Aloysius Bertrand « Ondine »in Gaspard de la nuit
Extrait du document
«
Introduction
- Dans Gaspard de la nuit, A.
Bertrand explore, à travers de courts poèmes en prose, le royaume du rêve, des
hallucinations nocturnes, du fantastique.
- Dans l'un de ces textes, «Ondine», il reprend une vieille légende germanique, selon laquelle un peuple immortel
étrange, les Ondins, vit au fond des lacs.
Leurs filles tombent parfois amoureuses d'un humain.
Une ondine vient un soir
proposer sa main à l'auteur : elle cherche à le séduire par un chant, où elle dévoile sa vie lacustre.
Le poète refuse
l'offre, mais recrée dans son œuvre le charme de cette apparition.
- D'où les axes suivants :
I.
Le personnage d'Ondine
II.
Le thème de l'eau
III.
Les musiques du poème
I.
Le personnage d'Ondine
A.
Une créature mythologique
1.
Une apparition fugitive
- L'irruption et la fuite d'Ondine encadrent le texte : elle apparaît à la fenêtre dans un frôlement (l.
1) puis disparaît en
s'évanouissant (l.
19).
Rien n'indique qu'elle entre dans la pièce.
- Le poème ne donne aucune indication sur son physique.
Tout au plus peut-on imaginer qu'il s'agit d'elle lorsque
Ondine évoque la « dame châtelaine » en « robe de moire » (l.
3), et qu'elle a, comme ses sœurs, des « bras d'écume
» (l.
11).
La moire, tissu aux nuances brillantes et variées, suggère peut-être un corps de poisson, dont les écailles
luisent sous la lune.
De plus la voix d'Ondine est un murmure à peine audible (l.
14) ; la nuit renforce l'impression
d'étrangeté et favorise l'imprécision.
2.
Une princesse des flots
- Ondine appartient à une famille royale ; l'épouser rendrait le poète « roi des lacs » (l.
16).
Tous les courants
convergent vers son palais (l.
7), situé au centre de trois des quatre éléments constituant l'univers : le feu, la terre et
l'air (l.
8).
Le quatrième, l'eau, compose les murs.
- Son peuple vit dans un monde uniquement aquatique, où le travail n'existe pas.
La vie semble se réduire à nager : les
Ondins sont des flots en mouvement ; le père « bat l'eau » (l.
10), les sœurs « caressent de leurs bras d'écume les
fraîches îles » (l.
11) ou se moquent des arbres (l.
13).
B.
Une femme amoureuse
1.
La séduction
- Pour séduire, Ondine, comme les sirènes au passage d'Ulysse, chante d'une voix mélodieuse.
Le refrain « Écoute ! Écoute ! » (l.
1) tente de capter et conserver l'attention du poète.
- Elle vante son rang, la vie insouciante qu'il mènerait avec elle.
2.
Le mariage
- Comme pour le rassurer sur la sincérité de ses intentions, elle lui offre le mariage, lui montre peut-être « son anneau
» (l.
14).
- L'Ondine d'A.
Bertrand n'est pas une femme fatale, contrairement aux sirènes ou à d'autres ondines qui noyaient leurs
victimes.
Rien d'inquiétant ici : l'atmosphère nocturne est calme ; « le beau lac endormi » dans lequel Ondine invite le
poète n'apparaît jamais dangereux.
Au contraire, il semble un lieu de plaisirs, de richesses et de beauté.
D'ailleurs,
même repoussée, la jeune fille ne se venge pas : Ondine est plutôt une femme-enfant.
C.
Une enfant espiègle
1.
La naïveté
- On la sent dans les occupations folâtres de ses sœurs.
- Le second paragraphe ressemble à une comptine, où les propositions indépendantes s'enchaînent avec la même
structure à partir du dernier mot de la précédente, qui est répété : « Chaque flot est un ondin qui nage dans le
courant, chaque courant est un sentier qui serpente vers mon palais, et mon palais est bâti fluide...
» Ce procédé
s'appelle une anadiplose*.
La double assonance* des adjectifs «caduc et barbu» (l.
13) rappelle les jeux de sonorité
des chansons d'enfants.
Le saule pleureur transformé en vieux pêcheur (l.
13) peut appartenir à l'imaginaire enfantin :
cet arbre a la particularité de perdre ses feuilles en hiver (il est « caduc »), et ses branches très longues et fines
tombent et trempent dans l'eau, comme une barbe ou une canne à pêche.
Mais caduc veut dire aussi « usé », « vieux
».
- Enfin, cette proposition de mariage a un côté ingénu : Ondine est moins ici une femme qui s'offre qu'une petite fille
qui offre un cadeau.
D'ordinaire, mais elle ne semble pas le savoir encore, ce sont les hommes qui font une demande en
mariage, et non les femmes.
Or ici elle le supplie (l.
14).
2.
La légèreté
- L'espièglerie est présente chez les sœurs, qui s'esclaffent d'un rien, aiment se moquer des arbres.
- Ondine leur ressemble ; elle passe rapidement des pleurs à la joie, même lorsqu'elle se voit refuser son offre de
mariage.
Elle ne verse que « quelques larmes » avant de préférer « un éclat de rire » (l.
18), comme les enfants, qui
souvent se consolent vite.
- On notera la succession rapide des verbes dans le dernier paragraphe, qui traduit la vivacité des réactions d'Ondine.
»
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