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Charles DOVALLE (1807-1829) - L'inconnue

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Charles DOVALLE (1807-1829) - L'inconnue C'était un soir que tout brillait de feux ; Un soir qu'éclatant de lumières, Tivoli lassait les paupières De mille curieux. Là, des bosquets blanchis ; là, des masses plus sombres ; Des soleils de cristal, des jours brusques, des ombres Qui s'allongent sur le gazon ; Aux branches des ormeaux des lampes suspendues ; Des nacelles dans l'air ; d'innombrables statues Et des choeurs qui dansent en rond ! Ô jardins enchantés ! scènes éblouissantes ! Brises du soir ! zéphirs ! haleines caressantes ! Air brûlant, imprégné de désirs et d'amour ! Femmes, qu'on suit de l'oeil de détour en détour ! Tumulte ! bals confus, aux amants si propices ! Tourbillon entraînant ! Tivoli !... - Quand mon coeur, Froissé par le dégoût, mais ardent au bonheur, Voudra du souvenir savourer les délices, J'irai sous tes arceaux, à la place où brilla, Comme un astre d'argent, comme un blanc météore, Comme un premier éclat d'une naissante aurore, Cette belle inconnue... Et je dirai : " C'est là ! " C'est là quelle s'assit, rêveuse Et fermant ses yeux à demi : Là qu'elle demeura, pâle et silencieuse, Près d'un vieil époux endormi. Malheureuse peut-être au sein de la richesse ! Malheureuse peut-être avec tant de jeunesse !... Comme elle était belle, grand Dieu ! Et je l'oublîrais, moi !... j'oublîrais sa tristesse Et son regard qui semblait un adieu !... Non !... non, jamais ! - Un jour, dans les fêtes bruyantes, De plaisir, de beauté, des femmes rayonnantes, Pourront étaler à mes yeux De leurs dix-huit printemps les grâces orgueilleuses, Et tracer, en riant, dans leurs danses joyeuses, Des pas voluptueux. Quand je verrai leurs rangs s'ouvrir à mon passage, Quand j'aurai vu rougir leur gracieux visage, Peut-être alors mon coeur palpitera ; A mes regards une autre sera belle : Mais je dirai : Ce n'est pas elle... Et mon bonheur s'envolera.

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