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Le Classicisme

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La direction particulière accordée par la France, et surtout par la France du XXe siècle, à sa littérature classique, l'originalité déroutante de ce classicisme, presque aussi différent de l'antiquité gréco-latine que des classicismes fort approximatifs d'autres littératures modernes, sont pour beaucoup d'observateurs étrangers une source de constant étonnement. Le classicisme français du XVIIe siècle constitue en effet un phénomène fort singulier. A un moment où les splendeurs littéraires de l'Italie et de l'Espagne connaissaient, après la Renaissance et le Siglo de Oro, un rapide déclin ; où l'Allemagne, dévastée par la guerre de Trente ans, ne comptait guère en Europe ; où l'Angleterre, en proie aux guerres civiles, traversait la période la plus troublée de son histoire et produisait une littérature de pensée politique, de satire, de comédie fort libre et de lyrisme individualiste, la France de Richelieu et de Louis XIV tentait, seule, d'endiguer le flot désordonné de la Renaissance qui avait emporté l'ordre unitaire du moyen âge. Elle était lasse de ses dissensions religieuses, de ses nobles jaloux du pouvoir royal, de sa Fronde. Elle voulut substituer quelque clarté à la confusion de l'âge précédent, dompter ce que l'on a depuis lors appelé son romantisme latent, ramener les entres et les choses à leurs éléments intelligibles. C'est vers 1660 que l'on s'accorde à voir le vrai triomphe des valeurs dites classiques. Vers 1685 plusieurs signes indiquent que cet équilibre éphémère que fut le classicisme était déjà ébranlé. Les guerres malheureuses au-dehors, la funeste Révocation de l'Edit de Nantes, les hardiesses croissantes des libertins et des dissidents ont mis fin à l'harmonieuse synthèse classique.

« Le Classicisme La direction particulière accordée par la France, et surtout par la France du XXe siècle, à sa littérature classique, l'originalité déroutante de ce classicisme, presque aussi différent de l'antiquité gréco-latine que des classicismes fort approximatifs d'autres littératures modernes, sont pour beaucoup d'observateurs étrangers une source de constant étonnement.

Le classicisme français du XVIIe siècle constitue en effet un phénomène fort singulier. A un moment où les splendeurs littéraires de l'Italie et de l'Espagne connaissaient, après la Renaissance et le Siglo de Oro, un rapide déclin ; où l'Allemagne, dévastée par la guerre de Trente ans, ne comptait guère en Europe ; où l'Angleterre, en proie aux guerres civiles, traversait la période la plus troublée de son histoire et produisait une littérature de pensée politique, de satire, de comédie fort libre et de lyrisme individualiste, la France de Richelieu et de Louis XIV tentait, seule, d'endiguer le flot désordonné de la Renaissance qui avait emporté l'ordre unitaire du moyen âge.

Elle était lasse de ses dissensions religieuses, de ses nobles jaloux du pouvoir royal, de sa Fronde.

Elle voulut substituer quelque clarté à la confusion de l'âge précédent, dompter ce que l'on a depuis lors appelé son romantisme latent, ramener les entres et les choses à leurs éléments intelligibles.

C'est vers 1660 que l'on s'accorde à voir le vrai triomphe des valeurs dites classiques.

Vers 1685 plusieurs signes indiquent que cet équilibre éphémère que fut le classicisme était déjà ébranlé.

Les guerres malheureuses au-dehors, la funeste Révocation de l'Edit de Nantes, les hardiesses croissantes des libertins et des dissidents ont mis fin à l'harmonieuse synthèse classique. Le moment classique fut donc bref : un quart de siècle environ.

Encore est-il traversé de courants secondaires contraires.

Mais dès le début du XVIIe siècle Malherbe, Descartes, Corneille, Chapelain et d'autres théoriciens, les précieux eux-mêmes par leur esprit social et mondain, leur ingéniosité à sonder les replis du coeur féminin, avaient préparé le classicisme.

Descartes, J.-L.

Guez de Balzac, Chapelain, Vaugelas, Voiture, Poussin, François Mansart et Claude Lorrain naquirent un peu avant 1600 d'Aubignac, Corneille, Méré, Rotrou, Scarron, puis, coup sur coup, La Rochefoucauld, Retz, Saint-Evremond, Le Nôtre apparurent aux alentours de 1610.

Une riche génération, née vers 1620 environ, va donner Le Brun, Cyrano, Furetière, La Fontaine, Molière, Pierre Puget, Pascal, un peu plus tard Mme de Sévigné, Bossuet, Nicole.

