Devoir de Philosophie

Camus, La Peste - Voici en tout cas les indications données par Tarrou...

Publié le 22/02/2012

Extrait du document

camus
Camus, La Peste - Voici en tout cas les indications données par Tarrou... Voici en tout cas les indications données par Tarrou sur l'histoire des rats : « Aujourd'hui, le petit vieux d'en face est décontenancé. Il n'y a plus de chats. Ils ont en effet disparu, excités par les rats morts que l'on découvre en grand nombre dans les rues. A mon avis, il n'est pas question que les chats mangent les rats morts. Je me souviens que les miens détestaient ça. Il n'empêche qu'ils doivent courir dans les caves et que le petit vieux est décontenancé. Il est moins bien peigné, moins vigoureux. On le sent inquiet. Au bout d'un moment, il est rentré. Mais il avait craché, une fois, dans le vide. « Dans la ville, on a arrêté un tram aujourd'hui parce qu'on y avait découvert un rat mort, parvenu là on ne sait comment. Deux ou trois femmes sont descendues. On a jeté le rat. Le tram est reparti. « A l'hôtel, le veilleur de nuit, qui est un homme digne de foi, m'a dit qu'il s'attendait à un malheur avec tous ces rats. " Quand les rats quittent le navire... " Je lui ai répondu que c'était vrai dans le cas des bateaux, mais qu'on ne l'avait jamais vérifié pour !es villes. Cependant, sa conviction est faite. Je lui ai demandé quel malheur, selon lui, on pouvait attendre. Il ne savait pas, le malheur étant impossible à prévoir. Mais il n'aurait pas été étonné qu'un tremblement de terre fît l'affaire. J'ai reconnu que c'était possible et il m'a demandé si ça ne m'inquiétait pas. « — La seule chose qui m'intéresse, lui ai-je dit, c'est de trouver la paix intérieure. « Il m'a parfaitement compris. « Au restaurant de l'hôtel, il y a toute une famille bien intéressante. Le père est un grand homme maigre, habillé de noir, avec un col dur. Il a le milieu du crâne chauve et deux touffes de cheveux gris, à droite et à gauche. Des petits yeux ronds et durs, un nez mince, une bouche horizontale, lui donnent l'air d'une chouette bien élevée. Il arrive toujours le premier à la porte du restaurant, s'efface, laisse passer sa femme, menue comme une souris noire, et entre alors avec, sur les talons, un petit garçon et une petite fille habillés comme des chiens savants. Arrivé à sa table, i! attend que sa femme ait pris place, s'assied, et les deux caniches peuvent enfin se percher sur leurs chaises. Il dit " vous " à sa femme et à ses enfants, débite des méchancetés polies à la première et des paroles définitives aux héritiers : « — Nicole, vous vous montrez souverainement antipathique! « Et la petite fille est prête à pleurer. C'est ce qu'il faut. « Ce marin, le petit garçon était tout excité par l'histoire des rats. Il a voulu dire un mot à table : « — On ne parle pas de rats à table, Philippe. Je vous interdis à l'avenir de prononcer ce mot. « — Votre père a raison, a dit la souris noire. « Les deux caniches ont piqué le nez dans leur pâtée et la chouette a remercié d'un signe de tête qui n'en disait pas long. « Malgré ce bel exemple, on parle beaucoup en ville de cette histoire de rats Le journal s'en est mêlé. La chronique locale, qui d'habitude est très variée, est maintenant occupée tout entière par une campagne contre la municipalité : " Nos édiles se sont-ils avisés du danger que pouvaient présenter les cadavres putréfiés de ces rongeurs ?" Le directeur de l'hôtel ne peut plus parler d'autre chose. Mais c'est aussi qu'il est vexé. Découvrir des rats dans l'ascenseur d'un hôtel honorable lui paraît inconcevable. Pour le consoler, je lui ai dit : " Mais tout le monde en est là. " « — Justement, m'a-t-il répondu, nous sommes maintenant comme tout le monde. « C'est lui qui m'a parlé des premiers cas de cette fièvre surprenante dont on commence à s'inquiéter. Une de ses femmes de chambre en est atteinte. « — Mais sûrement, ce n'est pas contagieux, a-t-il précisé avec empressement.

Liens utiles