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Stendhal, Le Rouge et le Noir, Partie II.

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Stendhal, Le Rouge et le Noir, Partie II. Au milieu de tous ces grands mouvements, Julien était plus étonné qu'heureux. Les injures de Mathilde lui montraient combien la politique russe était sage. Peu parler, peu agir , voilà mon unique moyen de salut. Il releva Mathilde, et sans mot dire la replaça sur le divan. Peu à peu les larmes la gagnèrent. Pour se donner une contenance, elle prit dans ses mains les lettres de Mme de Fervaques; elle les décachetait lentement. Elle eut un mouvement nerveux bien marqué quand elle reconnut l'écriture de la maréchale. Elle tournait sans les lire les feuilles de ces lettres; la plupart avaient six pages. - Répondez-moi, du moins, dit enfin Mathilde du ton de voix le plus suppliant, mais sans oser regarder Julien. Vous savez bien que j'ai de l'orgueil; c'est le malheur de ma position et même de mon caractère, je l'avouerai; Mme de Fervaques m'a donc enlevé votre coeur... A-t-elle fait pour vous tous les sacrifices où ce fatal amour m'a entraînée? Un morne silence fut toute la réponse de Julien. De quel droit, pensait-il, me demande-t-elle une indiscrétion indigne d'un honnête homme? Mathilde essaya de lire les lettres; ses yeux remplis de larmes lui en ôtaient la possibilité. Depuis un mois elle était malheureuse, mais cette âme hautaine était loin de s'avouer ses sentiments. Le hasard tout seul avait amené cette explosion. Un instant la jalousie et l'amour l'avaient emporté sur l'orgueil. Elle était placée sur le divan et fort près de lui. Il voyait ses cheveux et son cou d'albâtre; un moment il oublia tout ce qu'il se devait; il passa le bras autour de sa taille, et la serra presque contre sa poitrine.

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