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Patrick Modiano : De si braves garçons Patrick Modiano

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Le narrateur situe son récit dans un présent et un passé entremêlés. « Nous étions des enfants du hasard et de nulle part. » Ces enfants, devenus adultes, ont jadis été des élèves du collège de Valvert, en Seine-et-Oise. Comédien sans envergure dans une petite troupe itinérante, il rencontre ses anciens compagnons de classe ainsi que quelques professeurs. Ce sont des personnages étranges, flous, dont la vie est mystérieuse, ne correspondant pas à une façade honorable, riche ou snob. Ils se souviennent du passé et trichent avec le présent. L'éducation du collège était plutôt calquée sur une organisation militaire; le directeur, Pedro, qui voulait « habituer les enfants du hasard et de nulle part aux bienfaits de la discipline et au réconfort d'une patrie », sous l'apparence de la force ou de l'énergie, laissait parfois percer des aspects douloureux ou soucieux.

« Résumé Le narrateur situe son récit dans un présent et un passé entremêlés. « Nous étions des enfants du hasard et de nulle part.

» Ces enfants, devenus adultes, ont jadis été des élèves du collège de Valvert, en Seine-et-Oise. Comédien sans envergure dans une petite troupe itinérante, il rencontre ses anciens compagnons de classe ainsi que quelques professeurs.

Ce sont des personnages étranges, flous, dont la vie est mystérieuse, ne correspondant pas à une façade honorable, riche ou snob. Ils se souviennent du passé et trichent avec le présent. L'éducation du collège était plutôt calquée sur une organisation militaire; le directeur, Pedro, qui voulait « habituer les enfants du hasard et de nulle part aux bienfaits de la discipline et au réconfort d'une patrie », sous l'apparence de la force ou de l'énergie, laissait parfois percer des aspects douloureux ou soucieux. Les professeurs étaient énigmatiques.

Un soir, en tournée, Edmond rencontre l'un d'eux : M.

Lafaure, qui enseignait la chimie.

Il semble très seul, minable même et parle du collège avec tendresse et nostalgie, lui annonçant que Valvert n'existe plus, qu'il a été détruit.

Cette nouvelle provoque une sensation de vide chez Edmond : «Le collège de Valvert...

Il me paraissait bien lointain dans cette brasserie déserte, au fond de cette ville maussade de province...

Un domaine abandonné que l'on visite en rêve : la grande pelouse et le blockhaus sous la lune, le labyrinthe de verdure, les courts de tennis, la forêt, les rhododendrons...

» Les anciens élèves, devenus adultes, ne correspondent pas, dans un premier temps, à l'image qu'ils donnaient d'euxmêmes à l'adolescence.

En réalité, en creusant plus avant dans ses souvenirs, le narrateur met le doigt sur de nombreuses fêlures, dans la vie de chacun, qui pourraient laisser présager une vie d'adulte perturbée. Il y avait Mac Fowles, un Américain riche et sportif qui vivait toujours séparé de sa famille.

Plus tard, marié et riche, il offre l'image d'un bonheur apparent mais, si l'on passe quelques heures près de lui, on se rend compte que l'habite une obsession qui confine à la folie : il n'a qu'une seule envie, vivre au bord de la mer, transformer tous les éléments de sa vie quotidienne en décor de plage. Philippe Yotlande avait été renvoyé du collège parce qu'il faisait du commerce avec les autres élèves.

Devenu adulte, sa réussite sociale est brillante mais il rompt ses fiançailles avec une riche héritière parce qu'il n'a pas le courage de se lier ni de vieillir.

Son mal de vivre est profond et il ne vit que dans le passé. Daniel, renvoyé aussi du collège jadis, vit une relation triangulaire avec sa femme et un médecin qui semble le maintenir sous sa dépendance. Johnny, ainsi surnommé pour sa ressemblance avec Johnny Weissmuller, vivait, au temps du collège, avec une grand-mère qui le gâtait beaucoup.

Il est maintenant vaguement mannequin pour une marque de chapeaux et fréquente le soir une femme dont il ne sait rien.

