Le quiétisme
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Le quiétisme
Le jansénisme du XVIIe siècle est trop intellectuel pour être mystique.
On peut se demander pourquoi il n'y a pas de
grands mystiques français, tels Maître Eckhart à la fin du XIIIe siècle allemand, Catherine de Sienne au )(Ive siècle
italien, Jean de la Croix ou Thérèse d'Avila au XVIe siècle espagnol.
Cette indigence serait-elle du même ordre que
celle qui affecte la « tête épique » ? Siècle religieux le XVIIe siècle connut tous les excès du formalisme mais guère
ceux de l'illuminisme.
Un capucin anglais réfugié en France, Benoît de Canfeld, publia bien en 1609 la Règle de
Perfection, qui se proposait de conduire à l'état de béatitude, mais son influence ne dépassa guère l'entourage de
Mme Acarie, où elle toucha cependant Bérulle.
Selon certains, le plus grand « spirituel » du XVIIe siècle, et le plus
méconnu, est le jésuite J.J.
Surin.
On le trouve parmi les exorcistes des Ursulines de Loudun, qu'il contribue à
apaiser, en 1634.
Son œuvre est en grande partie perdue mais on en publie aujourd'hui les vestiges : le Guide
spirituel (publ.
1963) ou la Correspondance (publ.
1966).
Ce n'est qu'avec Mme Guyon qu'on trouve un mouvement mystique de quelque ampleur, mais il reste entouré d'une
suspicion malveillante et n'est guère connu que par la querelle, très violente, qu'il suscita entre Bossuet et Fénelon.
Le nom de quiétisme semble avoir été utilisé pour la première fois vers 1682 pour qualifier les écrits d'un certain
Malaval, puis le fameux Moyen court et très facile pour l'oraison de Mme Guyon, publié en 1685.
Après un siècle de
combat entre un molinisme de la bonne conscience et un jansénisme de la mauvaise conscience, le quiétisme est
l'anéantissement de la conscience.
Cette évasion du moi - dans le rien fut considérée comme une très sérieuse
menace.
« Cela peut conduire à de très grands maux », fulmina Bossuet (lettre du 1er juillet 1695) ; Brunetière, en
1904 encore, juge Mme Guyon « bonne à envoyer de nos jours à la Salpêtrière », et même aujourd'hui certains
estiment que « la psychologie de Fénelon nous échappe en grande partie » tant son « indéfectible amitié pour Mme
Guyon » semble poser « un problème quasi insoluble ».
Pour justifier de pareils jugements, qui semblent bien des a
priori qu'il faudrait déchiffrer, on ne trouve chez Mme Guyon nulle outrance extravagante de conduite ou de propos,
seulement un enthousiasme éloquent et communicatif, un vocabulaire sentimental d'une assez puérile naïveté pour
exposer les états émotionnels de sa spiritualité.
Fénelon, répondant à la Relation sur le quiétisme, par laquelle, en
1698, Bossuet attaque l'Explication des maximes des saints (1697), note : « Mme Guyon n'est point le sujet de notre
affaire.
Il s'agit de la définition de la charité et de quelques autres points, purement dogmatiques, sur lesquels on
veut me donner le change en rendant ma cause odieuse et ridicule par Mme Guyon.
» Bossuet demanda et, après
bien des démarches et des intrigues, obtint à Rome la condamnation de Fénelon.
Un simple « bref » du pape, moins
solennel qu'une « bulle », condamnait vingt-trois propositions tirées des Maximes, mais seulement in sensu obvio,
c'est-à-dire « si on les prend en mauvais sens ».
Fénelon accepta la condamnation avec une humilité ostenta-toire.
Bossuet dut admettre, dans son triomphe, qu'il ne comprenait rien à la Charité..
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