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L'ESTHÉTIQUE DE MALLARMÉ

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Bien qu'il ait voué son existence à la poésie, Mallarmé n'a produit qu'une oeuvre fort mince : environ 1500 vers. Poussé par une extrême défiance de la facilité, habitué par le travail minutieux du style à pénétrer jusqu'au fond des choses, il a très vite conçu l'activité poétique comme la tentative d'atteindre, au delà des apparences, la réalité véritable. Il s'engage dans cette aventure sans formation philosophique préalable, sans guide. Il s'applique d'abord à se détacher de lui-même. Il y réussira au point de pouvoir dire : « Je suis maintenant une aptitude qu'a l'univers spirituel à se voir et à se développer à travers ce qui fut moi ». Il imagine, au cours d'une crise intellectuelle qui se situe en 1866, l'oeuvre à écrire, « le Livre », car il n'y en a qu'un, ayant pour sujet « l'explication orphique de la terre ». Il se donne vingt ans pour composer ce livre, c'est-à-dire pour recréer poétiquement l'univers « sous le signe de la Beauté ». Ambition démesurée. A force d'abolir les objets pour mettre à leur place la réalité éternelle, il se perd dans un dédale de symboles. Il cultive de plus en plus l'obscurité. Il cherchait l'absolu et il ne rencontre que le néant. De son « Livre », il n'écrira rien, sauf peut-être Un coup de dés, qui est aussi l'aveu de son impuissance. Car sa faculté de création poétique, à laquelle il demandait trop, s'est vite épuisée. Il feint de ne pas renoncer. Mais dans la pratique, il doit se résigner : les dix dernières armées de sa vie sont presque complètement stériles.

« STÉPHANE MALLARMÉ Il y a peu d'événements dans la vie d'ÉTIENNE (dit STÉPHANE) MALLARMÉ.

Professeur d'anglais à Tournon, Besançon puis Avignon, il s'y sentait en exil.

De retour à Paris en 1871, il enseigna dans plusieurs lycées, sans jamais s'intéresser à un métier auquel il reprochait d'interrompre quotidiennement sa « noble faculté poétique ». Il n'était célèbre que parmi les écrivains d'avant-garde, quand le roman de Huysmans, A rebours, révéla son nom au grand public.

Dans son modeste appartement de la rue de Rome, il avait coutume de recevoir chaque mardi quelques amis.

Ces réunions s'amplifièrent.

De 1885 à 1894, les mardis de Mallarmé attirèrent les maîtres du symbolisme, ainsi que des écrivains plus jeunes, Claudel, André Gide, Pierre Louys, Valéry.

Au cours de ces soirées, on ne faisait guère que l'écouter.

Cet écrivain que paralysait la vue d'une feuille blanche, était un causeur éblouissant.

L'ascendant qu'il exerça sur la jeune littérature symboliste tient à sa personne plus qu'à son œuvre.

Il était retraité depuis quatre ans, lorsqu'il mourut, en 1898, dans sa maison de Valvins. PRINCIPALES ŒUVRES Apparition : poème écrit en 1863, publié en 1883.

C'est l'évocation d'une jeune fille, que le poète compare à la fée de ses rêves. Collaboration au Parnasse contemporain. Mallarmé publia dans le premier Parnasse (1866) dix poèmes, dont les plus remarquables (Les Fenêtres, L'Azur, Brise marine) se ressentent de l'influence baudelairienne.

Ils expriment le dégoût du réel et le besoin d'idéal.

Le second recueil (1871) contient des fragments d'une tragédie entreprise en 1864, Hérodiade. L'Après-midi d'un faune.

Cette « églogue » fut remaniée constamment depuis 1865 jusqu'à sa publication (1876). Un faune se réveille par un après-midi d'été.

Il se demande s'il a vu en rêve ou dans la réalité les nymphes dont l'image le hante.

Puis il se rendort. lgitur ou la Folie d'Elbehnon : conte écrit entre 1867 et 1870 et publié en 1925. Les quatre « morceaux » de ce conte ont pour titres : Le minuit, L'escalier, Le coup de dés, Le sommeil sur les cendres après la bougie soufflée.

Igitur, personnage abstrait, descend les escaliers de l'esprit humain, va au fond des choses ».