Un soir, il ne la trouve pas : elle a été emmenée par la police pour des raisons obscures. Tous ces portraits sont ceux d'élèves qui ont mal grandi, dont le passé et le présent sont perturbés; ils sont entourés de parents, conjoints ou amis troubles, insaisissables; leur réussite n'est qu'apparente et la réalité, le plus souvent sordide ou pitoyable. Le narrateur se fait cette réflexion : «Je me disais que le collège nous avait laissés bien désarmés devant la vie...

Nous étions de si braves garçons.

» Pistes de lecture Ecrire pour retenir le temps Patrick Modiano est né en 1947 à Boulogne-Billancourt, dans les Hauts-de-Seine.

Son père, d'origine juive, est administrateur de société; sa mère, une comédienne d'origine moitié hongroise, moitié belge, faisait du cinéma pour une compagnie allemande avant l'arrivée du nazisme. Après une scolarité mouvementée (il fréquenta un grand nombre d'établissements), Patrick Modiano passe son baccalauréat de philosophie et s'inscrit à la faculté de lettres de Paris.

La passion de l'écriture est la plus forte et il arrête rapidement ses études pour rédiger son premier roman : La Place de l'étoile (1968).

Le succès est immédiat malgré le manque d'actualité du propos : l'Occupation allemande et la question juive, qui seront les thèmes de quelques oeuvres suivantes : La Ronde de nuit (1969), Les Boulevards de ceinture (1972). En 1974, l'auteur participe au scénario du film de Louis Malle, Lacombe Lucien, continuant la réflexion autour de la période de sa naissance et la difficulté d'être juif.

C'est la dernière fois que ces années d'Occupation servent de contexte au récit. Dans les oeuvres postérieures — Livret de famille (1977), Rue des boutiques obscures (1978, Prix Goncourt), Une jeunesse (1981), Memory Lane (1981) et De si braves garçons (1982) —, si la question juive, l'Occupation, la collaboration sont encore sous-jacentes, l'auteur élargit ses sujets à d'autres personnages, d'autres temps, d'autres lieux.

Des constantes marquent cette oeuvre attachante : la présence obsessionnelle du passé, la nostalgie.

Il n'est dès lors pas étonnant que, pour Modiano, écrire soit une façon de retenir le temps. Echappe-t-on jamais à son passé? Cette recherche d'un temps perdu explique que l'on ait comparé Patrick Modiano à Marcel Proust*, bien que son style soit tout différent. Mais on retrouve chez Modiano l'empreinte indélébile du passé, la quête incessante de soi et des autres et le sentiment de quelque chose d'insaisissable dans l'être humain.

Modiano dira lui-même : «C'est un jeu fascinant avec le temps perdu, retrouvé, reconstruit, et rêvé en définitive en même temps qu'une plainte qui dit l'inguérissable blessure de la vie qui s'écoule.

C'est comme le souffle que l'on entend en se penchant sur le coeur de certains hommes incertains de leur être.

» Ainsi, dans Livret de famille, Modiano évoque des figures qui lui sont chères.

Dans Rue des boutiques obscures, un amnésique part à la recherche de son identité et, par le fait même, de son passé. Le temps de la jeunesse Dans Une Jeunesse, Modiano évoque les figures de deux adolescents.

Quant à Memory Lane, on peut y voir un hommage à Tendre est la nuit, de Scott Fitzgerald*.

Dans De si braves garçons, Modiano développe surtout les thèmes du double et du masque, la nostalgie de l'adolescence, la difficulté de devenir adulte surtout quand les bases ont été fragiles, incertaines.

Tous ces éléments étant générateurs d'angoisse.

Le tableau est noir et désabusé, mais il reflète plus que tout autre livre, peut être, l'éternelle question posée par Patrick Modiano : « Pourquoi certaines personnes restent-elles, jusque dans leur vieillesse, prisonnières d'une époque, d'une seule année de leur vie, et deviennent peu à peu la caricature décrépie de ce qu'elles furent à leur zénith?».

L'écriture est, certes, pour Modiano, une manière — la seule? — d'exorciser le temps qui passe.. »

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