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Georges RODENBACH (1855-1898) (Recueil : Le règne du silence) - Seuls les rideaux, tandis que la chambre est obscure

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Georges RODENBACH (1855-1898) (Recueil : Le règne du silence) - Seuls les rideaux, tandis que la chambre est obscure Seuls les rideaux, tandis que la chambre est obscure, Tout brodés, restent blancs, d' un blanc mat qui figure Un printemps blanc parmi l'hiver de la maison. Sur les vitres, ce sont des fleurs de guérison Pareilles dans le soir à ces palmes de givre Que sur les carreaux froids les nuits d'hiver font vivre. Et dans ces floraisons de guipure on croit voir Tous les souvenirs blancs parmi le présent noir : Ce sont les rideaux clairs du berceau ; c'est la bonne Aïeule aux cheveux blancs en bandeaux de madone ; Ce sont les grands jardins d'enfance où les pommiers Etaient poudrés ; ce sont les cierges coutumiers Et les nappes d'autel pour les communiantes ; C'est l'hostie aux lys purs de leurs lèvres priantes ; Puis c'est le clair de lune épars comme du lait Dans la forêt magique où l'art nous appelait Parmi sa gloire et ses blancheurs éternisées ! Puis la guirlande en fleur au front des épousées Dont l'espoir doux se fane irréparablement Parmi cette blancheur vaporeuse qui ment. Car le leurre est rapide en cette ombre équivoque, Et tous les autres blancs du passé qu'on évoque Vont se faner avec les souvenirs d'amour Quand descendra dans les rideaux la mort du jour.

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