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Au moment où vous commencez à vous orientez vers un spécialisation littéraire, vous réfléchirez au conseil que donnait Voltaire: Je vous invite à ne lire que des ouvrages depuis longtemps en possession des suffrages du public et dont la réputation n'est point équivoque. Il y en a peu, mais on profite bien davantage en les lisant qu'avec tous les mauvais petits livres dont nous sommes inondés ?

Extrait du document

xxv : Visite chez le seigneur Pococurante, noble vénitien). 3. Le « critère » retenu : les « classiques » consacrés par le temps (cf. Boileau, Réflexions critiques sur Longin, Réflexion VII) et non les « ouvrages équivoques », c'est-à-dire non encore sortis vainqueurs de l'épreuve du temps. On rencontre la même prudence chez tous les directeurs de conscience littéraires (cf. Quintilien ; Sénèque : « Semper probatos lege = Lis toujours les auteurs éprouvés », Lettres à Lucilius, II). Voltaire dit d'ailleurs : « davantage de profit », après « ne... que » : le glissement de l'idée est à retenir; il suggère que, du moins pour certains lecteurs, la lecture des auteurs « équivoques » peut ne pas être exempte de tout profit! II. Le profit qu'on peut espérer des auteurs consacrés par le temps. Vague de l'expression : « On profite »; sans doute = contact fécond avec ce qui, au-delà des modes et des caprices fugitifs, est permanent et réussi artistiquement.

« Position et portée du sujet : Un conseil de Voltaire sur la lecture considérée comme un moyen de culture : il y insiste sur la nécessité de ne s'adresser qu'aux grands auteurs du passé, dont la solide valeur est établie depuis longtemps, et de négliger « les mauvais petits livres » qui nous inondent chaque jour. I.

Les circonstances » du conseil. 1.

Le correspondant : une adolescente, qui se pique d'écrire des vers et dont il s'agit d e former le goût, ce qui suppose le choix de certains modèles et la mise en garde contre certains défauts. 2.

L'auteur : conseil un peu étonnant de la part de quelqu'un qui fut si « actuel » (cf.

l'oeuvre polémique de Voltaire). Conseil qui s'explique quand on connaît l'étroitesse du goût de Voltaire, qui reste fidèle à l'idéal du XVIIe siècle en le corrigeant d'après ses préférences personnelles et en le nuançant d'après les tendances de son temps.

Si, théoriquement, il s'efforce au libéralisme, en pratique seuls trouvent pleinement grâce à ses yeux Horace et Virgile, Boileau et Racine (pour goûter pleinement son « Il y en a peu », lire Candide, ch.

xxv : Visite chez le seigneur Pococurante, noble vénitien). 3.

Le « critère » retenu : les « classiques » consacrés par le temps (cf.

Boileau, Réflexions critiques sur Longin, Réflexion VII) et non les « ouvrages équivoques », c'est-à-dire non encore sortis vainqueurs de l'épreuve du temps.

On rencontre la même prudence chez tous les directeurs de conscience littéraires (cf.

Quintilien ; Sénèque : « Semper probatos lege = Lis toujours les auteurs éprouvés », Lettres à Lucilius, II). Voltaire dit d'ailleurs : « davantage de profit », après « ne...

que » : le glissement de l'idée est à retenir; il suggère que, du moins pour certains lecteurs, la lecture des auteurs « équivoques » peut ne pas être exempte de tout profit! II.

Le profit qu'on peut espérer des auteurs consacrés par le temps. Vague d e l'expression : « O n profite »; sans doute = contact fécond avec ce qui, au-delà des m o d e s et des caprices fugitifs, est permanent et réussi artistiquement.

On peut espérer : 1.

Saisir un point de perfection, dans une direction donnée de la littérature (par exemple, la tragédie...) : a) point de perfection, après lequel seule la décadence est possible.

Il ne convient donc pas ici de songer à l'imitation, comme Voltaire le suggère et comme il l'a fait lui-même (cf.

ses tragédies qui restent, malgré de timides innovations, esclaves de la technique racinienne) ; b) point de perfection, qui a été atteint exceptionnellement par un auteur doué, réalisant un équilibre harmonieux entre les diverses facultés (d'où chez lui une adaptation parfaite d e la forme et du fond).

