En quoi l'apologue est-il une arme dans le combat des Lumières?

« Analyse du sujet et problématisation L'apologue est un discours narratif, souvent allégorique, en vers ou en prose ayant une fonction démonstrative et une visée argumentative et renfermant des enseignements dont le lecteur tire une morale pratique.

Il englobe différentes formes de textes, comme la fable, le conte, l'utopie, la parabole, le mythe ou encore l'exemplum. Considérer l'apologue comme une arme c'est en faire un outil polémique, un outil de combat argumentatif.

C'est pourquoi il a été utilisé dans le combat des Lumières, c'est-à-dire dans le combat qu'ont mené les philosophes et écrivains du XVIIIe siècle, combat qui a débouché sur la Révolution Française. Le combat des Lumières est un combat pour la liberté dans plusieurs domaines : il s'agit d'un combat politique contre l'absolutisme (et pour la séparation des pouvoirs), d'un combat social contre les inégalités, d'un combat contre l'emprise du pouvoir religieux sur les âmes (et pour la tolérance) et d'un combat sur les mentalités et les idées reçues (notamment à travers l'apparition de la notion de droit et de l'égalité de tous les hommes). Problématique : En quoi l'apologue est-il un outil polémique efficace dans la diffusion et la défense des idées nouvelles promues par le siècle des Lumières ? I) L'apologue permet de contourner la censure… Pour diffuser leurs idées, les penseurs du siècle des Lumières sont obligés de passer par des moyens détournés, du fait de la virulence de la censure au XVIIIe siècle : l'apologue se présente comme l'un de ces moyens. - L'apologue se présente comme un récit simple, merveilleux voire enfantin, ne suscitant a priori aucun danger moral ou politique.

EX : les contes philosophiques de Voltaire usent abondamment des ressorts du merveilleux (cf.

Candide) et du conte, enchainant les péripéties et se présentent à première vue comme de simples histoires divertissantes. L'apologue est de plus, traditionnellement, associé à une forme de littérature enfantine ou à un divertissement mondain ( cf.

Les Fables de La Fontaine) : les écrivains des lumières se sont appuyés sur cette tradition pour déjouer la censure. - L'apologue prétend enseigner ce qui est vrai en procurant un savoir sur le monde et sur l'homme.

Par ses prétentions didactiques il peut aussi contourner la censure.

L'apologue est fiction, invention, mensonge, mais un mensonge qui dit la vérité.

Il joue sur l'analogie, sur l'exemple fabuleux, pour dire la vérité des choses et le sens des conduites humaines.

Il se fonde sur des récits mensongers et séduisants pour réformer l'individu et le guider vers le bien, vers la vérité qu'il faudrait atteindre.

L'homme, comme l'enfant, étant incapable de se laisser charmer par la vérité pure, par l'expression directe de cette vérité, il faudrait ainsi passer par des récits, par le fabuleux, par l'imagination, par le faux, pour en arriver à la vérité. EX : Diderot, Pensées sur l'interprétation de la Nature : l'auteur utilise un apologue pour montrer que la persévérance dans leur effort intellectuel conduit les savants à de « bons effets ». La physique expérimentale peut être comparée dans ses bons effets au conseil de ce père qui dit à ses enfants, en mourant, qu'il y avait un trésor caché dans son champ, mais qu'il ne savait point en quel endroit.

Ses enfants se mirent à bêcher le champ; ils ne trouvèrent pas le trésor qu'ils cherchaient; mais ils firent dans la saison une récolte abondante à laquelle ils ne s'attendaient pas.

( Diderot) II) … pour exprimer les idées subversives qui fondent le combat des Lumières L'apologue révèle, de façon détournée et cachée, toutes les idées fondant le combat des lumières.

Sous son aspect divertissant et anodin, il renferme souvent une critique profonde. - L'apologue sert le combat politique des Lumières : il émet de façon métaphorique une critique de l'absolutisme et sert à avancer des propositions pour un nouveau régime politique : Ex : L'apologue des Troglodytes dans Les Lettres Persanes de Montesquieu.

Montesquieu insère adroitement un apologue mêlant récit et discours dans son roman épistolaire.

Il répartit sur des lettres différentes les épisodes les plus marquants d'une sorte de récit mythique lui permettant d'illustrer par des exemples miimaginaires mi-historiques les difficultés du choix et la préservation d'un régime politique conforme à l'intérêt général.

Il veut également amener le lecteur à conclure avec lui qu'il n'y a pas de bonheur égoïste et qu'une organisation sociale équilibrée suppose que chacun renonce quelque peu à son intérêt particulier au profit de l'intérêt général.

Il est visible dans la pensée politique de Montesquieu, que l'on retrouve dans De l'esprit des lois, qu'il opte pour la monarchie parlementaire.

Montesquieu veut avant tout une séparation des pouvoirs. - L'apologue émet souvent une violente critique sociale et prône au XVIIIe siècle une avancée vers l'égalité et la tolérance.. »