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ARRABAL Fernando 1932

Écrivain espagnol d’expression française, né à Melilla, Maroc. Une enfance marquée par la mort de son père, victime de la dictature de Franco (l’œuvre d’Arrabal sera peuplée de traîneurs de sabre fous ou criminels). En 1955, il s’établit de façon définitive en France et ses œuvres seront écrites directement en français. C’est au théâtre, d’abord, qu’il se fait connaître en 1959 : Baal Babylone, qui sera plus tard le sujet d’un de ses films, Viva la muerte. Mis à part un second film, J’irai comme un cheval fou (1973), Arrabal n’a cessé d’être fasciné par le théâtre (bien que son succès ait un peu tardé à s’y affirmer) ; car c’est bien là qu’a pu se déployer sa frénésie de rythmes visuels, de symétrie scénique (« rimes de l’action », selon l’expression de Queneau), de rituel enfin : Pique-nique en campagne (1959), Le Cimetière des voitures (1966), L’Architecte et l'empereur d'Assyrie (1967), Et ils passèrent des menottes aux fleurs (1969), Sur le fil (1974), La Cervelle du jaguar (1978), L'Extravagante Croisade d'un castrat amoureux (1989). C’est sans doute dans Le Cimetière des voitures (un terrain vague où se sont installés à vie de singuliers squatters, hommes et femmes, dont un trompettiste et un saxophoniste muet) que Fernando Arrabal parvient le mieux à développer son « théâtre panique » - la formule est de lui - et à laisser cohabiter ces extrêmes que sont, dit-il, la tragédie et le guignol [...], le mauvais goût et le raffinement esthétique, le sacrilège et le sacré.

Notons cette dernière formule, « le sacrilège et le sacré », qui est un fulgurant raccourci de toute l’œuvre dramatique d’Arrabal (et, ajoute-t-il à titre d’exemple : On voit dans « Le Cimetière des voitures » un Christ qui tue et qui vole. Ça ne me choque pas car en fait, nous sommes tous capables de tout). Antonin Artaud aurait acclamé en Fernando Arrabal la dramaturgie dont il s’était fait le théoricien et l’annonciateur: le « théâtre de la cruauté ».


■ Œuvres - En poche: L'Architecte et l'empereur d'Assyrie, Et ils passèrent des menottes aux fleurs, L'Aurore rouge et noir (10/18). - le Grand Cérémonial, Cérémonie pour un Noir assassiné, Le Jardin des délices, Bestialité érotique (id.). - Viva la muerte, Baal Babylone (id.).


Arrabal Fernando (1932). Né à Melilla (Maroc espagnol) le 11 août 1932, installé en France depuis 1955, il ne cesse de revivre son enfance (Baal Babylone, Julliard, 1959 ; le film Viva la muerte, 1971), l’arrestation de son père par les nationalistes (Les Deux Bourreaux, Julliard, 1958 ; Labyrinthe, Julliard, 1961), et de se tourner vers l’Espagne (El Greco, Flohic, 1991 ; Un esclave nommé Cervantès, Plon, 1996). Pour conjurer le passé, il choisit la transgression : ici le tragique côtoie le bouffon, le lyrique la scatologie, et à l’ombre de Sade ou de Lewis Carroll des silhouettes indécises se livrent aux rituels du mouvement Panique. Pourtant, cet imaginaire respire la peur de la femme, à la fois ange et démon (L'Enterrement de la sardine, Julliard, 1961 ; Le Couronnement, Julliard, 1965 ; La Vierge rouge, Acropole, 1986), enfant-putain (Le Tricycle, Julliard, 1961), animale (Les Amours impossibles, Bourgois, 1967 ; Bestialité érotique, Bourgois, 1969), mortifère (La Communion solennelle, Bourgois, 1967), femme qui ensorcelle (Le Ciel et la merde II, Bourgois, 1981), tue (La Reverdie, Bourgois, 1985 ; Bréviaire d’amour d’un haltérophile, Bourgois, 1986 ; La Tueuse du jardin d'hiver, Écriture, 1994) ou châtre (Le Roi de Sodome, Bourgois, 1981). Menacé, l’homme livre l’aimée à un tiers (Cérémonie pour un Noir assassiné, Bourgois, 1969; L'Extravagante Croisade d’un castrat amoureux, Ramsay, 1989), l’encage (Une orange sur le mont de Vénus, Bourgois, 1976), torture son image (Le Grand Cérémonial, Bourgois, 1968) et la tue (Fando et Lis, Julliard, 1958 ; Strip-tease de la jalousie, Bourgois, 1967). Cette violence se retrouve dans l’ordre politique puisque, après Pique-nique en campagne et Guernica (Julliard, 1961), Arrabal montre la composante érotique du pouvoir (L'Architecte et l'empereur d’Assyrie, Bourgois, 1967 ; « Et ils passèrent des menottes aux fleurs », Bourgois, 1969 ; L'Extravagante Réussite de Jésus-Christ, Karl Marx et William Shakespeare, Bourgois, 1982). Pourtant, il arrive que les épreuves se fassent initiatiques (Le Jardin des délices, Bourgois, 1969; La Tour de Babel, Bourgois, 1976) et amènent le personnage à devenir Quichotte (Les Délices de la chair, Bourgois, 1981) ou Christ (Le Cimetière des voitures, Julliard, 1958 ; Lève-toi et rêve, Bourgois, 1982). L’univers arrabalien porte ainsi la marque en creux du sacré auquel il rend l’hommage de la profanation.

ARRABAL Fernando.
Melilla (Maroc espagnol) 11.7.1932. Dramaturge espagnol d’expression française. Sa personnalité est profondément marquée par une enfance vécue au cœur de la guerre d’Espagne (son père, officier républicain, fut arrêté par les troupes franquistes, et, malgré ses recherches, son fils ne put retrouver sa trace). A. s’installe définitivement en France en 1955. Malade, il est aussitôt hospitalisé et fait un long séjour dans un sanatorium. C’est alors qu’il se met à écrire des œuvres qui relèvent d’une sorte de théâtre imaginaire et obsessionnel (Cérémonie pour un Noir assassiné; le Labyrinthe; les Deux Bourreaux). Remarqué par le metteur en scène J.-M. Serreau, Pique-nique en campagne est représenté en 1959, et l’œuvre dramatique d’A. commence à paraître en librairie cette même année. Dès lors se succéderont, avec des fortunes diverses, Guernica, le Tricycle et, à partir de 1965, des œuvres d’un caractère nouveau et provocant : A., en...