Peut-on apprendre en s'amusant ?
Extrait du document
«
Étymologiquement, "apprendre" aurait pour origine le latin "apprehendere" qui signifie saisir ou prendre.
Il y aurait donc
dans le fait d'apprendre une certaine forme d'appropriation, de prise de possession.
Apprendre dès lors c'est saisir et faire
mienne une connaissance, un savoir.
Le verbe s'amuser lui vient de la racine celte « muser » qui signifie se promener,
flâner le museau en l'air.
L'emploi traditionnel de ce mot renvoie à une activité futile qui détourne l'esprit des choses
importantes.
L'amusement ne permettrait pas de réellement apprendre.
L'apprentissage demande des efforts et la
conscience de la difficulté.
Pourtant, le jeux ne peut-il pas être éducatif ? Ne permet- il pas de rendre agréable la
connaissance ? Ne faut-il pas essayer de faire un compromis ?
L'amusement ne permet pas à l'enfant de prendre conscience des efforts nécessaires à la connaissance
- Dans un premier sens, le verbe « s'amuser » est à prendre comme activité qui détourne l'esprit.
Ne dit-on pas de
quelqu'un qui ne pense qu'à s'amuser qu'il n'a pas conscience des réalités et des difficultés de la vie ? Le jeu n'est pas une
activité sérieuse.
Il distrait, c'est-à-dire qu'il disperse la concentration, les facultés de l'esprit.
- Pour Alain, c'est une faute grave d'essayer d'apprendre à l'enfant un savoir par le jeux.
« Je n'ai pas beaucoup confiance
dans ces jardins d'enfants et autres inventions au moyen desquelles on veut instruire en amusant »( Propos sur
l'éducation) Le plus important pour le philosophe est de faire comprendre que l'apprentissage de connaissance demande
des efforts et de la volonté.
L'intelligence et les connaissances ne sont rien s'ils ne sont pas accompagnés d'une ténacité,
d'une forte volonté.
Or, le jeu cache l'aspect éducatif, masque l'effort et la concentration nécessaires du joueur.
- De plus, faire apprendre à l'enfant par des méthodes difficiles, c'est fortifier sa confiance et l'apprendre à se gouverner
lui-même.
« «La grande affaire est de donner à l'enfant une haute idée de sa puissance, et de la soutenir par des victoires
; mais il n'est pas moins important que ces victoires soient pénibles, et remportées sans aucun secours étranger[…]
L'enfant doit être capable de vaincre l'ennui et l'abstraction ; il doit aussi savoir qu'il en est capable.
» Par la contrainte
imposée, l'enfant prend ainsi conscience de ses forces et apprend à gouverner ses impulsions, émotions pour triompher de
problèmes difficiles.
Il n'y a que de cette manière qu'il peut s'élever au rang d'homme.
Le jeu peut amener l'enfant à comprendre des règles et à aborder des sujets ennuuyeux
Pourtant vouloir rendre l'apprentissage difficile, c'est en donner une mauvaise image et peut-être dégoûter les enfants.
Certains pourraient en effet se bloquer et ne pas faire les efforts nécessaires.
L'amusement n'est pas forcément
distraction, il est l'art de rendre agréable, plaisant quelque chose.
Le jeu peut alors être une bonne méthode
d'apprentissage.
Dès lors, rendre agréable un savoir par le jeu, c'est intéressé des enfants alors qu'ils n'auraient pas faire
l'effort vers lui sans cette présentation ludique.
- Aristote nous apprenait que le plaisir était nécessaire à toute activité humaine et que c'était pas l'imitation que l'homme
acquérait ses premières connaissances.
« C'est par l'imitation qu'il acquiert ses premières
connaissances, c'est par elle que tous éprouvent du plaisir.
».
Or l'une des premières facultés mises en œuvre dans le jeu
est bien l'imitation.
Roger Caillois la voit comme constituant du jeux( Les jeux et les hommes) Les enfants nous jouent-ils
pas à imiter leurs parents, le monde des adultes ?
- De plus, dans tous jeux, des règles sont posées.
On ne peut pas faire tout ce que l'on veut mais on doit suivre des
instructions, respecter l'adversaire.
De ce fait, l'enfant apprend déjà à se plier à une contrainte, à comprendre et à suivre
des règles.
On peut dire que le jeux permet ainsi aux enfants de se sociabiliser, de prendre conscience qu'en communauté
ses désirs ne peuvent tous être satisfaits.
Piaget a ainsi montré que le jeu avait une importance considérable dans la
formation morale de l'enfant.
Une obligation de compromis
- Pourtant, nous dit Roger Caillois, il s'agit de trouver le juste milieu entre un jeu où la fantaisie règne et le jeu purement
sérieux.
Le jeu peut permettre à l'enfant d'entrer dans l'apprentissage mais il ne doit pas constituer tout l'apprentissage.
L'amusement doit simplement apprendre à l'enfant que l'apprentissage peut amener du plaisir, qu'il n'est pas que
rébarbatif.
Une fois cela compris, l'enfant pourra se mettre de lui-même à maîtriser un problème en sachant qu'il sera
récompensé par un sentiment de plaisir.
- Pour Platon, si les jeux ne doivent pas constituer tout l'enseignement, il ont au moins le mérite d'indiquer les tendances
de l'enfant.
Ainsi, par une observation discrète de son élève durant un jeux, l'enseignement peut mieux le comprendre et
ensuite mettre en place une méthode et une pédagogie qu'il lui soit mieux adapté.
« Garde-toi de donner par la force aux
enfants l'aliment des études, mais que ce soit en le mêlant à leur jeux, afin d'être encore plus capable d'apercevoir quelles
sont les inclinaisons naturelles de chacun.
»( Les lois)
- Enfin, n'est-il pas possible à chacun de considérer sa vie comme un grand jeux, non pas comme quelque chose sans
importance, mais comme une activité agréable par laquelle l'homme se construit une existence à sa mesure.
- Si les jeux ne sont pas toute la vérité et la connaissance, ils peuvent néanmoins nous mettre sur le chemin de la
connaissance et de la vie.
Il semble dans un premier temps que l'amusement nuit à la concentration, distrait l'esprit et le rend impropre à
l'apprentissage.
Il empêche à l'enfant de développer sa volonté, sa ténacité et ne lui apprend pas que pour acquérir le
statut d'homme des efforts sont nécessaires.
Cependant, le jeux et l'amusement peuvent permettre à l'enfant à respecter
des règles, à se sociabiliser et à prendre conscience que le savoir et l'apprentissage ne sont pas que des activités
ennuyeuses.
Il s'agit alors de concevoir une pédagogie mixte qui permette à l'enfant par le jeu de s'engager sur le chemin
de la connaissance.
Tout n'est pas un jeu, mais il dépend de chacun de prendre du plaisir à chaque chose comme si cela
était un jeu, une activité libre..
»
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