LE TEMPÉRAMENT DE ROUSSEAU
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LE TEMPÉRAMENT DE ROUSSEAU
Son principal trait de caractère est une émotivité extrême, presque maladive, sorte de tare héréditaire encore
aggravée par son éducation, ses habitudes de vie et des misères physiques dont il se sent humilié.
Il est rarement
en paix avec lui-même.
Cette inquiétude le rend timide et gauche.
Il refrène, tant qu'il peut, les mouvements de son
excessive susceptibilité.
Puis sa colère ou sa rancune éclatent brusquement, le poussant aux pires maladresses.
Il
se fait des ennemis comme à plaisir.
Il prend orgueilleusement des attitudes de refus ou de défi, dans lesquelles il
s'obstine.
Contre les déceptions de la vie en société, la solitude est son recours.
Cette émotivité lui est, à d'autres égards, précieuse.
Il ressent très vivement le moindre bonheur.
La vue d'une
simple pervenche lui rappelant de tendres souvenirs le bouleverse.
Sa passion pour Mme d'Houdetot, passion
pourtant insatisfaite et malheureuse, le plonge dans un rêve exaltant.
En face de la nature, il connaît de véritables
ivresses.
D'abord, il subit l'enchantement du spectacle.
Puis il peuple « d'êtres selon son coeur » le paysage qu'il a
sous les yeux.
Enfin, songeant au créateur de toutes ces merveilles, il est soulevé d'enthousiasme et de
reconnaissance.
Sa vie intellectuelle est déterminée par cette sensibilité immodérée.
Avec « un tempérament très ardent », il a « des
idées lentes à naître ».
Dans la conversation, il ne trouve qu'après coup ce qu'il aurait fallu dire et, quand il écrit, il
a beaucoup de peine à organiser le chaos de son esprit.
Bien qu'il revête sa pensée d'une apparence logique, ses
raisons profondes sont des raisons de sentiment.
Persuadé qu'en, lui coexistent « l'amour et l'innocence », il définit
d'après les seules révélations de sa conscience un idéal de bon heur et de vertu valable pour tous les hommes.
L'âge, les déceptions, les épreuves font de cet homme trop sensible un anxieux.
L'hostilité qu'à partir de '758 il
rencontre dans le milieu des philosophes, l'incite à croire qu'il existe contre lui un vaste complot.
Il fut, au moins
deux fois, tout près de sombrer dans la folie.
La première de ces crises se place en 1766.
Il se trouve alors en
Angleterre, entouré d'une curiosité qu'il sent malveillante.
David Hume, dont il a imprudemment accepté l'invitation,
lui inspire une véritable terreur : « Il fixait alternativement sur Mlle Levasseur et sur moi des regards qui
m'effrayèrent.
» Le cauchemar ne prend fin qu'une fois Rousseau rentré en France.
Dix ans plus tard, nouvelle crise.
Il vient d'écrire Rousseau juge de Jean-Jacques.
Il veut en déposer le manuscrit sur le maître autel de Notre-Dame,
mais il trouve la grille du choeur fermée et il s'enfuit dans « un bouleversement de tout son être ».
Il rédige alors et
recopie à plusieurs centaines d'exemplaires un ridicule et poignant Appel à tout Français aimant encore la justice et
la vérité, qu'il distribue aux passants.
Au bout de quelques mois, cette exaltation se calme.
C'est dans une sérénité
relative qu'il compose avant de mourir ses admirables Rêveries..
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