L'idéalisme de Péguy
Extrait du document
«
Péguy a lutté de toutes ses forces pour le triomphe de sa foi.
Il dédaignait le métier d'écrivain : chacune de ses
oeuvres prenait à ses yeux la valeur d'un témoignage pour une idée sociale, patriotique ou religieuse.
Il justifiait ses
violences par une inflexible volonté de préserver, en un siècle impur, la flamme de cet idéalisme.
Aux hommes d'État
comme aux hommes d'Église, il reprochait de favoriser, par calcul ou par faiblesse, « la dégradation de la mystique
en politique ».
IDÉALISME CIVIQUE
Il existe, selon Péguy, une « mystique » républicaine; mais aussi, hélas! une « politique » républicaine, qui corrompt
le pays par ses manoeuvres sordides : « La mystique, c'est quand on mourait pour la République; la politique, c'est
quand on en vit.
» (Notre Jeunesse).
Cette opposition entre mystique et politique s'est manifestée dans l'affaire
Dreyfus : le mouvement dreyfusiste est né d'un enthousiasme pour la Justice et pour le Droit, mais les politiciens en
ont pris prétexte pour sceller d'immorales coalitions; de même, certains adversaires de la révisions pouvaient croire,
à l'origine, qu'ils luttaient pour l'honneur de l'armée et pour la protection de l'ordre public, mais le pavillon de
l'antidreyfusisme a couvert bientôt les passions les plus basses et lés intérêts les plus vils.
IDÉALISME RELIGIEUX
Il existe, de même, une « mystique » chrétienne, que menacent les forces « politiques » de l'Église.
Trop de
catholiques ont fait de leur religion « la religion des riches », alors qu'elle aurait dû demeurer « la communion des
faibles ».
Péguy voudrait que l'on revînt à l'esprit de l'Église primitive : « Il suffit de se reporter au moindre texte des
Évangiles.
Il suffit de se reporter à tout ce que d'un seul tenant il vaut mieux nommer l'Évangile.
C'est cette
pauvreté, cette misère spirituelle qui a tout fait, qui a fait le mal.
»
Toute vie religieuse se résume pour lui en un élan naïf et confiant de la créature vers Dieu, élan dont il voudrait
personnellement donner l'exemple.
Quand il s'adresse au Ciel, il emploie un langage plus familier encore que celui de
Verlaine ou de Francis Jammes; il commente avec une liberté qui côtoie l'irrespect la parabole de l'enfant prodigue; il
imagine avec humour le « complot » des saints qui, « liés comme les doigts de la main », tâchent d'obtenir que la
Justice divine cède le pas à la Miséricorde; il prête à Dieu même un langage trivial : « La foi, ça ne m'étonne pas.
Ce
n'est pas étonnant J'éclate tellement dans ma création...
Ce qui m'étonne, dit Dieu, c'est l'espérance.
Et je n'en
reviens pas.
» ( Le Porche du Mystère de la deuxième vertu).
Péguy manifeste ainsi son mépris pour les vaines
pompes et pour les sermons solennels; il ne veut se souvenir que de l'enseignement du Christ, si fort dans sa
simplicité nue : « Ce n'est point du tout le raisonnement qui manque.
C'est la charité.
».
»
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