SOREL Charles [sieur de Souvigny] Vers 1600-1674

Romancier, né à Paris. Enfant prodige — il écrit et fait publier sa première œuvre à treize ans—, « historiographe de France », auteur à cette occasion d'un ouvrage dont on ne connaît rien d'autre que le titre (au surplus, étonnant) La Science de l'Histoire, cet érudit, a pour idéal un poète, alors en exil, le libertin Théophile, et il en fera le héros d'un roman haut en couleur, Francion, publié à vingt ans sans nom d'auteur et que, dans une édition ultérieure, il préférera attribuer par prudence à un obscur contemporain, mort d'ailleurs quelques années auparavant.

Francion nous apparaît comme une parodie du roman chevaleresque. C'est l'épopée burlesque de l'homme normal - non pas médiocre, mais sain - aux prises avec les circonstances elles aussi normales, c'est-à-dire bien souvent prosaïques, de la vie réelle. Comme les nobles redresseurs de torts et coureurs de princesses lointaines qu'il tourne en dérision, sa seule « quête » est d'amour; mais ce royaume qu'il voudrait instaurer, le royaume de la franche et innocente sensualité, est bien de ce monde. Au total, semblable au Pantagruel de Rabelais par plus d'un point, cette prétendue « Histoire comique » est une thèse camouflée : double revendication sur le plan philosophique (liberté de pensée) et sur le plan moral (liberté sexuelle). Sorel est moins heureux cinq ans plus tard, dans sa seconde tentative, Le Berger extravagant, nouvelle mise en cause du roman d'amour platonique, dont on pourra retenir tout au moins le sous-titre, curieusement moderne: L’Anti-Roman (1627). Charles Sorel n'est pas encore admis parmi les auteurs au programme: est-ce en raison des innombrables passages « réalistes », sinon « scabreux», de son chef-d'œuvre, l'Histoire comique de Francion ?