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Octave CRÉMAZIE (1827-1879) - Le Chant des voyageurs

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Octave CRÉMAZIE (1827-1879) - Le Chant des voyageurs A nous les bois et leurs mystères, Qui pour nous n'ont plus de secrets ! A nous le fleuve aux ondes claires Où se reflète la forêt, A nous l'existence sauvage Pleine d'attraits et de douleurs ! A nous les sapins dont l'ombrage, Nous rafraîchit dans nos labeurs. Dans la forêt et sur la cage Nous sommes trente voyageurs. Bravant la foudre et les tempêtes Avec leur aspect solennel, Qu'ils sont beaux ces pins dont les têtes Semblent les colonnes du ciel ! Lorsque privés de leur feuillage Ils tombent sous nos coups vainqueurs, On dirait que dans le nuage L'esprit des bois verse des pleurs. Dans la forêt et sur la cage Nous sommes trente voyageurs. Quand la nuit de ses voiles sombres Couvre nos cabanes de bois, Nous regardons passer les ombres Des Algonquins, des Iroquois. Ils viennent ces rois d'un autre âge, Conter leurs antiques grandeurs A ces vieux chênes que l'orage N'a pu briser dans ses fureurs. Dans la forêt et sur la cage Nous sommes trente voyageurs. Puis sur la cage qui s'avance Avec les flots du Saint-Laurent, Nous rappelons de notre enfance Le souvenir doux et charmant. La blonde laissée au village, Nos mères et nos jeunes soeurs, Qui nous attendent au rivage, Tour à tour font battre nos coeurs. Dans la forêt et sur la cage Nous sommes trente voyageurs. Quand viendra la triste vieillesse Affaiblir nos bras et nos voix, Nous conterons à la jeunesse Nos aventures d'autrefois. Quand enfin pour ce grand voyage, Où tous les hommes sont rameurs, La mort viendra nous crier : Nage ! Nous dirons bravant ses terreurs : Dans la forêt et sur la cage Nous étions trente voyageurs.

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