tragédie tragédie domestique tragédie lyrique tragi-comédie transcription diplomatique translatio trimètre triolet trisyllabe trivium
tragédie. Genre dramatique traditionnel dont Aristote propose la définition canonique : « La tragédie est la représentation d’une action noble, menée jusqu’à son terme et ayant une certaine étendue, au moyen d’un langage relevé d’assaisonnements d’espèces variées, utilisés séparément selon les parties de l’œuvre ; la représentation est mise en œuvre par les personnages du drame et n’a pas recours à la narration ; et, en représentant la pitié et la frayeur, elle réalise une épuration de ce genre d’émotions » (trad. Lallot et Dupont-Roc). Cette définition célèbre convient à la tragédie antique, mais aussi, dans ses grandes lignes, à la tragédie humaniste et à la tragédie classique. Elle fixe les aspects essentiels du genre : il est dramatique, met en scène des héros ou des personnages d’un rang social élevé, s’exprimant sur un ton élevé ou sublime, dans une forme d’expression noble, en vers. La tragédie grecque n’en est pas moins réellement différente, par sa signification sociale et anthropologique, de celle de nos classiques ou de celle de Shakespeare. La tragédie grecque a un contenu religieux et civique. Elle met souvent en scène des héros humains confrontés avec les lois des dieux et de la cité. La tragédie classique française est, à la suite de la tragédie humaniste du XVIe siècle, un genre né d’une réappropriation culturelle de la tragédie grecque et romaine. Ses héros sont pris dans un conflit avec des forces qui les dépassent, mais qui sont très souvent intériorisées. Elle obéit à des règles strictes et constitutives (règle des trois unités, règle des bienséances) et forme avec la comédie, à laquelle elle est totalement opposée, un système générique fixe. Elle évolue au cours du XVIIIe siècle pour disparaître au cours du XIXe siècle. On a tenté au XIXe siècle (Schlegel, Hegel, Nietzsche) de définir, d’après la tragédie, une qualité qui lui serait propre, le tragique, et de définir un univers imaginaire, un monde qui lui correspondrait de façon spécifique, mais ces tentatives relèvent d’interprétations globalisantes très discutables et nous renseignent plus sur la philosophie de l’interprète que sur la tragédie elle-même. On discutera de même l’idée d’une pérennité de la tragédie au-delà de ses dernières survivances au XIXe siècle. Un titre comme La Tragédie optimiste (une pièce de Vichnievski) invite certes à lire ou à interpréter l’œuvre comme tragédie, mais c’est précisément parce que, du point de vue de la réception, la tragédie n’existe plus.
tragédie domestique. Sorte de drame (plutôt en vers qu’en prose) qui présente des personnages de toutes les catégories de la société, dans une action qui se déroule dans le cadre de la vie privée et dont le dénouement est tragique. Diderot emprunte ce terme à l’anglais domestic tragedy et distingue la tragédie domestique de la comédie sérieuse, tous deux genres intermédiaires nouveaux entre la tragédie et la comédie. tragédie lyrique. Forme de l’opéra aux XVIIe et XVIIIe siècles. Il s’agit en réalité de livrets d’opéras. La tragédie lyrique est en vers (mais n’est pas en alexandrins) et se distingue de la tragédie par l’adjonction de musique, de ballets et par la présence du merveilleux mythologique, prétexte à effets de machines. L'Atys de Quinault (1635-1688) est un modèle de tragédie lyrique.
tragi-comédie. Sorte de tragédie dont le dénouement est heureux (Le Cid est donné par Corneille comme une tragi-comédie en 1637) ou qui n’est pas directement réglée. Son origine est à rechercher dans l'Amphytrion de Plaute. On la définit parfois comme un genre intermédiaire, proche de la comédie héroïque, parfois on l’identifie à la pastorale dramatique (Il Pastor Fido de Guarini, 1590). Il n’y a donc pas de forme clairement repérée de la tragi-comédie, sinon par la négative. Ce genre s’est particulièrement épanoui entre la Renaissance et le classicisme et n’est pas sans affinités avec l’esthétique baroque. Il a été rejeté au XVIIIe siècle par les théoriciens du drame, qui redoutaient le conflit direct, dans une même œuvre, du franc comique et du tragique.
