John Milton
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John Milton
Milton est, après Shakespeare, le plus grand poète de l'Angleterre ; il est, après Dante, le plus grand poète épique
de la culture chrétienne.
Sa vie est en elle-même très intéressante.
Né en 1608, d'une famille cultivée, de bourgeoisie relativement riche, il
fut élevé délibérément pour une carrière de grand écrivain, par un père lettré et musicien.
Aussi, un orgueil et
profond, et entièrement justifié, est-il le trait le plus profond de son caractère.
Après les études alors habituelles à
l'Université de Cambridge, il passa six ans dans une propriété de son père à acquérir la plus grande culture possible
de son temps.
Il écrivit alors ses premiers poèmes.
Il consacra ensuite près de deux ans à voyager à loisir en France
et en Italie.
Les nouvelles des querelles religieuses en Angleterre le rappelèrent en 1639 et pendant vingt ans il prit
une part active aux controverses théologiques et politiques de la révolution anglaise.
En 1641-1642, il publia une série de pamphlets très remarqués en faveur des Presbytériens.
Mais il abandonna les Presbytériens surtout pour des raisons personnelles, en relation avec son mariage.
Dans des
circonstances assez mal connues, il avait épousé en 1643 (même cette date est incertaine à un an près) une toute
jeune fille d'Oxford, de famille royaliste.
Sa femme le quitta peu après ce mariage, on ne sait trop pourquoi.
Entre
1643 et 1645, Milton écrivit une série de traités en faveur du divorce et passa des Presbytériens, qu'il accusa de
limiter arbitrairement les libertés de l'homme, aux Indépendants, dont le chef était Cromwell.
Il publia, en 1644, le
plus célèbre de ses ouvrages en prose, l'Areopagitica, éloquent plaidoyer en faveur de la liberté de pensée et
d'expression.
Sa femme lui revint en 1645 et lui donna trois filles.
Milton parut avoir, après 1645, une vie de famille
normale, malgré les racontars de ses ennemis politiques qui, au XVIIIe siècle, semblent avoir inventé des légendes
qui courent encore sur les filles de Milton.
Veuf deux fois, il eut en tout trois femmes, et les seuls documents que
nous ayons le montrent heureux dans ses deux derniers mariages.
De 1649 à 1655, Milton se fit le champion des républicains du parti de Cromwell.
Il devint célèbre dans toute l'Europe
pour sa Defensio pro Populo anglicano (1651) dans laquelle il justifiait l'exécution de Charles Ier.
Après 1655, il
semble avoir été désillusionné par la conduite de Cromwell.
Il avait été quelque temps membre de l'administration
cromwellienne à divers titres, surtout en tant que secrétaire pour les langues étrangères, employé à la
correspondance internationale du gouvernement.
Il était devenu aveugle en 1652.
Il revint aux ambitions poétiques de sa jeunesse probablement après 1655, sans les avoir jamais oubliées la période
où il avait considéré comme de son devoir d'employer son génie au service politique et religieux de son pays.
Il
choisit donc relativement tard son grand sujet du Paradis perdu.
Il écrivit cependant encore une série de pamphlets pour la défense des libertés religieuses et civiles entre 1659 et
1660 et en 1673.
Protégé par sa gloire littéraire déjà considérable, il ne fut pas persécuté sous Charles II.
Il écrivit
en paix ses grands poèmes, le Paradis perdu publié en 1667, le Paradis reconquis en 1671, et Samson Agonistes en
1671.
Il mourut en 1675 de la goutte.
Il laissait un énorme traité de théologie, De Doctrina Christiana, qui ne fut
publié qu'en 1825, après avoir été confisqué, puis soigneusement classé, puis oublié, dans les archives du
gouvernement.
C'est comme poète épique que Milton s'impose avant tout.
Voltaire, qui l'a décrié dans Candide, a cependant écrit
dans le Siècle de Louis XIV, à propos du Paradis perdu : "On s'est épuisé sur les critiques, mais on ne s'épuise pas
sur les louanges.
Milton reste la gloire et l'admiration de l'Angleterre : on le compare à Homère dont les défauts sont
aussi grands, et on le met au-dessus de Dante, dont les imaginations sont encore plus bizarres."
Les grands poètes épiques sont, en effet, très rares, et demandent une admiration toute particulière.
Alors que les
dramaturges de génie sont assez nombreux, on ne compte que sept ou huit poètes épiques du premier rang.
Homère, Virgile, Dante, Camoëns et Milton sont, en Europe, les seuls ; aucun pays n'en a eu deux.
Hors d'Europe, il
n'y a que les grands poèmes hindous qui atteignent à la même grandeur ; et en réalité, le Mahabharata qui a 200
000 vers ; et le Râmâyana, qui en a 80 000, sont beaucoup trop longs (le Paradis perdu n'a que 10 000 vers et nous
paraît déjà bien long) pour être de véritables oeuvres d'art : ces énormes poèmes, composés non par un auteur,
mais par des générations successives, comprennent d'immenses parties de peu de valeur littéraire ; les passages
vraiment sublimes ou même seulement supérieurs y sont rares.
Les épopées européennes, qui ont toutes Homère
pour modèle, ont cherché à atteindre un niveau plus soutenu : l'influence de l'idéal esthétique des Grecs y est
évidente et salutaire.
C'est probablement parce que Hugo ne s'est plus tenu assez près de cet idéal grec et a été
trop influencé par les Hindous qu'il n'arrive que par fragments au tout premier rang, et il est le seul Français qui en
approche.
Milton, au contraire, est une réussite épique parfaite, si on veut bien considérer, comme Voltaire, que la perfection
absolue n'existe pas.
On a surtout reproché à Milton les longs passages où il met en vers, bons sans doute, mais
lourds et lents, la théologie telle qu'il l'entend.
C'est du point de vue littéraire un reproche justifié, mais qu'il ne faut
pas pousser trop loin.
Une certaine quantité de théologie est inévitable dans toutes les épopées.
Homère a la
sienne, et Virgile et Dante.
C'est peut-être Camoëns qui en a le moins à cause de son sujet géographique : mais il
en a aussi, et beaucoup.
Le grand poète épique, en effet, doit donner une vue d'ensemble de l'Univers, et a donc.
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