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La réécriture est-elle un enrichissement ou un appauvrissement ?

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Cette fonction critique fait désormais, depuis, la Fontaine, partie intégrante de la définition de la fable. La réécriture peut aussi avoir une fonction métatextuelle, permettant ainsi une meilleure compréhension des enjeux de l'hypotexte : cf. Proust qui considérait le pastiche comme « de la critique littéraire en action », une critique « de l'intérieur » pourrait-on dire, et qui a marqué le genre par la qualité, la quantité et la variété de ses pastiches qui ont accompagné toute son oeuvre, en parallèle de ses réflexions de critique théorique.   - Le genre de la « suite » allographe (c'est-à-dire que l'auteur de la suite n'est pas l'auteur de l'hypotexte) appartient au processus de réécriture : elle permet d'enrichir l'hypotexte aussi bien qualitativement que quantitativement. Ex : ·        « La Fin de Robinson Crusoé » de Michel Tournier, à la fois suite allographe à la première partie du Robinson Crusoé de Defoe et suite autographe au roman de Tournier lui-même, Vendredi ou les limbes du Pacifique, présentant un Robinson déchu, détruit par l'alcool. ·        La suite allographe de Madame Bovary : Mademoiselle Bovary de Raymond Jean, cf. La quatrième de couverture résumant ce livre : Voici qu'un beau jour le maître livre de Flaubert tombe dans les mains de Berthe, la fille de Mme Bovary, ouvrière dans une filature normande. Emoi, fureur, curiosité poussent la petite à prendre le chemin de Croisset pour demander à l'écrivain compte de son outrecuidance. On peut imaginer la stupeur de celui-ci qui tombe pourtant sous le charme de l'intrépide jeune fille. De leur brève relation, tout empreinte de tendresse, de sensualité, de complicité, la servante et le perroquet seront témoins et parfois complices.

« Analyse du sujet et problématisation Ce sujet prend place dans l'objet d'étude des « réécritures » en littérature. La réécriture en littérature c'est le fait de réécrire un texte en y apportant des modifications.

La notion de réécriture est étudiée par Genette dans Palimpsestes : il crée pour nommer cette pratique d'écriture le terme d'« hypertextualité » désignant « toute relation unissant un texte B ( qu'[il] appeller[a] hypertexte) à un texte antérieur (qu'[il] appeler[a], bien sûr, hypotexte) sur lequel il se greffe d'une manière qui n'est pas celle du commentaire ».

On peut donc utiliser le vocabulaire de Genette et notamment les termes d'hypertexte et d'hypotexte dans le cadre d'un travail sur la réécriture. Le terme « enrichissement » implique la possibilité de rendre, par la réécriture, une œuvre plus belle et plus riche en y apportant quelque chose de nouveau.

Ce terme peut être employé dans un sens quantitatif et/ou qualitatif. Le terme « appauvrissement » présente, au contraire, la réécriture comme un processus de dépouillement quantitatif ou qualitatif de l'hypotexte.

Dire que la réécriture appauvrit le texte peut signifier d'une part, qu'elle en est une imitation imparfaite, mais d'autre part qu'elle le rend moins riche, moins noble.

L'appauvrissement peut donc être voulu et non subi : c'est le cas dans les réécritures burlesques. Problématique : La réécriture se présente-t-elle comme un processus d'innovation bénéfique enrichissant l'hypotexte ou comme une entreprise de dégradation de ce dernier ? I) La réécriture : une dégradation plus ou moins volontaire de l'hypotexte - Le processus de réécriture peut être considéré, à première vue, comme une entreprise de simple imitation toujours vaine, car les copies n'arrivent jamais à la hauteur du modèle.

L'hypertexte peut donc être toujours assimilé à un mauvais pastiche de l'hypotexte.

Cette conception, quelque peu naïve et vulgaire mais néanmoins réelle, du processus de réécriture implique donc que cette pratique soit toujours celle d'écrivains « raté » qui peuvent être comparés aux copieurs d'œuvres d'arts.

Ainsi le pastiche et la parodie sont-ils souvent considérés comme des genres mineurs, de peu de valeur. - Mais, cette dégradation, cet appauvrissement de l'hypotexte peuvent faire l'objet d'une volonté du pasticheur.

C'est le cas des réécritures parodiques mettant en œuvre une dégradation burlesque du modèle à des fins humoristiques, satiriques et divertissantes. Ex : Scarron dans Le Virgile Travesti, réécrit de façon parodique l'Eneïde de Virgile en opérant un travestissement burlesque.

Il recompose l'histoire d'Enée et des origines de Rome dans un registre différent, en l'adaptant à la vie et aux mœurs de son temps.

Il choisit l'octosyllabes, plutôt que l'alexandrin, vers noble que choisissent souvent les traducteurs.

Il fait preuve d'une grande désinvolture vis à vis des contraintes stylistiques en utilisant un vocabulaire trivial ( ainsi le cheval de Troie devient-il un vulgaire « dada ») et multiplie les situations scabreuses aboutissant ainsi à une démythification totale des actions et des personnages, tous ridiculisés.

Ainsi l'épopée virgilienne est-elle appauvrie stylistiquement puisque le style sublime est rabaissé au burlesque, mais cet appauvrissement est une volonté de l'auteur et se veut en adéquation avec les enjeux humoristiques de son texte. II) Mais la réécriture, apportant des modifications à l'hypotexte, se présente surtout comme un enrichissement Réécrire ce n'est pas seulement imiter, mais c'est apporter une nouveauté à l'hypotexte, lui apporter ce petit plus auquel son créateur n'avait pas pensé. - La réécriture peut enrichir une forme textuelle en en modifiant l'usage pour lui conférer de nouvelles fonctions.

Dans le cas des Fables de La Fontaine, le fabuliste donne une nouvelle fonction aux fables à laquelle Esope n'avait pas pensé : une fonction critique faisant de la fable un outil argumentatif puissant dans le combat d'une idée et dans la critique d'une société.

Cette fonction critique fait désormais, depuis, la Fontaine, partie intégrante de la définition de la fable.

La réécriture peut aussi avoir une fonction métatextuelle, permettant ainsi. »

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