Ponce Denis Écouchard LEBRUN-PINDARE (1729-1807) - Ode
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                    Ponce Denis Écouchard LEBRUN-PINDARE (1729-1807)  - Ode Grâce à la muse qui m'inspire,  Il est fini ce monument  Que jamais ne pourront détruire  Le fer ni le flot écumant.  Le ciel même, armé de la foudre  Ne saurait le réduire en poudre : Les siècles l'essaieraient en vain. Il brave ces tyrans avides,  Plus hardi que les pyramides,  Et plus durable que l'airain. Qu'atteste leur masse insensée ? Rien qu'un néant ambitieux :  Mais l'ouvrage de la pensée  Est immortel comme les dieux.  Le temps a soufflé sur la cendre  Des murs qu'aux rives du Scamandre Cherchait l'ami d'Éphestion ;  Mais quand tout meurt, peuples, monarques,  Homère triomphe des Parques Qui triomphèrent d'Ilion. Sur les ruines de Palmyre  Saturne a promené sa faux ;  Mais l'univers encore admire  Les Pindares et les Saphos.  Frappé de cette gloire immense,  Le fameux vainqueur de Numance,  Par tant de palmes ennobli,  Voulut qu'en sa tombe honorée  D'Ennius l'image sacrée  Le protégeât contre l'oubli. Cet hymne même que j'achève  Ne périra point comme vous,  Vains palais que le faste élève,  Et que détruit le temps jaloux.  Vous tomberez, marbres, portiques,  Vous dont les sculptures antiques  Décorent nos vastes remparts ;  Et de ces tours au front superbe  La Seine un jour verra sous l'herbe  Ramper tous les débris épars. Mais tant que son onde charmée Baignera l'empire des lis,  De ma tardive renommée,  Ses fastes seront embellis,  Elle entendra ma lyre encore  D'un roi généreux qui l'honore Chanter les augustes bienfaits,  Ma lyre, qui dans sa colère A d'une Thémis adultère  Consacré les lâches forfaits. Élève du second Racine,  Ami de l'immortel Buffon, J'osai, sur la double colline,  Allier Lucrèce à Newton. Des badinages de Catulle  Aux pleurs du sensible Tibulle  On m'a vu passer tour à tour ;  Et sur les ailes de Pindare,  Sans craindre le destin d'Icare,  Voler jusqu'à l'astre du jour. Comme l'encens qui s'évapore  Et des dieux parfume l'autel,  Le feu sacré qui me dévore  Brûle ce que j'ai de mortel. Mon âme jamais ne sommeille.  Elle est cette flamme qui veille  Au sanctuaire de Vesta ;  Et mon génie est comme Alcide Qui se livre au bûcher avide,  Pour renaître au sommet d'Oeta. Non, non, je ne dois point descendre  Au noir empire de la mort :  Amis ! épargnez à ma cendre  Des pleurs indignes de mon sort. Laissez un deuil pusillanime : Croyez-en le dieu qui m'anime ; Je ne mourrai point tout entier.  Eh ! ne voyez-vous pas la gloire  Qui, jusqu'au temple de mémoire,  Me fraie un lumineux sentier ? J'échappe à ce globe de fange : Quel triomphe plus solennel !  C'est la mort même qui me venge :  Je commence un jour éternel.  Comme un cèdre aux vastes ombrages,  Mon nom, croissant avec les âges,  Règne sur la postérité.  Siècles ! vous êtes ma conquête ; Et la palme qui ceint ma tête Rayonne d'immortalité.
                
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