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allitération allocataire allocution alternance vocalique ambiguïté amphibologie

allitération. Répétition de phonèmes consonantiques soulignant un effet soit harmonique, soit structurel, soit rythmique. Les phonèmes consonantiques sont le plus souvent identiques, mais l’effet allitératif peut être relayé par des consonnes d’articulation proche ou encore s’appuyer sur des combinaisons de phonèmes. Dans l’exemple suivant, l’allitération en [v] figure entièrement dans le premier hémistiche, et la dentale, annoncée en [d] puis [t] dans ce même hémistiche, prend entièrement le relais dans le second, toujours sur un mode parodique : MonDes ViVoTant, Va//guemenT éTiqueTés
(Jules Laforgue, Les Complaintes, « Préludes autobiographiques ».)

allocataire. Nom donné en linguistique au destinataire d’un message. On appelle plus spécifiquement « narra-taire » l’allocutaire d’un récit. L’allocutaire peut être mentionné dans le texte (deuxième personne, appellatifs...) ou rester implicite. L’allocutaire ne se confond pas forcément avec le lecteur ; par exemple, nous ne sommes pas allocutaires des lettres de Mme de Sévigné. Il arrive aussi que, dans l’énonciation théâtrale et littéraire, il y ait lieu de considérer à la fois un allocutaire explicite (tel personnage) et un allocutaire implicite (le lecteur, le spectateur). On parle alors de « double situation d’énonciation ». allocution. Le terme signifie parfois, en linguistique, l’acte par lequel un locuteur s’adresse à un allocutaire. En rhétorique, il désigne une adresse brève à destination d’un public précis, un discours de circonstance plus ou moins solennel. Il arrive enfin que l’on appelle « allocution » le fait d’interrompre un développement pour prendre directement à partie son auditeur ou son lecteur, ou encore pour s’adresser à une personne,. une entité, absente ou fictive : Nos faiblesses honteuses ne peuvent plus nous cacher notre dignité naturelle. « O âme remplie de crimes, tu crains avec raison l'immortalité» (Bossuet, « Sermon sur la mort »).

allusion. Procédé qui fait entendre implicitement un sens qui renvoie à une référence extérieure à l’univers contextuel. Exemple : ces quatre vers de Jules Laforgue, vers la fin de la « Complainte des formalités nuptiales » (Les Complaintes), Ô Nuit, Fais-toi lointaine Avec ta traîne Qui bruit! sont une allusion à la fin de « Recueillement » de Baudelaire (Les Fleurs du Mal) : Et, comme un long linceul traînant à l'Orient, Entends, ma chère, entends la douce Nuit qui marche. alternance. L’alternance des rimes masculines et des rimes féminines apparaît dès les xiie-xiiie siècles. Elle n’est pratiquée régulièrement que depuis le XVIe siècle, et ce sont les poètes de la Pléiade qui ont contribué à la rendre systématique. Sensibles à l’existence d’une syllabe surnuméraire dans les vers à rime féminine (qui se fait entendre de manière distincte dans la poésie chantée), les poètes de toute façon ne faisaient pas rimer ensemble un vers à terminaison masculine et un vers à terminaison féminine. On appelle « vers féminins » des vers qui se terminent sur un mot à finale en e caduc (suivi ou non de -s ou de -nt), sans considération du genre même du mot. Notons que les subjonctifs aient et soient, et les formes d’imparfait et de conditionnel à la troisième personne du pluriel, forment des rimes masculines, alors que les présents de l’indicatif à terminaison identique (paient, voient, essaient) forment des rimes féminines. Exemple d’alternance : Percé jusques au fond du cœur a M Dune atteinte imprévue aussi bien que mortelle, b F Misérable vengeur d'une juste querelle, b F Et malheureux objet d'une injuste rigueur, a M Je demeure immobile, et mon âme abattue c F


A partir de la seconde moitié du XIXe siècle, l’alternance se fait plus rare, et le recours à la rime devient très irrégulier avec l’émergence du vers libre. Il peut arriver que l’alternance F/M soit remplacée par une alternance entre rimes vocaliques (vers terminés par un phonème vocalique) et rimes consonantiques (vers terminés par un phonème consonantique) :



alternance vocalique. À partir de la fin du XIXe siècle, la règle d’alternance des rimes féminines et des rimes masculines est plus irrégulièrement respectée, et quelquefois pas du tout. Il arrive qu’elle soit remplacée ou redoublée par une alternance (qui n’a rien d’une règle) de rimes vocaliques (phoniquement terminées par une voyelle) et de rimes consonantiques (phoniquement terminées par une consonne). Par exemple, ce quatrain de Laforgue est à rimes entièrement féminines, mais il y a alternance entre rimes vocaliques (V) et rimes consonantiques (C) :


