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Théophile Dondey dit Philothée O'NEDDY (1811-1875) (Recueil : Feu et flamme) - Nuit quatrième

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Théophile Dondey dit Philothée O'NEDDY (1811-1875) (Recueil : Feu et flamme) - Nuit quatrième Nécropolis Sur la terre on est mal : sous la terre on est bien. (PETRUS BOREL) I Voici ce qu'un jeune squelette Me dit les bras croisés, debout, dans son linceul, Bien avant l'aube violette, Dans le grand cimetière où je passais tout seul : II Fils de la solitude, écoute ! Si le Malheur, sbire cruel, Sans cesse apparaît dans ta route Pour t'offrir un lâche duel ; Si la maladive pensée Ne voit, dans l'avenir lancée, Qu'un horizon tendu de noir : Si, consumé d'un amour sombre, Ton sang réclame en vain, dans l'ombre, Le philtre endormeur de l'espoir ; Si ton mal secret et farouche De tes frères n'est pas compris ; Si tu n'aperçois sur leur bouche Que le sourire du mépris Et si, pour assoupir ton âme, Pour lui verser un doux dictame, Le Destin, geôlier rigoureux, Ne t'a pas, dans ton insomnie, Jeté la lyre du génie, Hochet des grands coeurs malheureux ; Va, que la mort soit ton refuge ! À l'exemple du Rédempteur, Ose à la fois être le juge, La victime et l'exécuteur. Qu'importe si des fanatiques Interdisent les saints portiques À ton cadavre abandonné ? Qu'importe si, de mille outrages, Par l'éloquence des faux sages, Ton nom vulgaire est couronné ? III Sous la tombe muette oh ! comme on dort tranquille ! Sans changer de posture, on peut, dans cet asile, Des replis du linceul débarrassant sa main, L'unir aux doigts poudreux du squelette voisin. Il est doux de sentir des racines vivaces Coudre à ses ossements leurs noeuds et leurs rosaces, D'entendre les hurrahs du vent qui courbe et rompt Les arbustes plantés au-dessus de son front. C'est un ravissement quand la rosée amie, Diamantant le sein de la côte endormie, À travers le velours d'un gazon jeune et doux, Bien humide et bien froide arrive jusqu'à vous. Là, silence complet ; farniente sans borne. Plus de rages d'amour ! le coeur stagnant et morne, Ne se sent plus broyé sous la dent du remords. - Certes, l'on est heureux dans les villas des morts !

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