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Alexandre Dumas, Le grand dictionnaire de cuisine. « La casserole »

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Alexandre Dumas, Le grand dictionnaire de cuisine. « La casserole » Que serait l'art culinaire sans la casserole, qui en est d'abord le principal ornement ? Ce qu'il était du temps des patriarches, où la broche suffisait pour faire rôtir les viandes, et la marmite pour les faire bouillir ; mais la casserole est sans contredit l'arme favorite, le talisman, la bonne fortune d'un cuisinier. Les splendides repas des Verrès, des Lucullus, des Néron, des Vitellius, des Domitien, des Apicius, ne se faisaient certes pas sans casserole, car on ne peut penser que ces grands gourmands ne vivaient que de viandes rôties ou grillées et de légumes bouillis. En France la casserole est plus en honneur que partout ailleurs ; on sait que les Espagnols ne vivent que de chocolat, de garbanços et de lard rance ; les Italiens de macaroni ; les Anglais de roast beef et de pudding ; les Hollandais de viande cuite au four, de pommes de terre et de fromage ; les Allemands de choucroute et de lard fumé ; aussi la casserole a-t-elle fait chez nous la réputation de plusieurs de ceux qui l'ont mise en oeuvre avec le plus de talent : les Mignot, les Robert, les Miot, les Beauvilliers, les Véry, les Carême, etc. ; et de ceux qui l'ont célébrée, tels que les Grimod de la Reynière, les Berchoux les Brillat-Savarin dont les oeuvres resteront à la postérité. Il est inutile de recommander à tout cuisinier de tenir toujours bien proprement ses casserole ; la moindre détérioration suffirait pour gâter ou affecter d'un mauvais goût les aliments qui doivent y cuire. Les casseroles de cuivre sont les plus généralement employées dans les cuisines à cause de leur solidité ; mais si vous ne les entretenez continuellement ou si vous y laissez refroidir des viandes ou de la graisse, vous vous exposez au danger d'être empoisonné. On donne aussi le nom de casseroles à plusieurs préparations culinaires dont nous allons indiquer les principales. Casserole au riz à la bourgeoise. Braisez un morceau de viande cuit, égoutté, dressez-le, couvrez-le de riz croquant avec bouillon arrosé de lard, formez une masse demi-ronde et mettez au four afin que la croûte soit bien formée, et servez à sec. Casserole au riz à la reine. Hachez les blancs de deux poulardes avec champignons, cuisez, pilez, délayez ; vous passez cette purée avec de la béchamel travaillée de consommé de volaille à l'essence de champignons, à l'étamine blanche, et la mettez au bain-marie afin qu'elle devienne presque bouillante sans ébullition ; versez-la ensuite dans votre casserole au riz ; placez dessus en couronne, et pour servir de couvercle, six oeufs frais pochés à l'eau bouillante avec sel et un demi-litre de vinaigre, placez en travers sur chaque oeuf un filet mignon de poulets à la Conti. Masquez le milieu des oeufs avec un peu de béchamel, glacez légèrement et servez. Casserole de riz garnie d'un ananas formé de pommes. Nous empruntons à l'excellent livre de M. de Courchamps la préparation de cet aliment. Vous faites cuire 360 grammes de riz de la Caroline avec de l'eau du beurre et du sel ; le riz étant prêt, vous le séparez en deux parties : de l'une vous formez un dôme plat du dessus et cannelé autour, puis de l'autre partie vous formez un second dôme, le bord évasé, afin de former la coupe. Vous faites cuire ces deux petites casseroles au riz à four chaud et leur donnez une belle couleur blonde ; vous les videz parfaitement, mais par-dessous, alors vous remplissez le dôme cannelé avec du riz (180 grammes préparés selon la règle), et vous mettez au milieu des pommes coupées en quartiers ; vous retournez le moule sens dessus dessous sur son plat d'entremets, vous placez alors par-dessus, la coupe ; avec la pointe d'un couteau vous ôtez le fond des deux casseroles au riz qui se trouvent l'une sur l'autre et vous garnissez ensuite le fond et les parois de la coupe de manière qu'elle figure un vase où vous placez le reste du riz en forme d'ananas en groupant à l'entour de ce riz des quartiers de pommes cuites dans du sucre au caramel afin de les colorer en jaune. Quand vous les aurez coupées en forme de têtes de clous, de manière qu'ils imitent un corps d'ananas sur lequel vous placerez une couronne de longues tiges d'angélique, garnissez le pourtour avec des feuilles de biscuits aux pistaches. Au moment du service, vous masquez légèrement la surface de la croûte de la casserole au riz avec de la marmelade d'abricots bien transparente, de même couleur que l'ananas. On peut servir ce bel entremets froid ou chaud.

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