Ici la leçon est éminemment profitable, pour apprendre à s'exprimer avec clarté et simplicité, avec aisance et naturel, qualités suprêmes pour Voltaire, qui y insiste au cours de sa lettre. 2.

Prendre un point de comparaison, pour la solution de certains grands problèmes, l'étude de certaines grandes questions, en se référant : a) à des « types » littéraires, chargés d'humanité, plus vivants que des êtres de chair (Molière et Tartuffe...); b) à des « mythes » poétiques éternels, incarnant une passion, sans cesse renouvelés, revivifiés par le génie (Racine et Phèdre...); c) à un « examen » lucide des tourments qui assiègent un jour ou l'autre tout être qui sent et qui pense : sens de la vie, destinée de l'homme, conflits moraux de toute sorte (Pascal et les Pensées...). Transition.

La perfection seule a permis à la mise en oeuvre d'une matière toujours à la disposition de tous d'intéresser la postérité (le permanent) après avoir intéressé les contemporains (le momentané).

Dans ce cas, plaisir (qui double le profit) d'engager avec les « auteurs consacrés par le temps » cette promenade dont parle Sainte-Beuve, où chacun (lecteur et auteur) est tour à tour guide et touriste....

Mais encore faut-il trouver un partenaire à son goût.... III.

La nécessité de lire des ouvrages dont « la réputation est encore équivoque ». Être de son temps; mais intelligemment, « scientifiquement » (n'est-ce pas un savant qui disait : « Il faut lire les auteurs présents, afin de rester en communion de pensées et de sentiments avec les hommes de nos jours »?). 1.

Les « classiques » ont été « actuels » : Molière a le dessein « de peindre les moeurs de son siècle »; La Bruyère intitule son livre « Les Caractères ou Les moeurs de ce siècle », etc..

(cf.

les théories de Taine, qu'il a poussées à leurs conséquences extrêmes, mais qui, dans leur principe, sont d'une évidence éclatante).

En effet on n'écrit pas « dans le vide » et on est forcément l'homme d'un moment donné, avant d'entrer dans le Panthéon littéraire.

Selon le conseil de Voltaire, qu'aurait-on lu au XVIIe siècle, hormis les Grecs et les Latins? qui aurait lu Voltaire lui-même, et quelle influence aurait-il pu espérer de ses écrits? 2.

Le lecteur doit être « actuel » : a) Si grands que soient « les Anciens », ils ne peuvent répondre à toutes les formes d'inquiétude de tous les lecteurs successifs.

Même Molière ou Racine seraient dépaysés, s'ils revenaient brusquement parmi nous, sans « initiation ». Donc, désir légitime de voir traiter « à la moderne » les problèmes qui nous obsèdent : il se peut même que tel auteur, qui sera vite oublié (justement pour ce motif!), nous fournisse momentanément la solution la plus satisfaisante et soit, pour un bout de promenade, le compagnon rêvé pour nous entretenir de nos aspirations intellectuelles, morales ou autres.... b) Encore faut-il choisir ce compagnon, et ce choix est chargé de risques (déception, rancoeur, perversion de l'esprit...). D'où la nécessité d e nous méfier des pièges qui nous sont tendus : publicité, snobisme (le livre qu'il faut avoir lu), paresse intellectuelle.... Pour trouver, peu à peu et à mesure que nous vivons, les partenaires au contact desquels nous profiterons le plus, le meilleur moyen, c'est peut-être justement de lire (art si difficile!) d'abord à fond les auteurs qui satisfont aux conditions posées par Voltaire. Ils sont, d'ailleurs, beaucoup plus nombreux à notre époque que de son temps.

Espérons même qu'ils le sont assez pour nous apprendre à aller, dans notre choix parmi « l'actuel », vers ceux qu'on lira aussi longtemps qu'il y aura des lecteurs.

Mais n'ayons pas trop d'illusions sur ce point..... »

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