Sa folie consiste à lancer les dés, ce qui est une manière de défier le destin et d'affirmer son pouvoir.

Après avoir accompli ce geste, il disparaît dans le néant. Toast funèbre (1872).

Ce poème est un hommage à Théophile Gautier, mort récemment. Le Tombeau d'Edgar Poe (1877) : sonnet. Prose pour Des Esseintes (1885).

Les vers fort obscurs de cette « prose dédiée au héros du roman de Huysmans, A rebours, laissent entrevoir l'art poétique de Mallarmé. Le vierge, le vivace...

(1885) : sonnet. Image d'un cygne pris par les glaces.

Cette image symbolise l'inspiration poétique entravée et ne parvenant pas à se dégager. Un coup de dés lainais n'abolira le hasard (1897).

Ce poème, dont la disposition typographique accroît encore l'incohérence, paraît construit autour de l'idée obsédante du naufrage.

On serait tenté de l'interpréter comme l'aveu d'un échec.

A moins que ce ne soit un fragment achevé du grand poème cosmique auquel Mallarmé songeait depuis 1866. L'AVENTURE POÉTIQUE DE MALLARMÉ Bien qu'il ait voué son existence à la poésie, Mallarmé n'a produit qu'une oeuvre fort mince : environ 1500 vers.

Poussé par une extrême défiance de la facilité, habitué par le travail minutieux du style à pénétrer jusqu'au fond des choses, il a très vite conçu l'activité poétique comme la tentative d'atteindre, au delà des apparences, la réalité véritable.

Il s'engage dans cette aventure sans formation philosophique préalable, sans guide.

Il s'applique d'abord à se détacher de lui-même.

Il y réussira au point de pouvoir dire : « Je suis maintenant une aptitude qu'a l'univers spirituel à se voir et à se développer à travers ce qui fut moi ». Il imagine, au cours d'une crise intellectuelle qui se situe en 1866, l'oeuvre à écrire, « le Livre », car il n'y en a qu'un, ayant pour sujet « l'explication orphique de la terre ».

Il se donne vingt ans pour composer ce livre, c'est-à-dire pour recréer poétiquement l'univers « sous le signe de la Beauté ».

Ambition démesurée.

A force d'abolir les objets pour mettre à leur place la réalité éternelle, il se perd dans un dédale de symboles.

Il cultive de plus en plus l'obscurité.

Il cherchait l'absolu et il ne rencontre que le néant.

De son « Livre », il n'écrira rien, sauf peut-être Un coup de dés, qui est aussi l'aveu de son impuissance.

Car sa faculté de création poétique, à laquelle il demandait trop, s'est vite épuisée.

Il feint de ne pas renoncer.

Mais dans la pratique, il doit se résigner : les dix dernières armées de sa vie sont presque complètement stériles. L'ESTHÉTIQUE DE MALLARMÉ Ses premiers vers sont de facture parnassienne.

S'il cultive déjà l'expression rare, il garde le souci de la clarté.

Même à une époque avancée de sa carrière, il saura retrouver le chemin d'un art intelligible, par exemple dans tel exquis madrigal composé vers 1885 pour son amie Méry Laurent : « 0 si chère de loin et si proche et blanche...

». Mais il professe habituellement que la poésie doit présenter un sens voilé, pour se protéger des curiosités indiscrètes.

Il s'oblige donc à créer un langage enchevêtré, plein d'ellipses, d'inversions, de parenthèses, où les mots sont souvent détournés de leur sens, où les effets musicaux sont systématiquement utilisés.

Ce langage est d'ailleurs moins mystérieux qu'on ne serait tenté de le croire.

Les travaux de linguistique poursuivis par Mallarmé pendant de longues années l'ont entraîné à jouer avec les étymologies, à établir des rapprochements entre les différentes langues.

Ses secrets sont parfois de vulgaires recettes, comme celle qui consiste à donner au terme français le sens du terme anglais ou latin correspondant. En fixant pour but à la poésie d'évoquer les choses sans les montrer, par la seule indication de l'effet qu'elles produisent, il a enseigné le mépris de l'art trop facile, et il a réhabilité l'obscurité, qui peut effectivement être féconde, à condition de ne pas aboutir à des énigmes insolubles.. »

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