D'après les pages de Rabelais que vous connaissez, essayez de dégager les différentes formes du comique rabelaisien.
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D'après les pages de Rabelais que vous connaissez, essayez de dégager les différentes formes du comique rabelaisien.
Introduction : Dans le Prologue du Gargantua, Rabelais incite son lecteur à « rompre l'os et sucer la substantifique moelle ».
Cette
allusion au sens caché, ou tout au moins sérieux, de sa vaste épopée ne peut faire oublier la devise de « Maistre Alcofribas Nasier » :
Mieux est de ris que de larmes écrire
Pour ce que rire est le propre de l'homme.
En effet, bien que toutes les formes de comique soient l'expression d'une certaine sagesse et d'une lucidité aiguë, Rabelais, comme
Molière, se consacrera avant tout au divertissement des « honnêtes gens ».
Par quels procédés cet humaniste bon vivant a-t-il mené à
bien cette délicate entreprise ?
I Le comique bouffon.
L'imagination de Rabelais, comparable à celle d'un Balzac, est à la mesure de son éclat de rire.
1.
Le comique gigantal.
Rabelais examine ses héros à travers une lunette grossissante : cette forme de comique, qui sera reprise par
Swift et Voltaire, ne manque pas de provoquer le rire et fait éclater, en pleine lumière, les failles de cette humanité stylisée et
agrandie.
Ainsi, chaque personnage est érigé en symbole :
Gargantua et son fils Pantagruel incarnent, par leur soif de savoir et leur amour de la vie, l'esprit même de la Renaissance ;
Picrochole est la caricature du conquérant ;
Panurge représente la ruse, Bridoye la vénalité des juges et Grandgousier la sagesse politique.
2.
La farce.
Rabelais sait apprécier à sa juste valeur le comique essentiellement populaire ; c'est pourquoi il s'inspire parfois du fabliau
et de la farce qui avaient égayé l'âme du Moyen Age.
Aussi, les parodies, les caricatures grotesques, les mystifications abondent-elles dans l'oeuvre de Rabelais.
En fait, cet écrivain ne
rejette rien de ce qui provient du bon sens populaire, même pas (ou plus exactement surtout pas) la saine grossièreté.
D'où ces.
gauloiseries et ces plaisanteries élémentaires qui lui furent souvent reprochées.
II.
Le comique spirituel.
L'oeuvre entière de Rabelais est placée sous le signe du rire, mais ce « rire énorme » dénoncé par Hugo se transforme aisément en un
fin sourire.
1.
La satire.
Rabelais est souvent satirique ; toutefois, il n'est jamais amer quand il s'attaque :
* à l'obscurantisme marqué de la « Sorbonne » ; « Papefigues » et des « Papimanes » ; inutilité des théologiens, etc.);
* à l'obscurantisme marqué de la « Sorbonne » ;
* aux méthodes pédagogiques du Moyen Age qui rendaient l'élève « fou, niais, tout rêveux et rassoté » ;
* aux carences-de la justice {Tiers Livre) (fils d'avocat, Rabelais connaissait bien les problèmes de procédure) ;
* à l'institution du mariage (Aventures de Panurge dans le Tiers Livre).
2.
L'humour.
Humaniste convaincu, Rabelais présente en faveur des idées nouvelles des arguments originaux, mais toujours avec
humour :
* raisonnements par analogie ;
* paradoxes ;
* ingéniosités fantaisistes mêlées à une érudition géographique,
* historique, médicale ou botanique (le « Pantagruélion » ou la reine des plantes !).
III.
Comique du langage.
Cette vaste épopée, tour à tour bouffonne et humoristique, est continuellement rehaussée par un style riche et coloré.
« On ne lit pas
Rabelais : on l'écoute », dit un critique contemporain.
En effet, le style de Rabelais adopte les cadences et la liberté de la langue
parlée.
1.
Liberté de la forme.
Rabelais pastiche tous les styles, depuis celui de la langue recherchée et souvent déclamatoire des orateurs
jusqu'aux tournures volontairement obscures de certains ecclésiastiques, « jésuites » avant la lettre.
(Cf.
la harangue du pieux
Hyppodathée).
De plus, Rabelais procède souvent par additions de termes et juxtapositions successives.
De là, ces parenthèses nombreuses, ces
digressions perpétuelles, ce flot de synonymes, ces images et métaphores qui confèrent au récit un dynamisme particulier.
2.
Liberté du vocabulaire.
Là encore, Rabelais utilise toutes les ressources de la langue : aucun terme n'est exclu de sa « fantaisie
baroque ».
Aussi, à côté d'un vocabulaire abstrait apparaissent des termes réalistes qui peuvent aller jusqu'à la franche grossièreté.
Enfin, quand le français ne lui suffit plus pour exprimer
minutieusement sa pensée, il n'hésite pas à recourir (comme le feront, plus tard dans le siècle, la Pléiade et Montaigne) aux dialectes,
voire même à l'italien...
Aussi sera-t-il amené à joindre un court lexique au Quart Livre.
Conclusion : Ainsi, en dépit de ses aspects sérieux, l'oeuvre de Rabelais est essentiellement comique.
Ce maître du rire sut exploiter
toutes les ressources de l'imagination et de la langue et plaire aux esprits les plus divers.
Le public populaire comme le public lettré
trouve de quoi se réjouir dans cette oeuvre de « haute graisse » et d'argumentations ingénieuses et fines.
En définitive, c'est parce que
cet humaniste sérieux ne s'est pas pris au sérieux qu'il a réussi à faire naître chez les hommes de toutes conditions et à toutes les
époques à la fois la réflexion amusée et le rire libérateur..
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