Plus tard encore, entre 1630 et 1639 naîtront les classiques les plus authentiques, sinon les plus innovateurs, et les seuls que l'on peut considérer comme devant à Louis XIV une partie de leur succès : Boileau et Racine surtout, et Bourdaloue, Fléchier, Pradon, Lulli, Mme de La Fayette, Quinault, Malebranche.

Après 1640 leurs cadets apparaîtront, qui cesseront d'être en sympathie avec le contenu de pensée et de sentiment, et même avec l'idéal d'art, du classicisme : La Bruyère, Fénelon, Regnard, Fontenelle, Lesage. Saint-Simon, né en 1675 sera de moins de quinze ans l'aîné de Marivaux et de Montesquieu.

Il écrira, en trente volumes, l'épitaphe du règne de Louis XIV. L'époque classique voulut asseoir un équilibre qui, comme tout équilibre, devait vite entre ébranlé par une crise de la conscience française et européenne.

Sa littérature est, en outre, celle d'un groupe social restreint, composé en partie de connaisseurs croyant avoir réalisé entre leurs goûts une unité relative.

Les écrivains professent tous comme règle première de plaire à leur public.

Nul d'entre eux ne manqua de hardiesse : Don Juan, Tartuffe, Bajazet, Retz, Pascal en témoignent.

Mais ils prirent pour accordées un certain nombre de vérités qui étaient celles de leur milieu.

Quelque étroitesse put en résulter et, comme le remarqua La Bruyère, les grands sujets, surtout en politique et en religion, étaient défendus à un homme né chrétien et français.

Mais, dans un domaine qui accepta ainsi d'entre limité, ils allèrent en profondeur plus avant que n'avaient fait leurs prédécesseurs, que ne feront leurs successeurs. Le terme " classique " ne projette pas plus de lumière sur la signification du classicisme que ne le feront plus tard les étiquettes de " romantique ", de " symboliste " ou de " surréaliste ".

Il n'a été adopté en France qu'au XIXe siècle pour désigner les grands auteurs de l'époque de Louis XIV.

Il veut dire évidemment : propre à être lu dans les classes, à l'instar des auteurs grecs et latins ; c'est-à-dire digne d'être proposé en modèle.

Le mot semble impliquer aussi que ces écrivains classiques doivent beaucoup à l'imitation de l'antiquité et, comme on l'a parfois prétendu, traduisirent dans le langage affiné de quelques-uns les idées de tout le monde.

L'étiquette a provoqué bien des contre-sens.

Mais elle existe, et, malgré son manque de rigueur, elle continuera à être employée. Depuis 1920 environ, un effort a été entrepris, surtout par des critiques allemands et suisses, quelquefois espagnols et italiens, pour appeler, non plus classique, mais baroque, la littérature française de la plus grande partie du siècle de Louis XIV.

Le terme a d'abord choqué les Français, à cause des connotations irrespectueuses qui semblaient s'attacher au terme baroque, et, parce que le baroque, ailleurs, fut l'anticlassique.

Il y a sans doute de la rhétorique dans les oeuvres classiques : mais le profit semble mince à vouloir substituer au terme classique celui de baroque qui, lors de la Contre-Réforme et dans des pays voisins de la France, désigne des qualités assez différentes de celles que nous admirons chez La Fontaine ou Racine.

Il y a du baroque épuré et du " romantisme dompté " dans le classicisme.

Mais il y a plus encore des traits qui sont spécifiquement classiques et qui opposent Poussin aux Carraches et à Rubens, la colonnade du Louvre et le Val de Grâce aux monuments de l'Europe Centrale ou de l'architecture dite " jésuite ", Pascal, Bossuet, Molière à leurs prédécesseurs d'Espagne ou d'Angleterre. Le rationalisme a longtemps passé pour l'un de ces traits.

En vérité, si l'on a souvent parlé de la raison au XVIIe siècle, on l'a rarement définie.

La raison cartésienne, dominatrice et directrice de l'âme humaine, est bafouée par Pascal ; elle ne triomphe nullement chez Racine ou chez Corneille ; elle ne réglait point la vie des contemporains de Cyrano, de Retz ou de Saint-Simon.

Il serait plus juste de dire que le classicisme aime à comprendre et à analyser. L'intellectualité, et non le rationalisme, caractérise la plupart des auteurs classiques.

L'effort pour " voir clair en soi ". »

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