transcription diplomatique. On dénomme ainsi la transcription brute d’un texte médiéval (ou antique), tel qu’il se présente dans le manuscrit édité, sans correction aucune, et. sans résolution des abréviations. Il s’agit aujourd’hui, en génétique textuelle, de l’un des modes de transcription utilisés pour l’édition de manuscrits de travail des écrivains. On respecte donc au plus près la disposition du texte sur le feuillet, ses blancs, ses renvois, ses corrections, etc. translatio (n. f.). 1. De l’Antiquité à la Renaissance, ce terme peut désigner la métaphore. 2. Au Moyen Age et en médiévistique, on désigne par translatio (modernisé en « translation ») le type particulier de traduction qui caractérise cette période : une adaptation, qui ne recherche nullement la fidélité au modèle et se présente comme une recréation originale qui ne recule pas devant l’anachronisme et l’amplification. Les romans d’Antiquité (Thèbes, Énéos, Troie...) sont des translations de leurs modèles latins. 3. Au Moyen Age, la translatif) imperii et la translatif) studii désignent une conception de l’histoire de l’humanité selon laquelle le centre de la civilisation et du pouvoir d’une part, et la culture, le savoir, d’autre part, se sont déplacés progressivement d’est en ouest (en particulier de Grèce à Rome puis à la France) depuis la création du premier homme, et sont parvenus à leur terme à la fois géographique et temporel (proximité de la fin du monde) depuis leur installation en Europe occidentale. Chrétien de Troyes évoque la translatif) studii dans le prologue de son roman Cligès ; Otton de Freising et Hugues de Saint-Victor (XIIe siècle) ont contribué au succès de la translatif) imperii. 4. Au XVIe siècle, la translatif) studii est liée à la vénération dont fait l’objet l’héritage culturel gréco-latin chez tous les humanistes, qui croient cependant que la France peut aussi bien faire que Rome et Athènes. Certains d’entre eux remontent plus loin dans le temps et voient dans l’Égypte le berceau de la science et de la philosophie. D’autre part, dans la seconde moitié du XVIe siècle, les sentiments anti-italiens favorisent la recherche d’une culture nationale. Pour la même raison, des humanistes comme H. Estienne essaient d’imaginer (ce qui ne résiste pas aux faits) une transmission de la culture de la Grèce à la France, sans étape romaine.
treizain. Poème ou strophe de treize vers iso- ou hétérométrique. C’est toujours une strophe composée (par exemple un sizain + un septain).
trifonctionnalité, trifonctionnel. Structure de pensée caractéristique, selon Georges Dumézil, des peuples indo-européens et de leurs descendants, selon laquelle l’harmonie du monde et de la société repose sur la complémentarité et la distinction de trois fonctions : 1. l’administration du sacré et du droit ; 2. la force physique, en particulier guerrière ; 3. l’abondance, c’est-à-dire à la fois la richesse (agricole ou autre) et la sexualité. Cette structure se retrouve dans les diverses mythologies (en Inde, en Grèce, à Rome, dans les mondes celtique et germanique) et dans une part importante des littératures de ces peuples, dans l’Antiquité et jusqu’au cœur du Moyen Age (chansons de geste, romans arthuriens, chapitres dé chroniques paraissent avoir été marqués par ce mode de pensée trifonctionnel).
trimètre. Le terme s’applique en principe à la métrique antique pour désigner ou qualifier le vers de trois mètres. C’est par un usage abusif du mot qu’on désigne ainsi l’alexandrin romantique en 4/4/4, tel ce vers de Victor Hugo dont le rythme ternaire est souligné par l’assonance en [e] à chaque fin de mesure : Je marcherai / les yeux Fixés / sur mes pensées.
triolet (n. m.). On l’appelle aussi rondel simple. C’est un petit poème de huit vers sur deux rimes, dont les deux premiers vers sont répétés en finale, et le tout premier en quatrième position, ce qui donne la formule : ABaAa-bAB. Voici par exemple un triolet de Jean Molinet : Autre n'aurai Tant que je vive.
Son serf serai,
Autre n'aurai,
Je l'aimerai,
Soit morte ou vive.
Autre n aurai Tant que je vive.
trisyllabe (n. m., du grec treis, « trois »). Vers de trois syllabes, presque toujours en hétérométrie. Très rares sont les poèmes entièrement en trisyllabes, tel ce « Pas d’armes du roi Jean », dans les Ballades de Victor Hugo, dont voici la première strophe :
Çà, qu'on selle, Ecuyer,
Mon fidèle
Destrier.
Mon cœur ploie
Sous la joie,
Quand je broie L'étrier.
trivium (n. m.). Au Moyen Age, ensemble des disciplines littéraires qui constituaient les trois premiers apprentissages de l’enseignement des écoles, puis des universités ; grammaire, rhétorique, dialectique. L’ensemble formé par le trivium et le quadrivium remonte à Martianus Capella (Ve siècle), et constitue ce qu’on appelle les « sept arts » ou « arts libéraux ».
Liens utiles
- La comédie et la tragédie au XVIIIe siècle
- Cette tragédie ressemble constamment à une comédie qui tourne mal. Que pensez-vous de ce jugement de Charles Mauron sur l'histoire de Des Grieux ?
- Ionesco répond à une critique parue suite à la représentation de Rhinocéros à l'Odéon-Théâtre de France, mise en scène par Jean Louis Bonault le 22 Janvier 1960. Le journaliste reproche à Ionesco le fait que l'on ne puisse trancher entre une comédie ou une tragédie face au théâtre de l'absurde, et de Rhinocéros en particulier.
- La comédie est-elle supérieure à la tragédie ?
- Emile Faguet considère Britannicus comme « une tragédie bourgeoise, une intrigue de cour, une comédie d'alcôve se terminant en drame à la Zola. Il y a le génie de Racine sur tout cela ; mais je ne parle ici que du choix du sujet. Les grands intérêts humains ne sont pas engagés dans cette affaire, où personne n'y songe, ni dans la salle ni sur la scène. Il s'agit de savoir qui gouvernera le palais et qui, de Néron ou d'Agrippine, sera quitté par la Cor. Deux portraits d'ambitieux, admir