Théâtre engagé ou théâtre pur ?
Extrait du document
«
« Je n'arrive pas à considérer le théâtre comme une façon d'amuser, de distraire ; je préfère le considérer comme un
moyen de libération de préjugés, d'injustices.
»
• Que veut dire Armand Gatti, auteur dramatique contemporain, lorsqu'il énonce cette opinion ? Cette conception du
théâtre vous paraît-elle acceptable ?
Introduction
Armand Gatti, qui refuse de voir dans le théâtre un pur divertissement, mais en fait un moyen de libération, affirme
par ailleurs : « C'est fait pour que le public se pose des questions.
Car lorsqu'un homme se pose des questions, il
commence à changer et il a des chances un jour de changer le monde.
»
Développement
I.
— Puissance d'illusion du théâtre.
Le théâtre doit rester ce qui a fait sa grandeur et son mystère : sa puissance d'illusion provoquée par tous les
éléments spectaculaires du théâtre : la sympathie, au sens le plus large du terme, c'est-à-dire le secret de partager
les sentiments et les sensations des personnages, de participer à tous les mouvements de leur coeur ; une sorte de
transfert de personnalité, mouvement qui, selon Hugo, pousse les uns à vivre l'action, les autres à partager les
sentiments, et les derniers à entrer dans les caractères.
Mais si le public, d'un seul bloc, soudé, galvanisé par le
sortilège de la représentation, vibre d'un même élan, alors le théâtre atteint à son but suprême et se montre digne
de sa mission.
II.
— Le divertissement.
A l'opposé de la thèse de Gatti, d'autres pensent que le théâtre doit demeurer un divertissement pur, un passetemps et que faire naître le sourire sur le visage d'un millier de personnes, faire oublier pour une soirée aux
spectateurs leurs ennuis ou leurs inquiétudes, c'est déjà beaucoup.
« Tu verras ce que c'est qu'une salle qui rit.
Ça,
c'est unique, mon chéri », dit à son fils qui va lui succéder le mime Deburau recréé par Sacha Guitry, l'amuseur par
excellence avant André Roussin qui professe la même opinion.
III.
— Pourquoi n'y aurait-il pas temps pour tout ?
Entre ces deux clans qui s'affrontent, entre le théâtre d'idées ou théâtre engagé, et le théâtre fort improprement
appelé « de boulevard » et plus méchamment « de digestion », nous pensons qu'il n'y a pas à choisir et qu'il n'y a
surtout pas lieu de jeter l'exclusive ni sur l'un ni sur l'autre.
Boileau refusait de reconnaître dans Scapin, « l'auteur du
Misanthrope » ; Stendhal s'ennuyait au Misanthrope comme dans un riche palais, et trouvait aux Fourberies le
charme d'une maison de campagne.
On peut aimer l'un et l'autre à la fois, et les choisir selon le moment et les
dispositions de son esprit.
Conclusion
Une seule conclusion, celle de Giraudoux : « Le théâtre n'est pas un théorème, mais un spectacle ; pas une leçon,
mais un philtre.
».
»
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