ambiguïté. L’ambiguïté est la possibilité de faire correspondre, à un seul énoncé linguistique perçu, différentes analyses ou interprétations. La communication ordinaire, sans pouvoir toujours les éviter, essaie de limiter autant que possible les sources d’ambiguïté. La poésie, surtout la poésie moderne, utilise au contraire volontiers la richesse de l’ambiguïté. Elle peut se faire entendre à différents niveaux : - Ambiguïté phonique : elle joue sur l’homonymie, comme dans ce début du chant IV de « Neiges » de Saint-John Perse {Exil} : Seul à faire le compte, du haut de cette chambre d'angle qu'environne un Océan de neiges. On peut entendre aussi bien faire le compte (« décompter ») que faire le conte (« raconter une histoire »). - Ambiguïté lexicale : elle joue soit entre deux mots différents, mais identiques sur les plans et phonique et graphique, soit entre deux ou plusieurs sens possibles u un même mot, tel caractères dans ce passage de Segalen {Stèles, 1912) : Porte-moi sur tes vagues dures, mer figée, mer sans reflux; tempête solide enfermant le vol des nues et mes espoirs. Et que je fixe en de justes caractères, Montagne, toute la hauteur de ta beauté. (« Tempête solide ») Le mot désigne à la fois les aspects spécifiques de la montagne et les signes d’écriture qui servent à les décrire. - Ambiguïté syntaxique : elle est très fréquente dans la poésie moderne, surtout en l’absence de toute ponctuation, mais on la trouve par exemple dans Les Complaintes de Jules Laforgue : Dodo sur le lait caillé des bons nuages Dans la main de Dieu, bleue, aux mille yeux vivants (« Complainte du fœtus de poète »). aux mille yeux vivants est-il complément de main ou de Dieu ? La logique voudrait que ce soit plutôt de Dieu, mais la présence de bleue au féminin singulier en position d’épithète détachée de main après Dans la main de Dieu favorise l’ambiguïté.

Ambiguïté. Possibilité que possède un énoncé de présenter plusieurs interprétations, soit en raison de sa construction :
la crainte des ennemis = la crainte qu’on éprouve devant les ennemis
la crainte qu’éprouvent les ennemis
soit en raison du sens d’un ou de plusieurs mots qui le constituent. Ces mots peuvent être polysémiques, et le contexte ne permet pas de savoir quel sens sélectionner, ou insuffisamment déterminés.
L’ambiguïté est une propriété des langues naturelles, car les signes linguistiques ne sont pas liés par une relation univoque à leurs référents. Elle est souvent involontaire, mais certains discours en jouent, pour tromper autrui, par jeu, ou en poésie, pour enrichir le sens :

Ainsi les Cavaliers en armes, à bout de Continents, font au bord des falaises le tour des péninsules

(Saint-John Perse, Amers)

Que signifie exactement à bout de : au bout de ou ayant épuisé les ?


amphibologie (n. f., du grec amphiboles, « ambigu », et logos, « discours »). Ambiguïté non voulue, sens équivoque qui résulte soit d’une construction maladroite, soit dé l’homonymie, soit de la polysémie. Exemple : « J’ai donné des bonbons aux enfants, qui sont dans ma poche. » (MA)




amplification. Ce terme de rhétorique classique désigne l’art de mettre en valeur ce qu’on dit, pour emporter l’adhésion de l’auditoire ou exciter ses passions : l’amplification appartient surtout au genre démonstratif, même si elle peut intervenir dans les autres genres (notamment dans la péroraison du discours judiciaire). La tirade des « nez », dans Cyrano de Bergerac de Rostand, est le type même de l’amplification : elle use de l’abondance (répétition, synonymie), de l’hyperbole, de la gradation (du type : que dis-je, c'est un cap, c'est une péninsule). Au Moyen Age, l'amplificatio est considérée comme la grande tâche de tout écrivain, en particulier dans l’ordre de la réécriture de textes-sources. Elle est conçue en termes quantitatifs plutôt que qualitatifs : amplifier, c’est procéder par accumulation pour allonger. L’image et la comparaison, qui sont au cœur de l’amplification rhétorique des Anciens, cèdent la place- aux figures de la redondance, parmi lesquelles l’interpretatio, l'oppositum (voir ces mots) ou le parallélisme. On en trouve un des premiers exemples dans le Roman de Brut de Wace, dont l’art repose largement sur ce procédé. Ainsi, lorsque le roi Arthur convoque sa cour : Toz ses barons i fist venir : / Manda ses rois, manda ses contes, / Manda ses dus et ses viscontes, /Manda barons, manda chasez, / Manda evesques et abez.

Amplification. Développement d’une idée par le style, qui lui donne plus de richesse et de force. L’amplification s’oppose à la condensation. Elle utilise en particulier l'accumulation, la paraphrase (reformulation), la répétition : Le fleuve prenait des allures de lac, de mer intérieure. Nous étions dans les parages de sa source. C’était une plaine immense, entièrement submergée. Des forêts entières étaient sous l’eau. Des îles touffues allaient à la dérive. (Cendrars, Moravagine)
L’amplification peut concerner le discours dans son ensemble. En un autre sens, l’amplification, amplificatio, s’oppose à la diminution, minutio, et désigne l’attitude qui consiste à agrandir, comme dans l’éloge, tandis que la minutio rapetisse et dénigre.









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