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Victor HUGO (1802-1885) (Recueil : L'année terrible) - Je n'ai pas de palais épiscopal en ville

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Victor HUGO (1802-1885) (Recueil : L'année terrible) - Je n'ai pas de palais épiscopal en ville Je n'ai pas de palais épiscopal en ville, Je n'ai pas de prébende et de liste civile, Nul temple n'offre un trône à mon humilité, Nul suisse en colonel ne brille à mon côté, Je ne me montre pas aux gros yeux des ganaches Sous un dais, à ses coins ayant quatre panaches ; La France, même au fond de l'abîme, est pour moi Le grand peuple en travail d'où sort la grande loi ; Je hais qu'on la bâillonne ou qu'on la fleurdelyse ; Je ne demande pas aux passants dans l'église Tant pour voir le bon Dieu s'il est peint par Van-Dyck ; Je n'ai ni marguillier, ni bedeau, ni syndic, Ni custode, ni clerc, ni diacre, ni vicaire ; Je ne garde aucun saint dans aucun reliquaire ; Je n'ai pas de miracle en bouteille sous clé ; Mon vêtement n'est pas de diamants bouclé ; Je ne suis pas payé quand je fais ma prière ; Je suis fort mal en cour ; aucune douairière Ne m'admire quêtant des sous dans un plat rond, La chape d'or au cou, la mitre d'or au front ; Je ne fais point baiser ma main aux bonnes femmes ; Je vénère le ciel, mais sans le vendre aux âmes ; On ne m'appelle pas monseigneur ; je me plais Dans les champs, et mes bas ne sont pas violets ; Les fautes que je fais sont des fautes sincères ; L'hypocrisie et moi sommes deux adversaires ; Je crois ce que je dis, je fais ce que je crois ; Je mets près de Socrate aux fers Jésus en croix ; Lorsqu'un homme est traqué comme une bête fauve, Fût-il mon ennemi, si je peux, je le sauve ; Je méprise Basile et dédaigne Scapin ; Je donne à l'enfant pauvre un morceau de mon pain ; J'ai lutté pour le vrai, pour le bon, pour l'honnête, Et j'ai subi vingt ans l'exil dans la tempête ; Je recommencerai demain, si Dieu le veut ; Ma conscience dit : - Marche ! - rien ne m'émeut, J'obéis, et je vais, malgré les vents contraires, Et je fais mon devoir ; et c'est pourquoi, mes frères, Au dire du journal de l'évêque de Gand, Si je n'étais un fou, je serais un brigand.

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