Devoir de Français

Les romans doivent-ils nous ramener à la réalité (de la vie), ou au contraire nous en détourner ?

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La « fonction de réalité » du roman n'est pas nécessairement une fonction descriptive.   III   _ Ainsi, la nature des réalités décrites par l'auteur ne peut être une fonction sûre du genre romanesque, qui se caractérise avant tout par l'absolue liberté des objets dont il traite. Les différentes périodes de l'oeuvre de Louis Ferdinand Céline traitent ainsi de données très différentes : l'enfance à Courbevoie dans Mort à Crédit, les voyages initiatiques dans Voyage au bout de la nuit, la fuite hors de France et le séjour à Sigmaringen dans D'un Château l'autre... Pourtant, tout lecteur reconnaît à coup sûr la personnalité de l'auteur dans n'importe quelle phrase de ces trois textes. Le caractère problématique du statut de « réalité » romanesque, au fond, est solidaire de la difficulté pour une conscience individuelle à connaître une réalité objective. La fonction romanesque essentielle, au fond, n'est pas la réalité perçue, mais le regard lui-même, puisque c'est de la perception que découle la notion de réalité. _ De la sorte, poser la question du rapport entre roman et réalité revient, en dernière instance, à s'interroger sur les procédés de transmission d'image, de l'auteur à l'énonciateur (narrateur ou personnage), puis de l'énonciateur au destinataire (le lecteur). Le roman s'attache donc à transformer le regard en écriture, et se définit essentiellement par la fonction du style. La Recherche du temps perdu de Proust s'avère particulièrement révélatrice de cette vérité, puisque le plus simple objet (madeleine, clocher, nymphéa...), par la structure de la phrase proustienne, ouvre sur le monde intime de l'auteur, sur le mode du souvenir (les après-midi chez la tante Léonie), sur un monde esthétique (l'impressionnisme de Monet), sur un monde moral (les transgressions de Sodome et Gomorrhe), sans que jamais ces dimension de la réalité ne soient dissociées.

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