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Stendhal, L'Abbesse de Castro, VI.

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Stendhal, L'Abbesse de Castro, VI. Hélène comprit qu'une fois dans ce palais sa prison pouvait être d'une sévérité sans bornes, et que l'on parviendrait à lui interdire absolument toutes communications avec le dehors, tandis qu'au couvent de Castro elle aurait, pour recevoir et envoyer des lettres, les mêmes facilités que toutes les religieuses. D'ailleurs, et ce fut ce qui la détermina, c'était dans le jardin de ce couvent que Jules avait répandu son sang pour elle: elle pourrait revoir ce fauteuil de bois de la tourière, où il s'était placé un moment pour regarder sa blessure au genou; c'était là qu'il avait donné à Marietta ce bouquet taché de sang, qui ne la quittait plus. Elle revint donc tristement au couvent de Castro, et l'on pourrait terminer ici son histoire: ce serait bien pour elle, et peut-être aussi pour le lecteur. Nous allons, en effet, assister à la longue dégradation d'une âme noble et généreuse. Les mesures prudentes et les mensonges de la civilisation, qui désormais vont l'obséder de toutes parts, remplaceront les mouvements sincères des passions énergiques et naturelles. Le chroniqueur romain fait ici une réflexion pleine de naïveté: parce qu'une femme se donne la peine de faire une belle fille, elle croit avoir le talent qu'il faut pour diriger sa vie, et, parce que lorsqu'elle avait six ans, elle lui disait avec raison: Mademoiselle, redressez votre collerette, lorsque cette fille a dix-huit ans et elle cinquante, lorsque cette fille a autant et plus d'esprit que sa mère, celle-ci, emportée par la manie de régner, se croit le droit de diriger sa vie et même d'employer le mensonge. Nous verrons que c'est Victoire Carafa, la mère d'Hélène, qui, par une suite de moyens adroits et fort savamment combinés, amena la mort cruelle de sa fille si chérie, après avoir fait son malheur pendant douze ans, triste résultat de la manie de régner.

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