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Théâtre de boulevard Théâtre brechtien Théâtre de chambre Théâtre de la cruauté Théâtre élisabéthain

Théâtre de boulevard. Terme qui sert à désigner un répertoire, celui des salles qui, situées au xixe siècle sur le boulevard du Temple, puis sur les Grands Boulevards parisiens, jouaient des mélodrames, des vaudevilles, et continuent aujourd’hui encore à donner des pièces légères, comme celles de Labiche, de Feydeau, de Courteline, etc., dans un style de jeu toujours identique, régi par le réalisme illusionniste.

Théâtre brechtien. Dramaturgie créée par Brecht qui, considérant le théâtre comme une tribune, veut détruire l’illusion car elle endort l’esprit critique. Il fustige violemment le théâtre aristotélicien, terme synonyme, chez lui, de théâtre d’illusion. En faisant croire à la réalité des événements représentés, un tel théâtre exerce sur le public une fonction hypnotique, amenant le spectateur à s’identifier au héros. Afin de produire un phénomène de distanciation entre le spectateur et le spectacle, qui désaliénera le spectateur, Brecht prône un théâtre épique, comparable à la poésie des bardes ou des troubadours qui chantaient les prouesses guerrières des lointains héros. Alors que le théâtre d’illusion tente de recréer un faux présent, le théâtre épique, strictement historique, rappelle constamment au public qu’il n’assiste qu’à un exposé d’événements passés.
L’abandon de l’illusion réaliste affranchit l’auteur dramatique d’un certain nombre de conventions. Dans le théâtre épique, les personnages se présentent directement au public. Un récitant décrit les pensées et les mobiles des personnages. C’est là un procédé d’éloignement qui tend à sauvegarder la liberté de réflexion du spectateur.
Alors que l’action progresse de façon continue dans le théâtre d’illusion, elle est fragmentée dans le théâtre épique. Les scènes, le plus souvent discontinues, sont centrées successivement sur des groupes de personnages différents. Les songs, passages versifiés et chantés, avec refrain et division en strophes, introduisent également une rupture au sein du dialogue en prose. Le décor est, lui aussi, dans sa discontinuité, élément de distanciation. Brecht prône l’utilisation de projections cinématographiques. Le cinéma doit être utilisé comme une succession de tableaux. Il joue le rôle de « chœur optique », car « il peut confirmer ce qui est présenté par l’action, ou réfuter, rappeler à la mémoire ou prophétiser ».

Théâtre de chambre. Théâtre qui se veut intimiste, comme la musique de chambre à laquelle il emprunte son nom, tant dans ses thèmes (le couple, la solitude) que dans les modes de représentation. Il nécessite un lieu clos susceptible de recevoir un petit nombre de spectateurs car, dans un grand théâtre comme le théâtre à l’italienne, une rencontre authentique ne pourrait s’instaurer entre les acteurs et le public. Ses lieux de prédilection sont les théâtres de poche. Strindberg, dans son Théâtre intime, qu’il fonde à Stockholm en 1907, refuse, dans l’écriture, une action complexe tout comme la multiplicité des personnages, dans la mise en scène, le luxe du décor et les effets de la machinerie. Il y joue entre 1901 et 1910 son Théâtre de chambre (Kammerspiel), notamment L’Orage, La Maison brûlée, Le Pélican et La Sonate des spectres. «Si l’on me demande ce que veut le Théâtre intime, dit-il, quel est son but, je répondrai : développer dans le drame un sujet chargé de signification, mais limité. Nous évitons les expédients, les effets faciles, les morceaux de bravoure, les numéros pour vedettes » (Lettre ouverte du théâtre intime, 1908).
Cette recherche d’une qualité émotionnelle rare explique la permanence du théâtre de chambre depuis le début du siècle. Jean Tardieu, dans son Théâtre de chambre écrit dans les années cinquante, donne des esquisses dramatiques, courtes pièces chargées d’onirisme. Michel Vinaver, tenant d’un «théâtre du quotidien », est un des représentants actuels du théâtre de chambre.

Théâtre de la cruauté. Expression forgée par A. Artaud pour définir sa conception du théâtre. Marqué par sa découverte des théâtres orientaux, Artaud voudrait redonner au théâtre occidental ses forces vives. Porter la cruauté au théâtre, comme il l’explique en 1932 et en 1933 dans ses deux manifestes intitulés « Le Théâtre de la cruauté » (insérés dans Le Théâtre et son double), c’est explorer le monde du rêve et de l’inconscient qu’il a découvert avec les surréalistes. Si Artaud compare le théâtre à la peste dans «Le Théâtre et la peste», c’est qu’il révèle, comme l’épidémie, ce que l’homme a toujours cherché à refouler : la cruauté. Artaud s’est longuement défendu de vouloir donner un sens grand-guignolesque à la cruauté. Mais il demeure fasciné par le thème de la tragédie du sang. Artaud oscillera toujours entre deux pôles de la cruauté, une cruauté physique qui torture le corps et une cruauté métaphysique qui blesse l’âme. • Artaud A., Le Théâtre et son double, Paris, Gallimard, Idées, 1964.

Théâtre élisabéthain. Théâtre anglais qui commence sous le règne d’Elisabeth et voit, de 1588 à 1642, les créations de Shakespeare, Marlowe, Ben Jonson, Cyril Tourneur, etc. Cette dramaturgique est liée à un dispositif scénique original qui offre des aires de jeu multiples et, s’avançant jusqu’au milieu du parterre, crée un contact étroit entre les acteurs et le public. Elle présente deux caractéristiques essentielles : — L’action, fragmentée, peut aisément se dérouler dans des lieux différents et permettre l’interférence d’actions secondaires. Ex. : dans Le Roi Lear, deux intrigues s’entrecroisent, liées par un rapport contrapunctique. Le drame du partage du pouvoir, né de l’aveuglement des pères comme de la cupidité des héritiers, se joue de façon identique à la cour de Lear (action principale) et dans le château de Gloucester (action secondaire). C’est là une conception baroque de l’intrigue. — Adresses au public et apartés y sont fréquents. Le bouffon (clown en anglais), personnage directement hérité du théâtre médiéval, accentue ce rapport de connivence avec les spectateurs qu’il prend fréquemment à partie. Excellant dans l’art de la pantomime, il brise le pathétique tant par ses pitreries que par des allusions à la situation théâtrale. Doté d’un statut à part, tout en restant dans le jeu, il s’en distancie à chaque clin d’œil au public. ► Action, adresse au public, aparté, liaison de scènes



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