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Emile Zola, L'amour des bêtes

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Emile Zola, L'amour des bêtes Pourquoi la souffrance d'une bête me bouleverse-t-elle? Pourquoi ne puis-je supporter l'idée qu'une bête souffre, au point de me relever la nuit, l'hiver, pour m'assurer que mon chat a bien sa tasse d'eau? Pourquoi leur idée seule m'emplit-elle de miséricorde, de tolérance et de tendresse? Souvent, je me suis posé la question. Nous sommes légion, nous autres qui aimons les bêtes, mais on doit compter aussi ceux qui les exècrent et ceux qui se désintéressent. [...] On a dit que les bêtes remplaçaient les enfants chez les vieilles filles à qui la dévotion ne suffit pas.Et cela n'est pas vrai. l'amour des bêtes persiste, ne cède pas devant l'amour maternel, quand celui-ci s'est éveillé chez la femme. Cette affection est toute spéciale, elle n'est pas entamée par d'autres sentiments et elle-même ne les entames pas. Rien ne saurait prouver d'une façon plus décisive qu'elle est une manifestation totale de l'universel amour et non une modification, une perversion d'un des modes particuliers d'aimer. Ceux qui ne l'éprouvent pas en plaisantent, s'en fâchent, la déclarent absurde. Pour moi, lorsque je m'interroge, je crois bien que ma charité pour les bêtes est faite de ce qu'elles ne peuvent parler, expliquer leurs besoins, indiquer leurs maux. Une créature qui souffre et qui n'a aucun moyen de nous faire entendre comment et pourquoi elle souffre, n'est-ce pas affreux, n'est-ce pas angoissant? De là, cette continuelle veille où je suis, m'inquiétant de ce dont elle peut manquer.

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