Tartuffe est-il un drame ou une comédie ?
Extrait du document
«
Il y a longtemps qu'on a remarqué que les pièces de Molière ont quelque chose de tragique et que son rire, pourtant
si franc et irrésistible, a comme un arrière-goût d'amertume.
De Tartuffe surtout, on peut se demander: Est-ce un/drame, est-ce une comédie ?
I.
Il y a des éléments de drame dans « Tartuffe.
»
1.
Le sujet n'est guère plaisant en soi : Un hypocrite s'introduit dans une famille, y met le désordre et la désunion...
suborne Elmire, est près d'épouser la fille, réussit presque à expulser Orgon.
2.
L'hypocrisie est d'ailleurs un vice beaucoup plus odieux que ridicule.
Tantôt l'hypocrite effraie (Mariane sacrifiée à
la manie de son père).
Tantôt il est répugnant par l'usage sacrilège qu'il fait de « maximes qu'on révère, » (Les
scènes entre Elmire et Tartuffe ont quelque chose de pénible.) Ainsi Tartuffe est bien sous certains rapports un
drame, et on en a particulièrement l'impression à la fin du quatrième acte, quand le scélérat vient d'être démasqué
et triomphe.
Il semble que Molière ait voulu vraiment nous effrayer et nous montrer que ce vice est tout
particulièrement dangereux.
Cependant, il ne faudrait pas exagérer.
II.
« Tartuffe » reste une comédie.
On pourrait dire que la pièce répond bien à la définition de Fénelon : la comédie représente les moeurs des hommes
dans une condition privée.
Mais Fénelon oppose la comédie à la tragédie, non au drame, qu'il semble d'ailleurs
prévoir.
Tartuffe pourrait être un drame ; il ne l'est pas, parce que Molière a pris toutes les précautions pour qu'il ne
le fût pas.
1.
Il retarde l'arrivée de Tartuffe en scène, pour que nous soyons bien renseignés sur lui.
Nous le voyons d'abord par
les yeux de Dorine (I, 2)...
Orgon achève de nous le faire connaître, sous un jour caricatural (I, 5).
(Développer et
citer.)
2.
Tartuffe ne trompe que Mme Pernelle qui est une sotte et Orgon qui est un imbécile.
Ces deux personnages sont
très chargés à dessein....
Tous les gens sensés dans la pièce voient clair dans son jeu, personne n'a peur de lui.
3.
Et Dorine surtout donne le ton.
Elle intervient chaque fois que nous sommes près de nous attendrir ou de nous
effrayer...
elle se substitue à Mariane (II, 2) et fait rire par ses bouffonneries..
à l'acte V ses réflexions
impertinentes, qui seraient déplacée dans un drame, nous rappellent ici qu'il ne faut pas prendre les choses au
tragique ( Juste retour, monsieur) ; la situation d'Orgon sous la table, l'incrédulité de Mme Pernelle, Je ton radouci
de M.
Loyal sont encore des éléments de comique.
4.
Enfin le dénouement inattendu, l'intervention du roi, en même temps qu'une flatterie à l'adresse de Louis XIV,
empêche la pièce définir en drame et nous donne l'impression que tout s'arrange....
Qrgon désabusé, Tartuffe en
prison : tout est bien qui finit bien, Mariane épousera Valère...
Mais nous avons eu une belle peur.
Telle est
exactement l'impression que Molière a voulu nous laisser..
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Molière écrit dans la préface du Tartuffe que « l’emploi de la comédie est de corriger les vices des hommes ».
- On a dit de Molière qu'il côtoie parfois le tragique, montrez le d'après la pièce le Tartuffe, sans oublier que Molière ne perd jamais de vue que la règle essentielle de la comédie et de faire rire.
- Emile Faguet considère Britannicus comme « une tragédie bourgeoise, une intrigue de cour, une comédie d'alcôve se terminant en drame à la Zola. Il y a le génie de Racine sur tout cela ; mais je ne parle ici que du choix du sujet. Les grands intérêts humains ne sont pas engagés dans cette affaire, où personne n'y songe, ni dans la salle ni sur la scène. Il s'agit de savoir qui gouvernera le palais et qui, de Néron ou d'Agrippine, sera quitté par la Cor. Deux portraits d'ambitieux, admir
- Dans le journal d'un poète, en 1836, Alfred de Vigny écrivait: Le drame est vrai puisque, dans une action tantôt comique, tantôt tragique, suivant les caractères, il finit avec tristesse comme la vie des hommes puissants de caractère, énergiques de passion. Le drame n'a été appelé bâtard que parce qu'il n'est ni comédie ni tragédie. [...] Mais les vivants sont ainsi. Vous expliquerez cette opinion en l'illustrant à partir des drames romantiques que vous connaissez ?
- « Voilà le fond, dont on eût pu faire, avec un égal succès, une tragédie, une comédie, un drame, un opéra,etc. [...] Le genre d'une pièce, comme celui de toute autre action, dépend moins du fond des choses que des caractères qui les mettent en oeuvre » écrit Beaumarchais. En vous appuyant sur les textes du corpus ainsi que sur les pièces que vous connaissez, vous commenterez et apprécierez cette affirmation.