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Victor HUGO (1802-1885) (Recueil : La légende des siècles) - Le sacre de la femme - Ineffable lever...

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Victor HUGO (1802-1885) (Recueil : La légende des siècles) - Le sacre de la femme - Ineffable lever... (II) Ineffable lever du premier rayon d'or, Du jour éclairant tout sans rien savoir encor! O matin des matins ! amour ! joie effrénée De commencer le temps, l'heure, le mois, l'année ! Ouverture du monde ! instant prodigieux ! La nuit se dissolvait dans les énormes cieux Où rien ne tremble, où rien ne pleure, où rien ne souffre ; Autant que le chaos la lumière était gouffre ; Dieu se manifestait dans sa calme grandeur, Certitude pour l'âme et pour les yeux splendeur ; De faîte en faîte, au ciel et sur terre, et dans toutes Les épaisseurs de l'être aux innombrables voûtes, On voyait l'évidence adorable éclater. [...] Jours inouïs ! le bien, le beau, le vrai, le juste Coulaient dans le torrent, frissonnaient dans l'arbuste ; L'aquilon louait Dieu de sagesse vêtu ; L'arbre était bon ; la fleur était une vertu ; C'est trop peu d'être blanc, le lys était candide ; Rien n'avait de souillure et rien n'avait de ride ; Jours purs ! rien ne saignait sous l'ongle et sous la dent ; La bête heureuse était l'innocence rôdant ; Le mal n'avait encor rien mis de son mystère Dans le serpent, dans l'aigle altier, dans la panthère ; Le précipice ouvert dans l'animal sacré N'avait pas d'ombre, étant jusqu'au fond éclairé ; La montagne était jeune et la vague était vierge ; Le globe, hors des mers dont le flot le submerge, Sortait beau, magnifique, aimant, fier, triomphant, Et rien n'était petit quoique tout fût enfant ; La terre avait, parmi ses hymnes d'innocence, Un étourdissement de sève et de croissance ; L'instinct fécond faisait rêver l'instinct vivant ; Et, répandu partout, sur les eaux, dans le vent, L'amour épars flottait comme un parfum s'exhale ; La nature riait, naïve et colossale ; L'espace vagissait ainsi qu'un nouveau-né. L'aube était le regard du soleil étonné.

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