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Ezra Pound

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Pour qu'un écrivain soit vraiment un grand écrivain, il est indispensable que son art progresse et se renouvelle. Or, l'activité créatrice de Pound est l'incarnation de cet axiome. L'une de ses devises, de même que le titre d'un de ses livres d'essais, est justement "faites du nouveau", traduction directe d'un idéogramme en or sur la baignoire de Tang. La poésie de ses débuts est essentiellement inspirée par les troubadours provençaux (Arnaut Daniel, Bertran de Born), les premiers poètes renascentistes italiens (Cino da Pistoia, Cavalcanti), les poètes latins (Ovide, Properce), et les lyriques anglais du XIXe siècle (Browning, Swinburne). De 1912 à 1920, il déploie une intense activité "in absentia" en Amérique, collaborant à la revue Poetry. Il a été l'un des poètes les plus en vue du mouvement imagiste, jusqu'à ce qu'il s'en détache, lui reprochant de s'être transformé en ce qu'il appelle "amygisme". Avec Mœurs Contemporaines et particulièrement avec Hugh Selwyn Mauberly (1920), Pound rejette une grande partie de ces influences et, abandonnant le langage trop usé des années 20, il commence à forger un langage qui ­ non sans être redevable à Flaubert et Gautier ­ s'avère nouveau et aussi plus dense. Ce langage exercera une profonde influence sur les générations de poètes à venir, que ce soit par le truchement direct de Pound ou celui de disciples tels que T.S. Eliot (dont le Désert fut dédié à Pound "il miglior fabbro", le meilleur poète). Dans Hugh Selwyn Mauberly, autobiographie spirituelle extrêmement poussée, Pound se préoccupe de plus en plus du "mot juste" et de la densité de la syntaxe, qui font maintenant tous deux partie de ses marques de fabrique.