déclare Stendhal.

Il avoue même dans la Vie de Henry Brulard : « La nature m'a donné les nerfs délicats et la peau sensible d'une femme.

» L'inflexion d'un mot, l'esquisse d'un geste, suffisent à le mettre au comble du bonheur ou du désespoir : à la mort de sa mère, on fut obligé de l'emmener, parce que « sa douleur faisait trop de bruit ».

Son âme sensible rêve sans cesse des « plus nobles passions » : il voudrait avoir un ami, mais un ami, écrit-il, « qui fût tout pour moi, comme moi tout pour lui », et professe que « le sublime de l'amitié est moins à mourir pour son ami dans une occasion éclatante qu'à se sacrifier journellement et obscurément pour lui ».

Deux passions surtout, l'amour et la gloire, se partagent son coeur.

Toute sa vie, Stendhal a bâti « des châteaux en Espagne de bonheur par l'amour » : il ose croire qu'étant aux pieds de la femme aimée, il pourra lui montrer son amour « d'une manière digne d'elle et de lui, en traits d'une beauté immortelle ».

Mais il lui arrive aussi de penser qu'aucune volupté n'est égale à celles de l'action et de la domination.

Cette sensibilité s'épanche aussi dans les arts : Stendhal aime « passionnément la musique de Cimarosa et de Mozart »; il vibre devant de belles toiles ou de belles statues; il se sent poète pour avoir éprouvé un nombre infini d'émotions douces ou intenses; il est habité par le démon du théâtre, fréquente assidûment la Scala de Milan ou la ComédieFrançaise, se figure que tous les sujets seraient bons, traités de ses mains, ébauche les canevas d'une quantité de pièces et prend même des leçons de diction avec le comédien Dugazon, qui apprécie chez lui « la chaleur de l'âme ». L'analyste.

Stendhal, cependant, ne se laisse pas toujours aller à la passion.

Il s'est aperçu « qu'un coeur trop passionné ne sent pas bien des choses : le comique, le naïf, les fines sensations du style »; et il en vient à affirmer : « Trop de sensibilité empêche de juger.

» « Or presque tous les malheurs de la vie viennent des idées fausses que nous avons sur ce qui nous arrive ».

Il convient donc de connaître à fond les choses et d'apprécier sainement les événements.

Cabanis, Destutt de Tracy, l'ont aidé à « dérousseauiser son jugement ».

Dès lors, il a vu « l'homme dans l'homme et non plus dans les livres »; il a éprouvé le besoin de tenir un fidèle registre de lui-même en « s'expliquant, se commentant, s'analysant, s'épiloguant »; il a cherché à être « davantage perception et moins sensation ». A force de s'analyser et d'observer ses semblables, il a comprimé la bonté et la franchise de son coeur : sous prétexte que l'injustice sociale et la bêtise humaine rendent l'hypocrisie nécessaire, il s'est habitué à calculer ses attitudes, à jouer « la grande froideur » ou au contraire à « faire l'amoureux »; d'une manière générale, à cacher ses sentiments « sous (son) manteau de housard ». LE TÉMOIGNAGE HISTORIQUE Stendhal a peint dans ses romans la société et les moeurs politiques de son temps.

Le Rouge et le Noir est une « chronique » de la vie française sous la Restauration; Lucien Leuwen se déroule en grande partie dans les milieux gouvernementaux sous la monarchie de Juillet; La Chartreuse de Parme a pour cadre l'Italie. La France sous la Restauration.

Dans Le Rouge et le Noir, Stendhal prend pour devise ces mots de Danton : « La vérité, l'âpre vérité.

» Sa peinture est en effet cruelle et passionnée.

Il déteste le régime légitimiste, qui ne lui a valu que déceptions ou avanies; il en dénonce l'hypocrisie et les tares avec une satisfaction amère.

Il montre, en province, l'humiliation du parti libéral et le triomphe insolent du parti ultra : M.

de Rênal est un personnage médiocre, qui doit son crédit à sa fortune; encore a-t-il à redouter les menées d'un odieux intrigant, M.

Valenod, qui est une créature de la toute-puissante Congrégation.

Il décrit, à Paris, le salon aristocratique de M.

de la Môle, que fréquentent tant de personnages haïssables ou nuls.

Dans cette société de privilégiés ou de parvenus, Julien Sorel dissimule ses sentiments et cherche à s'imposer par son intelligence; mais, finalement vaincu, il jette le masque, et s'adressant à ses juges, exhale sa haine pour un ordre injuste : « Messieurs, je n'ai pas l'honneur d'appartenir à votre classe; vous voyez en moi un paysan qui s'est révolté contre la bassesse de sa fortune.

» La France sous la monarchie de Juillet.

Dans Lucien Leuwen, Stendhal attaque avec la même âpreté, nuancée d'ironie, le régime décevant qui s'est installé en France après la Révolution de 1830.

Partout, l'argent triomphe.

Le pouvoir central achète les consciences et dicte des mots d'ordre aux journaux.

Les vrais dirigeants du pays sont les banquiers : « Un ministère ne peut pas défaire la Bourse et la Bourse peut défaire un ministère », observe M. Leuwen.

Les ministres sont de simples instruments entre les mains de la bourgeoisie financière; le comte de Vaize, ministre de l'Intérieur, s'humilie devant Lucien afin de se ménager les bonnes dispositions de son père : « Dans sa joie comme dans son anxiété, il a des gestes de laquais ».

Lucien fraie avec les puissants du jour; mais il les méprise profondément. L'Italie.

Dans La Chartreuse de Parme enfin, Stendhal peint la patrie de son coeur, l'Italie.

Certes, ce pays au passé glorieux n'a pas conservé tout son prestige d'autrefois; mais la conquête napoléonienne y a éveillé un désir violent de liberté et une noble contagion d'héroïsme : aussi est-il possible d'y trouver encore « des âmes ».

Stendhal évoque avec une sorte d'allégresse les épisodes de l'occupation française, qui lui rappellent les plus chers souvenirs de sa jeunesse.

Puis il décrit les intrigues d'une petite cour italienne; mais la satire est moins virulente que dans les romans précédents et prend parfois des aspects bouffons.

Quant à Fabrice, il a le caractère d'un vrai grand seigneur; tout entier à la pensée de son bonheur personnel, il s'élève au-dessus de toute haine et même de tout mépris : cette superbe indifférence, cet anarchisme aristocratique, apparaissent à Stendhal, face aux contingences. »

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