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Marc-Antoine Girard de SAINT-AMANT (1594-1661) - Le fromage

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Marc-Antoine Girard de SAINT-AMANT (1594-1661) - Le fromage Assis sur le bord d'un chantier Avec des gens de mon métier, C'est-à-dire avec une troupe Qui ne jure que par la coupe, Je m'écrie, en lâchant un rot : Béni soit l'excellent Bilot ! Il nous a donné un fromage A qui l'on doit bien rendre hommage. Ô Dieu ! quel manger précieux ! Quel goût rare et délicieux ! Qu'au prix de lui ma fantaisie Incague la sainte Ambroisie ! Ô doux Cotignac de Bacchus ! Fromage, que tu vaux d'écus ! Je veux que ta seule mémoire Me provoque à jamais à boire. A genoux, enfants débauchés, Chers confidents de mes péchés, Sus ! qu'à pleins gosiers on s'écrie Béni soit le terroir de Brie ; Béni soit son plaisant aspect, Qu'on n'en parle qu'avec respect, Que ses fertiles pâturages Soient à jamais exempts d'orages ; Que Flore avec ses beaux atours, Exerçant mille amoureux tours Sur une immortelle verdure, Malgré la barbare froidure Au visage morne et glacé, Y tienne à jamais enlacé Entre ses bras plus blancs qu'albâtre Le gai printemps qui l'idolâtre ? Que, comme autrefois, Apollon Délaisse torche et violon, Et s'en vienne dans ces prairies Dans ces grandes plaines fleuries, Garder en guise de vacher Un troupeau qui nous est si cher Et dont la mammelle féconde Fournit du lait à tout le monde. Mais je veux l'encharger aussi Qu'il s'en prenne plus de souci, Il faut qu'un jour il s'y remette, Qu'il ne fit de celui d'Admette Lors que le patron des matois, Portant cinq crocs au lieu de doigts, Qui faisaient le saut de la carpe Joua sur ses boeufs de la harpe, Et le laissa sous un ormeau Flûter son saoul d'un chalumeau Que jadis l'amoureux martyre Fit entonner au grand satyre. [...]

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