L'esprit précieux au 17ième siècle.
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L'esprit précieux au 17ième siècle.
Le terme de « précieux » apparaît pour la première fois en 1654.
Mais la réalité qu'il recouvre existait depuis
longtemps.
La préciosité ressuscite en effet l'esprit courtois.
Elle est, en même temps, un phénomène social
propre au XVIIe siècle, une tentative des femmes pour conquérir leur indépendance, pour lutter contre
l'habitude que l'on avait alors de les marier sans leur assentiment.
Ne pouvant transformer d'un coup des
moeurs aussi fortement enracinées, elles adoptent une tactique ingénieuse : se dérober devant le mariage et
même devant l'amour, imposer à ceux qui veulent les conquérir l'épreuve de la patience et du dévouement,
s'assurer ainsi qu'elles sont vraiment aimées, en somme sublimer l'amour.
Parallèlement, le goût de l'affectation s'introduit dans le langage.
Diverses influences étrangères contribuent à
développer ce goût : l'euphuisme, maniérisme du style mis à la mode chez les Anglais par un roman de John
Lyly, Euphues (1579); le gongorisme dont le maître est un poète cordouan, grand amateur de métaphores
savantes, Gongora; le concettisme caractérisé par l'abus des concetti ou pointes, encore appelé marinisme du
nom de son plus illustre représentant Giambattista Marino, « le cavalier Marin »,
Il existe des néologismes précieux, dont certains se sont perdus (débrutaliser, importamment, soupireur), tandis que
d'autres (bravoure, anonyme, s'encanailler, pommadé, enthousiasmer, incontestable) sont restés dans le langage.
Mais, contrairement à une opinion courante, la préciosité a créé peu de mots.
En revanche, elle a forgé avec les
mots existants bon nombre de locutions nouvelles, souvent ingénieuses et amusantes.
Au lieu de « se, marier », on
dit « donner dans l'amour permis »; au lieu de « ne pas comprendre », on dit « avoir l'intelligence épaisse ».
On
emprunte des métaphores à la guerre, à l'escrime, à l'équitation, à la chasse, au jeu, à la musique, aux modes.
Assurément ce langage manque de naturel.
Il contient de l'extravagance, du mauvais goût, pour tout dire, des
éléments baroques.
Mais dans ce qui n'était souvent qu'un jeu, il ne faudrait pas voir une intention sérieuse.
Les
métaphores risibles, les périphrases solennelles, comme celles dont se moque Molière, n'ont jamais été d'un usage
courant.
L'idéal précieux en fait de langage n'a rien de déraisonnable.
Il consiste à dire élégamment, au prix de
quelques détours, ce qu'il serait inconvenant ou vulgaire de dire sans y mettre les formes.
Les genres littéraires vers lesquels se porte la préférence des écrivains précieux, sont ceux qui exigent de
l'ingéniosité, de l'esprit : la poésie légère et galante, l'épître.
Les précieux n'ont aucun goût pour la manière
savante de Ronsard.
Avec eux, c'est l'élégant badinage de Marot qui refleurit.
VOITURE règne sur cette
littérature frivole.
Il a pour émules Malleville, Godeau, Gombauld, Colletet, qui ont avec lui collaboré à La
Guirlande de Julie.
Il se méfie de Benserade, le plus doué de ses confrères.
Pour ne pas risquer d'être supplanté
par lui, il s'emploie à le détourner de l'Hôtel de Rambouillet.
L'esprit précieux n'est pas moins à son aise parmi les fictions romanesques.
Dans ce domaine, il a produit un roman
pastoral et sentimental d'une extrême importance, l'Astrée et toute une série de romans fort prolixes, dont les plus
célèbres, pour la première moitié, du XVIIe siècle sont Polexandre de Gomberville, Cassandre et Cléopâtre de La
Calprenède, Ibrahim ou l'Illustre Bassa de Georges et Madeleine de Scudéry..
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