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On a souvent reproché au roman d'entretenir les rêves et illusions du lecteur. Ce reproche vous parait-il pleinement fondé ?

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Le roman se caractérise par son contenu fictionnel : il s'agit pour lui, au premier abord, de raconter une histoire inventée, parfois dans le seul but de divertir un public. On pourra donner l'exemple des romans de chevalerie, des romans d'aventure, ou encore des romans de gare. Le lecteur peut lire naïvement ces romans et voir son rapport au réel altéré par eux : c'est le cas de Madame Bovary, qui trouve le réel trop fade par comparaison avec le monde décrit dans les romans de Walter Scott, et qui échoue à reconstituer dans sa vie ce qu'elle a lu dans les romans, si bien qu'elle échoue finalement à vivre. On pourra aussi penser à l'exemple de Julien Sorel dans Le Rouge et le Noir, exalté par ses lectures et s'attachant, en y échouant, à mettre dans le réel la même exaltation qu'il a trouvée dans ses livres. Le roman présenterait alors le danger de déformer le rapport que l'homme entretient avec le réel, et le reproche contenu dans le sujet se fonderait par cela.   II. Le roman, interprète du réel.   Cependant, le roman n'a d'autre source que le réel lui-même, il fait simplement un travail d'interprétation et d'esthétisation de ce réel - cette remarque vaut pour tout phénomène artistique, le réel étant toujours, en dernière analyse, le référent de ce phénomène, qu'on le reproduise ou que l'on s'en détache. Les courants romanesques du réalisme et du naturalisme se donnent ainsi pour but de donner à voir le réel, de mettre au jour ses mécanismes (que l'on pense par exemple à la précision chirurgicale que Zola entend donner à ses personnages et aux milieux dans lesquels ils évoluent, dans le but de dessiner un portrait fidèle de la vie sous le second empire, ce qui passe par un immense travail de documentation et d'analyse quasi-scientifique - on pourra se référer par exemple à son texte théorique, Le roman expérimental, et choisir un volume des Rougon-Macquart dans lequel ce projet apparaît nettement - Germinal, par exemple). Alors le romancier écrit toujours parce qu'il entend donner à voir le réel à travers le prisme de sa propre vision, et non pas pour détacher ses lecteurs du réel et les entraîner dans des rêves et des illusions dangereux.

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