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MARC-ANTOINE GIRARD, SIEUR DE SAINT-AMANT

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Aux antipodes du ton et de l'inspiration de Malherbe, étroitement circonscrits dans les bornes de la rationalité, Saint-Amant fait passer dans la poésie du XVIIe siècle le souffle de la nature et de l'imagination. De sa vie de marin, de soldat, de voyageur, il a retenu le sens du spectacle infiniment renouvelé du monde : « Je loge en moi tout l'univers. » D'abord huguenot, ensuite catholique, mais au fond de lui-même libertin, il ne change pas mais s'enrichit de ses multiplicités. Au grand âge de la littérature abstraite, il est le poète de la sensation, spécialement de la vision, qu'elle soit purement descriptive, comme dans les sonnets consacrés aux saisons, ou hallucinée comme dans les nombreuses fresques nocturnes qui sont pour lui un thème de prédilection. L'expression d'un rapport subjectif entre le moi et la nature tranche également sur l'inspiration de son époque. C'est, de loin, le poète le plus original de son siècle. Son originalité s'affirme avec maîtrise dans l'usage qu'il fait des formes reçues. Avant La Fontaine il exploite les ressources offertes par l'idylle héroïque dans son Moïse sauvé des eaux (1647-1653). Contre les préventions de son époque, il ose illustrer l'argument du mythe biblique par des inventions poétiques de son cru. La même audace inventive lui fait utiliser l'ode pour célébrer ses propres états d'âme. La fluidité harmonieuse de sa poésie semble aller de soi. Elle paraît couler de source, grâce à l'exceptionnelle et géniale sensibilité qu'il a pour tout ce qui est dessin et musique saisis par la parole. Saint-Amant donne, dans une strophe pourtant très élaborée, l'impression d'une poésie immédiate jaillie de la perception pure.

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