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Proposition de corrigé : L’écriture de Colette décrit-elle le réel ?

Publié le 25/06/2024

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« Proposition de corrigé : L’écriture de Colette décrit-elle le réel ? Il appert qu’à bien des égards, Colette décrit des aspects de la réalité perçus par le prisme de l’analepse. L’évocation des souvenirs d’enfance s’avère réaliste, puisqu’elle ravive les perceptions sensorielles de l’autrice-narratrice.

Apprécions les mots qui suivent, transcrits dans la partie I de Sido : « de brûlants étés », « la mer grise ou bleue » ou encore, « un faible ronflement de mers lointaines ».

Le toucher est suggéré grâce à la sensation hyperbolique de « brûlure » ; on remarque également, dans la deuxième citation, la présence de la vue par une hésitation entre deux couleurs, marquée par la conjonction de coordination « ou », qui témoigne d’un véritable souci du détail ; relevons, enfin, la personnification de la « mer » ronflante, avec la sonorité sourde et prolongée du ronflement qui se voit accentuée par la double allitération en [F] et en [R], faisant ainsi écho à l’ouïe.

La convocation de ces trois sens crée des images qui revivifient lesdits souvenirs, et donnent une présence à une réalité absente. Si l’écriture possède la faculté de ressusciter une réalité passée, elle permet tout autant de vivre intensément l’instant présent.

Dans cette perspective, il s’agit bel et bien d’une invitation à observer le réel à travers le point de vue interne de l’autrice-narratrice, comme en témoigne le passage qui suit, extrait de la nouvelle intitulée « En marge d’une plage blanche I », issue des Vrilles de la vigne : « Le chevalier piedrouge, botté de maroquin orange, siffle d’un air cynique, tandis que l’Arlequin, fuyant et mince, les épie… Ô lecteur vicieux, qui espérez une anecdote dans le goût grivois et surannée, détrompez-vous : je vous conte seulement les ébats de trois jolis oiseaux de marais.

Ils ont des noms charmants, ces oiseaux de la mer et du marécage.

Des noms qui fleurent la comédie italienne, voire le roman héroïque (…) » On assiste à une véritable spectacularisation du réel : par les références à la Commedia dell’arte, Colette décrit avec amusement et fausse naïveté des oiseaux qui se métamorphosent en comédiens.

Cette fantasmagorie révèle une approche du monde fondée sur un regard attentif et méticuleux ; d’ailleurs, Colette elle-même assume la lucidité de sa vision en s’adressant directement à ses lecteurs : « je vous conte seulement (…) ».

L’adverbe « seulement » semble, à première vue, confirmer cette volonté de décrire le réel tel qu’il se donne à voir. Il est cependant incontestable, compte tenu de ce dernier exemple, que la restitution de ces moments de vie est filtrée par une certaine intensité émotionnelle : de fait, Colette ne recompose-t-elle pas le réel plus qu’elle ne le décrit ? Les nombreuses hypotyposes donnent à voir une approche émotive et méliorative de la réalité ; en voici une parmi d’autres : « La baie de Somme, humide encore, mire sombrement un ciel égyptien, framboise, turquoise et cendre verte.

La mer est partie si loin qu’elle ne reviendra peut-être plus jamais ?… Si, elle reviendra, traîtresse et furtive comme je la connais ici.

(…) » La peinture de la « baie de Somme » témoigne d’une picturalisation très forte : en effet, les métaphores fruitées sont intrinsèquement liées à un agencement de formes, suggéré par le mouvement incertain de la mer, personnifiée encore, cette fois à l’aide d’une interrogation directe et partielle.

Les couleurs existent, par conséquent, grâce à des contours, comme dans un tableau.

Ainsi, l’écriture de Colette n’est pas loin de l’ekphrasis. Cette vision embellie du réel témoigne de l’émerveillement que l’autrice-narratrice éprouve à l’égard.... »

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