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Tou Fou

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Ayant un caractère peu ordinaire, j'aime follement les beaux vers ; Si une phrase ne frappe personne, je la travaillerai jusqu'à la mort ! (Tou Fou) Nul pays au monde ne possède une littérature aussi riche que la Chine. L'occidental qui en franchit le seuil en reste ébloui. Il a peine à croire à cette immensité, comparable seulement à celle de l'espace et du temps sur lesquels s'est édifiée la civilisation jaune. Or, de tous les genres littéraires pratiqués dans l'Empire du Milieu, aucun, depuis les origines, n'a connu une plus grande faveur que la poésie. Emergeant de la nuit des temps, une langue, une écriture d'une originalité absolue, d'un caractère sacré, ont fourni au peuple des fils de Han un instrument admirablement adapté à l'expression poétique. Ressources du son combien subtiles, mais aussi ressources de l'image ; car, et c'est là la merveille, grâce à l'idéogramme un jeu tout en nuances est rendu possible entre ce qui est du domaine de l'ouïe et ce qui est du domaine de la vue. Le poète chinois dispose ainsi d'une manière de dimension supplémentaire dont le poète occidental est privé et dont parfois, très gauchement, il exprime sa nostalgie, tel Guillaume Apollinaire, en recourant au calligramme. Chaque mot, monosyllabique et enfermé dans un caractère de forme immuable, est comme une pierre (par opposition au mot plastique de nos parlers à désinences) ; en se servant de ces pierres, l'écrivain, tout naturellement, est conduit à l'architecture, c'est-à-dire à l'expression statique, à la transposition du mouvant, du contingent sur le plan de l'éternel. C'est bien dans une atmosphère d'éternité que nous plonge la lecture des poèmes chinois, qui sont ainsi marqués du sceau de ce que la poésie peut offrir de plus haut : le sentiment de la grandeur. De la nature de la langue découle aussi la possibilité d'une concision extrême : le chinois, plaque de jade pour y graver d'un trait aigu le signe elliptique des idées, des sentiments, des sensations. Par là encore il est de la poésie un serviteur idéal.

« Tou Fou Ayant un caractère peu ordinaire, j'aime follement les beaux vers ; Si une phrase ne frappe personne, je la travaillerai jusqu'à la mort ! (Tou Fou) Nul pays au monde ne possède une littérature aussi riche que la Chine.

L'occidental qui en franchit le seuil en reste ébloui.

Il a peine à croire à cette immensité, comparable seulement à celle de l'espace et du temps sur lesquels s'est édifiée la civilisation jaune. Or, de tous les genres littéraires pratiqués dans l'Empire du Milieu, aucun, depuis les origines, n'a connu une plus grande faveur que la poésie.

Emergeant de la nuit des temps, une langue, une écriture d'une originalité absolue, d'un caractère sacré, ont fourni au peuple des fils de Han un instrument admirablement adapté à l'expression poétique. Ressources du son combien subtiles, mais aussi ressources de l'image ; car, et c'est là la merveille, grâce à l'idéogramme un jeu tout en nuances est rendu possible entre ce qui est du domaine de l'ouïe et ce qui est du domaine de la vue.

Le poète chinois dispose ainsi d'une manière de dimension supplémentaire dont le poète occidental est privé et dont parfois, très gauchement, il exprime sa nostalgie, tel Guillaume Apollinaire, en recourant au calligramme.

Chaque mot, monosyllabique et enfermé dans un caractère de forme immuable, est comme une pierre (par opposition au mot plastique de nos parlers à désinences) ; en se servant de ces pierres, l'écrivain, tout naturellement, est conduit à l'architecture, c'est-à-dire à l'expression statique, à la transposition du mouvant, du contingent sur le plan de l'éternel.

C'est bien dans une atmosphère d'éternité que nous plonge la lecture des poèmes chinois, qui sont ainsi marqués du sceau de ce que la poésie peut offrir de plus haut : le sentiment de la grandeur. De la nature de la langue découle aussi la possibilité d'une concision extrême : le chinois, plaque de jade pour y graver d'un trait aigu le signe elliptique des idées, des sentiments, des sensations.

Par là encore il est de la poésie un serviteur idéal. Ne nous étonnons donc pas que la Chine fut une terre éminemment privilégiée de la poésie.

