Les classiques sont-ils impersonnels ?
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Introduction :
a) Les romantiques ont reproché aux classiques leur impersonnalité.
b) Selon Hugo il faut écrire « non pas avec ce qui a été écrit, mais avec son âme et son coeur ».
c) Cette accusation est-elle fondée ?
I.
— L'Impersonnalité des classiques :
1°) Le choix des sujets :
Pascal disait « Le moi est haïssable », et accusait Montaigne de n'avoir parlé que de lui : « Le sot projet qu'il a eu de se peindre ».
De fait, les classiques choisissaient leurs sujets dans l'antiquité et leurs oeuvres ne sont pas « lyriques ».
2°) La peinture des sentiments :
En vertu du rationalisme, on ne s'intéresse qu'à la nature humaine dans ce qu'elle a de permanent et l'on cherche à créer des types
objectifs (Ex.
: la peinture de l'âme chez Racine et Molière).
3°) La conception esthétique :
On considère que le Beau est absolu et que, pour l'atteindre, il faut se plier à des règles.
Ces règles limitent l'inspiration et excluent
toute fantaisie.
4°) L'expression :
Soucieux de naturel et de vérité, les classiques font parler chaque personnage selon sa condition; ils disparaissent devant les modèles
qu'ils observent et font revivre.
Seule la nécessité d'employer un style noble atténue cette obligation.
II.
— La Personnalité des classiques :
1°) Le choix des sujets :
La Fontaine parle directement ou indirectement de lui et de ses goûts; Bossuet nous confie souvent ses émotions; Pascal laisse
entrevoir
son âme ardente; Corneille et Racine ont marqué de leur personnalité les sujets qu'ils ont empruntés (Bérénice de Racine et Tite et
Bérénice de Corneille).
Chacun renouvelle à sa manière l'oeuvre dont il s'inspire, soit qu'il complique (Corneille), soit qu'il simplifie
(Racine).
2°) Les sentiments :
a) Les univers racinien et cornélien sont différents : ils reflètent la personnalité de l'auteur, ses rêves, sa conception de l'homme, ses
goûts...
b) Consciemment ou non les classiques ont utilisé leurs souvenirs et leurs expériences pour peindre leurs personnages.
Ils
apparaissent derrière les créations (les deux visages de Racine, doux et violent comme ses héros)
c) Ils ont regardé vivre autour d'eux et la société qu'ils ont connue se reflète dans leurs oeuvres (Thèse de Taine).
3°) La conception esthétique :
Les classiques ont prétendu que la seule règle était de plaire et il y a chez eux bien des audaces (la mort de Phèdre devant les
spectateurs).
4°) Le style :
Chaque classique a un style qui lui est propre : le vers de Racine mélodieux et souple ne ressemble pas à celui de Corneille plus
pittoresque, plus oratoire.
Conclusion :
Un véritable artiste ne peut pas être « impersonnel ».
_ Les Romantiques n'ont vu qu'un aspect du classicisme, le plus apparent.
On
jugera Plus équitablement en disant avec un critique contemporain que « les Romantiques ont parlé d'eux-mêmes pour parler des
autres et que les classiques parlaient des autres pour parler d'eux-mêmes ».
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Liens utiles
- Italo Calvino, « Pourquoi lire les classiques »
- Fénelon, "Sermon pour la fête de l'Épiphanie", dans Écrits spirituels (pages choisies), édition établie par Bernard Dupriez, Paris, Nouveaux Classiques Larousse, 1965.
- Joinville, "Vie de Saint Louis", édition J. Monfrin, Classiques Garnier.
- « Un vrai classique, [...] c'est un auteur qui a enrichi l'esprit humain, qui en a réellement augmenté le trésor, qui lui a fait faire un pas de plus [...] ; qui a rendu sa pensée, son observation ou son invention, sous une forme n'importe laquelle, mais large et grande, fine et sensée, saine et belle en soi ; qui a parlé à tous dans un style à lui et qui se trouve aussi celui de tout le monde, dans un style nouveau sans néologisme, nouveau et antique, aisément contemporain de tous les
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