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SARRAUTE Nathalie 1902

SARRAUTE Nathalie 1902
Romancière, auteur dramatique et essayiste d'origine russe. Venue en France dès 1910, elle étudie à Paris, puis à Oxford, et sera avocate jusqu'en 1939. À cette date paraît, salué par quelques rares critiques, son premier livre, Tropismes, suite de dix-neuf récits d'une rare densité. Cette notion de « tropisme » désigne habituellement les mouvements, simples mais irrésistibles, de certains animaux de vie quasi végétative. De même pour Nathalie Sarraute, à la traditionnelle « psychologie » romanesque, conçue comme une suite linéaire d'éléments logiques, se substitue l'infini foisonnement de pulsions rudimentaires -simplistes mais d'autant plus sauvages et violentes-, d'élans qui tournent court et de sensations à l'état naissant. Cette abolition du « fil » du récit romanesque sera appuyée, en 1956, par un essai, L'Ère du soupçon (recueil d'articles parus entre 1947 et 1955).
Mais déjà son Portrait d'un inconnu (1948), préfacé par Jean-Paul Sartre et qualifié par lui d'« anti-roman », avait fourni le premier exemple d'une nouvelle formule romanesque, qui « approche (dit encore Sartre) avec des précautions pieuses» de son sujet, comme si l'auteur en craignait la ruade inopinée, le pouvoir latent de rupture ou d'explosion. Ami-roman, sans doute, dans la mesure où la traditionnelle individualisation des personnages, la continuité du temps, la continuité même de l'action et sa situation précise dans l'espace sont niées ; mais souvent, en revanche, le roman ainsi détruit se recompose en poème devant nos yeux. Outre ses récits (auxquels s'ajoutent Martereau, 1953; Le Planétarium, 1959 ; Les Fruits d'or, 1963 ; Entre la vie et la mort, 1968), Nathalie Sarraute a cultivé le dialogue de théâtre (à la radio, pour commencer; puis en 1968 à la petite salle d'essai du Théâtre de France dirigé par Barrault). Théâtre également « sans personnages », en ce sens, d'abord, qu'il est conçu comme un théâtre pour la voix, seulement: Le Silence (1964), Le Mensonge (1965), Isma (1970), C'est beau (1973), Elle est là (1980), Pour un oui ou pour un non (1982). Ce qui la fascine ici, c'est le moment de malaise fantastiquement grossi ou bien le passage constant du monde réel à un monde irréel; et c'est (dit-elle encore) un mot, parfois, qui produit le déclic.

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