Celle-ci y donna des moissons d'une abondance inconnue partout ailleurs Écoles innombrables, formant de véritables galaxies de poètes (par un miracle de l'écriture, qui met la langue à l'abri du vieillissement, aucune de ces constellations, même anciennes de plusieurs millénaires, n'a, au cours des temps, perdu de son éclat). Les lignes qui précèdent étaient sans doute indispensables pour faire saisir l'importance et la grandeur d'un homme que les lettrés de son pays considèrent comme un des astres les plus brillants, sinon le plus brillant, parmi tous ceux qui rayonnent au firmament de la poésie chinoise.

Il s'agit de Tou Fou, héros, avec son contemporain Li T'ai-po, du lyrisme T'ang. C'est sous la dynastie des T'ang (618-907) que la Chine connut, à tous égards, une de ses époques de plus haute splendeur.

Elle éblouissait l'Asie entière, à peu près comme fit de l'Europe la France de Louis XIV.

Dans le domaine littéraire, c'est la période du classicisme, dont l'âge d'or se situe au VIIIe siècle, sous le règne de l'empereur Hiuantsong, souverain fastueux et grand protecteur des lettres et des arts.

Tou Fou, surnommé Tseu-mei (Fleur d'Élégance), vécut au temps de ce "roi soleil" asiatique. Il voit le jour en 712 à Tou Ling, dans la province de Chen-si.

Sa famille appartenait à la classe des militaires et des lettrés (nous possédons dix livres de poésies composées par un sien aïeul).

Sa vocation se dessine dès l'enfance : à quinze ans, des essais, des poèmes lui valent déjà un commencement de réputation.

Poussé par un caractère capricieux et indépendant, il entreprend une vie de vagabondage qui dure dix ans, au bout desquels il se rend à la capitale, Tch'ang-ngan, pour s'y présenter aux concours impériaux (vers 735).

Ses examinateurs s'effraient de ses vues peu orthodoxes ; il n'est pas reçu.

Il reprend alors son existence errante, au cours de laquelle il rencontre son émule, le poète Li T'ai-po, qui deviendra son grand ami et qu'il célébrera dans ses vers. En 747, l'empereur ouvre des concours spéciaux pour "toute personne possédant un art quelconque".

Tou Fou, qui jouit maintenant d'une véritable célébrité, y participe.

Mais à la suite d'intrigues tous les candidats sont refusés.

A bout de ressources, le poète en est réduit à mendier.

Cependant, il arrive à attirer finalement sur lui l'attention du Fils du Ciel en lui adressant un "fou" (poème descriptif) des Trois Grandes Cérémonies, qui lui attire la faveur du souverain.

Celui-ci va jusqu'à lui offrir le gouvernement d'une province.

Mais il préfère des fonctions plus modestes, qui ne l'obligent pas à quitter Tch'ang-ngan dont le charme, la "vie inimitable", l'ont profondément conquis.

C'est l'époque la plus radieuse de son existence, la seule où, peut-être, il ait connu l'insouciance et le plaisir.

Unique ombre au tableau : sa situation matérielle.

Ce qu'il gagne ne suffit pas à couvrir les frais de son séjour dans la capitale.

Il finit par adresser à l'empereur une requête en vers qui est restée célèbre.

Usant de l'hyperbole, il s'y plaint amèrement de sa détresse.

Ce joli morceau de littérature lui vaut une pension, mais dont il ne jouit pas longtemps.

L'année même éclate la révolte de Ngan Lou-chan (755) qui bouleverse tout l'Empire et provoque la fuite précipitée de Hiuan-tsong dont la capitale tombe aux mains des rebelles.

Tou Fou, fugitif de son côté, gagne les montagnes du Chen-si.

L'empereur ayant abdiqué, son fils Sou-tsong monte sur le trône du Dragon.

Notre poète, assez mal au fait des événements et désireux de revoir l'ancien souverain, décide de se rendre à Tch'ang-ngan.

Il entreprend le voyage sous le costume d'un mendiant.

Mais la ville est au pouvoir des révoltés qui se saisissent de lui, le battent et le font prisonnier.

Après un an de captivité, il parvient à s'évader et à rejoindre le nouveau souverain à Fong-siang dans le Chen-si, où il arrive complètement épuisé et les vêtements en lambeaux (757).

Ému, Sou-tsong lui réserve un excellent accueil et le nomme à un poste élevé : il le fait censeur impérial.

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